Pour freiner le surdiagnostic, les médecins doivent mettre de côté leur peur des poursuites et les patients, leur hypocondrie. Le gouvernement doit également être partie prenante de ce changement de culture, comme cela s'est vu ailleurs.

La réaction initiale du ministre de la Santé, Gaétan Barrette, laisse toutefois songeur sur la volonté du gouvernement de prendre ce virage à bras le corps. Dévoilant son plan d'action le mois dernier, l'Association médicale du Québec a souhaité le présenter au ministre. Ce dernier a décliné l'invitation, affirmant que la question relève du Collège des médecins. Vraiment?

En Ontario, des modifications à la facturation des médecins, combinées à un programme d'évaluation de la pertinence de certaines procédures routinières, ont permis des économies de quelques centaines de millions.

Au Québec, le mode de rémunération actuel pousse les médecins à faire du volume et ne tient pas compte des bonnes pratiques. Cette avenue serait pourtant intéressante.

L'Institut national d'excellence en santé et services sociaux (INESSS) a évalué 14 procédures courantes qui totalisent 16 millions d'analyses par année au Québec, soit une facture de 20 millions. Dans son rapport, l'organisation estime que de meilleures pratiques permettraient d'éviter sept millions de ces procédures.

Un geste aussi simple que de modifier le formulaire de tests prescrits par les médecins, pour que certaines procédures n'y figurent plus d'office, changerait la donne. Mais l'INESSS émet seulement des recommandations. C'est au gouvernement d'apporter les correctifs.

Québec a aussi un rôle à jouer auprès des patients afin qu'ils comprennent que le médecin qui refuse de prescrire un médicament ou un examen le fait d'abord pour leur bien. Cette décision, un acte médical en soi, ne mérite pas automatiquement une plainte en déontologie.

Certaines provinces ont élaboré des guides de bonnes pratiques à l'intention des communautés médicales. L'Association médicale canadienne a instauré la campagne «Choisir avec soin», calquée sur celle des États-Unis, pour aider les médecins à prendre une décision éclairée et pour sensibiliser les patients à la problématique du surdiagnostic.

Une prise de conscience chemine lentement, mais il serait possible d'en faire plus. Ainsi, certains outils informatiques incluent une alarme qui prévient le médecin lorsque la procédure qu'il veut prescrire n'est pas recommandée. En Nouvelle-Zélande, les professionnels reçoivent un rapport de leurs «performances», leur permettant de se comparer à leurs collègues.

Attention. Contrer le surdiagnostic ne signifie pas pour autant renoncer à tous les tests. Ils sont utiles et nécessaires pour aider les médecins à diagnostiquer un problème. Mais il faut savoir s'en servir adéquatement et parfois, la bonne volonté ne suffit pas. Le gouvernement a intérêt à y prendre une part active. Après tout, c'est la santé des patients et des milliers de dollars qui sont en jeu.