Près d'un enseignant québécois sur cinq quitte la profession dans les cinq premières années. Le problème est connu, inquiétant, mais rien ne change. Il serait pourtant possible de renverser la tendance en lui accordant l'attention nécessaire, comme ce fut le cas pour les infirmières.

Au début des années 1990, moins de 85% des infirmières exerçaient leur profession cinq ans après l'obtention de leur permis. Aujourd'hui, ce taux est de 92%.

Une prise de conscience sur l'importance de revaloriser la profession a probablement contribué à améliorer la situation. Une table de concertation sur la main d'oeuvre infirmière a débouché, notamment, sur un programme de préceptorat pour les infirmières de moins de deux ans d'expérience.

Aujourd'hui, le portrait n'est pas totalement rose pour autant. L'épuisement et la mobilité professionnelle sont élevés, mais il y a des progrès en ce qui concerne la rétention.

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La profession enseignante est frappée de longue date par une problématique similaire. En plus des jeunes enseignants qui décrochent, il faut ajouter ceux qui sont au bord de l'épuisement. La moitié des enseignants à statut précaire auraient envisagé de quitter la profession au moins une fois.

La problématique est multifactorielle, mais la lourdeur de la charge de travail, la précarité d'emploi et la dévalorisation de la profession sont souvent invoquées.

Un choc attend le jeune enseignant qui sort de l'université. Un élève sur cinq est handicapé ou en difficulté d'adaptation ou d'apprentissage dans les classes. Malgré les stages, il n'est pas suffisamment préparé à cette réalité. Des aspects de la formation pourraient certainement être améliorés.

Les nouveaux professeurs se voient confier les mêmes responsabilités que ceux qui cumulent plusieurs années d'expérience. Et même pire: l'ancienneté fait en sorte que les plus jeunes se retrouvent avec les classes difficiles dont personne ne veut. Ils partagent leur temps entre plusieurs groupes, plusieurs niveaux, plusieurs écoles.

Les débutants ont besoin d'être épaulés par la direction et par leurs collègues. Des sommes ont été dégagées pour mettre en place des mesures de soutien, mais les initiatives sont encore trop rares. Avec les compressions qui touchent les commissions scolaires, elles sont aussi parmi les premières à passer à la trappe.

Quant à la dévalorisation de la profession, elle se fait sentir à plusieurs égards, du manque de matériel adéquat en classe jusqu'à la relation difficile avec certains parents qui remettent en question l'autorité du professeur en cette ère où l'enfant est (souvent) roi.

Évidemment, parmi les enseignants désabusés, certains ne sont tout simplement pas faits pour la profession. Mais le taux de désertion est trop élevé pour qu'on y reste insensible. Il est temps de passer aux actes. Beaucoup d'efforts ont été consentis pour réduire le décrochage des élèves, il est temps que l'on s'attaque à celui des enseignants.