Le récent avis du Conseil supérieur de l'éducation (CSE), qui porte notamment sur l'anglais intensif, nous invite à repenser notre approche en ce qui concerne l'enseignement de l'anglais au primaire.

Bien que favorable à l'anglais intensif, le CSE émet des bémols importants et confirme que le «mur à mur» n'est pas idéal. Le gouvernement a répondu en réitérant son intention de rendre le programme obligatoire, avec des «exceptions».

Il faudra connaître rapidement ces exceptions. À la lumière de l'avis, il est indéniable que l'anglais intensif offre des avantages, mais uniquement si les conditions sont réunies. Sans quoi, «c'est du temps mal investi», peut-on lire. Cette nuance est importante, car dans le contexte actuel, les conditions sont loin d'être réunies dans toutes les écoles.

Il faut des enseignants compétents; or, il manque de spécialistes qualifiés en anglais, langue seconde. L'anglais intensif impose une charge de travail supplémentaire aux titulaires de classe qui doivent condenser le reste des matières; plusieurs trouvent la tâche trop lourde et refusent d'enseigner en 6e année. Le soutien de la direction et de toute l'équipe-école est aussi indispensable; ce n'est pas toujours le cas.

Il faut se rappeler que pour rendre le programme obligatoire, Québec doit modifier son régime pédagogique, qui donne actuellement aux écoles la responsabilité de déterminer le nombre d'heures d'enseignement de l'anglais.

Des choix devront aussi être faits. Avec l'anglais intensif, il reste peu de place pour d'autres projets particuliers, que ce soit en arts ou en sciences. À juste titre, le CSE s'inquiète de voir que de belles réussites pourraient ainsi être compromises dans certaines écoles.

Le saupoudrage de l'anglais, à raison d'une heure ou deux par semaine, n'est pas suffisant. Dans ce contexte, même l'efficacité de commencer l'enseignement dès six ans est discutable. D'autres avenues pourraient être explorées, comme celle d'augmenter considérablement le nombre d'heures consacrées à l'anglais vers la fin du primaire, sans pour autant implanter un programme intensif.

Le Québec est ambivalent vis-à-vis l'anglais. Les parents veulent que leurs enfants maîtrisent la langue, idéalement qu'ils soient bilingues. Ce sont eux qui exercent le plus de pression en faveur de l'anglais intensif. En même temps, ils craignent pour l'avenir du français.

Le CSE rappelle avec justesse que la menace pour le français ne vient pas de l'apprentissage de l'anglais, mais d'un manque de conscientisation vis-à-vis notre culture. Il faudra pousser cette réflexion plus loin.

En ce qui concerne l'anglais intensif, la souplesse est de mise. Il faut encourager les écoles qui optent pour le programme et permettre aux autres d'explorer différentes formules. L'objectif commun doit être une certaine aisance en anglais pour tous les élèves. Il y a plusieurs façons d'y arriver.