Le drapeau jaune et rouge pendait lourdement devant le Club social espagnol après un violent orage. Le vent n'arrivait pas à le soulever.

Dure journée pour l'Espagne, championne de la Coupe du monde et équipe qui dominait la planète depuis 2010.

Quelques experts l'avaient prédit: le Chili a tout ce qu'il faut pour éliminer l'Espagne. Les gens qui emplissaient la salle, hier, venaient de le réaliser: c'était la fin d'un beau voyage.

Depuis 2010, l'Espagne pouvait se consoler de tous ses problèmes économiques et sociaux en célébrant des championnats de football. Une Coupe du monde, deux Euros...

Mais hier, on trouvait des visages tristes de tous les âges, des chandails rouges immobiles, un silence rompu par une fillette qui jouait avec un petit taureau mécanique. Oui, ça existe pour les enfants espagnols.

Même le barman chilien n'osait pas trop sourire.

C'était la fin pour les Casillas, Iniesta, Xavi, Fabregas, Fernando Torres... Tous ces beaux noms que la voix désespérée des commentateurs espagnols priait de marquer deux buts de plus en plus rapidement. De beaux noms d'une génération dorée que l'on n'entendra plus. Les jeunesses dorées finissent par passer, comme les jeunesses de tôle.

Victor Rodriges, un pilier du football québécois (il a été réserviste avec le Manic), aujourd'hui mécène pour les petits footballeurs, était surpris lorsque l'arbitre a décrété six minutes de temps additionnel!

Et allons-y dans un dernier espoir...

- C'est beaucoup, je n'ai jamais vu autant de temps de réparation. C'est vrai que les Chiliens ont beaucoup retardé le jeu.

- Aujourd'hui est un jour triste, mais la relève espagnole est prête. Les U19 et U18 remportent championnat sur championnat. Même tiki-taka, même style de jeu.

- Ce n'est pas comme au Portugal ou ailleurs, où il n'y a pas de relève.

- Les entraîneurs auraient pu utiliser quelques jeunes pour leur donner de l'expérience. Mais ce sont des gens loyaux. Comment éliminer des joueurs qui vous ont donné une Coupe du monde et deux Euros?

- On pourrait garder Ramos, Busquets, Alba... Les autres vont se retirer de l'équipe nationale. Cette année, rien ne fonctionnait, mais l'Espagne va revenir.

En attendant, je vous recommande un passage au Club social espagnol. Une sorte de salle de loisirs avec une cuisine typique et de qualité. Et une ambiance familiale.

Essayez la zarzuela, qui n'est pas une danse, mais un mijoté de fruits de mer.

Et puis décernons à nos concitoyens d'origine espagnole et catalane une médaille de grands sportifs pour avoir conservé la même gentillesse dans la défaite comme dans la victoire.

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Cette fois encore, je décerne le trophée de l'uniforme le plus élégant à l'équipe de France, qui y est allée dans la simplicité, dans le vintage, même...

On sait que les Bleus demandent toujours à de grands couturiers de dessiner leur uniforme. En 2014: maillot bleu nuit, culotte blanche, bas rouge... Zéro fioritures.

J'aime.

Si vous habitez à Montréal, vous savez que la ville est envahie par de jeunes Français à la recherche de la gloire et de la fortune. En fait, ils cherchent du travail. Il n'y en a pas chez eux.

Je suis de la génération où de rares immigrants français obtenaient automatiquement des postes prestigieux. Les Québécois étaient intimidés par l'accent, je pense.

Pas tous. Un de mes profs de français au secondaire nous avait imposé comme devoir l'écoute d'une émission de Frenchy Jarraud, à CJMS. Il fallait noter toutes ses fautes de grammaire et de syntaxe.

J'avais aussi noté l'attitude de mon prof.

Je me demande si les jeunes Français qui nous servent de la bouffe un peu partout à Montréal connaissent Frenchy Jarraud.