Le premier budget du ministre Carlos Leitao amorce des changements importants dans la gestion des dépenses et des ressources humaines au sein de l'État québécois. Les mesures annoncées sont ambitieuses et leur mise en oeuvre est jonchée d'obstacles. Cela dit, l'objectif est le bon: mettre un terme au déficit structurel qui, si rien n'était fait, entraînerait le gouvernement du Québec au bord du précipice.

Pour rétablir l'équilibre budgétaire, le gouvernement Couillard mise essentiellement sur le contrôle des dépenses. Les gestes destinés à accroître les revenus (hausses des taxes sur le tabac et les boissons alcoolisées, lutte à l'évasion fiscale) sont modestes. Par contre, les ministères et organismes gouvernementaux sont appelés à sabrer dans leurs dépenses pour 3,3 milliards cette année (2014-2015). Les compressions feront inévitablement des mécontents. Par exemple, des subventions versées à différents organismes seront réduites. Le budget du ministère de l'Éducation augmente de seulement 1,2%. Mais, M. Leitao a raison, revenir rapidement au déficit zéro «n'est pas une obsession, c'est une obligation.»

Et ce n'est qu'une première étape. Les compressions seront encore plus importantes l'an prochain (2015-2016). Où coupera-t-on? La réponse appartient à la Commission sur la révision permanente des programmes, mise sur pied par le nouveau gouvernement. Cette commission s'interrogera sur la pertinence et sur la portée des différents programmes gouvernementaux. On voit là une indication de l'approche à la fois méthodique et pédagogique du premier ministre, Philippe Couillard. Il s'agit d'étudier les choses en profondeur et de gagner le soutien de la population aux mesures à prendre.

Le gel des effectifs est l'une des décisions les plus importantes du budget présenté hier. Le gouvernement Couillard veut geler non seulement les effectifs de la fonction publique, mais aussi ceux des réseaux de l'éducation et de la santé. Or, Québec a constaté qu'il ne dispose pas des outils lui permettant de suivre de près l'évolution des effectifs dans ces gigantesques réseaux. Un projet de loi sera donc présenté afin de lui donner ces outils. Le risque d'une centralisation excessive existe, mais c'est peut-être le prix à payer pour mettre un terme à la croissance ininterrompue du nombre d'employés de l'État québécois (+48 000 au cours de la dernière décennie).

Ce budget et celui de l'an prochain feront mal, comme toute chirurgie, aussi nécessaire soit-elle. Cependant, les libéraux ont appris de l'échec de la réingénierie qu'ils avaient tentée sous Jean Charest. Autant que possible, le gouvernement Couillard veut éviter de braquer les Québécois. «La présentation du budget et la discussion des mesures que nous mettons en oeuvre seront marquées par le respect et par l'écoute», a déclaré le ministre des Finances. Souhaitons que les syndicats et autres groupes de pression fassent eux aussi preuve d'ouverture. Car, comme l'a expliqué le président du Conseil du trésor, Martin Coiteux, il ne s'agit pas de réduire ou de geler la taille de l'État, mais de redonner à la société québécoise la possibilité de faire des choix.