Comme à chaque annonce d'un nouveau conseil des ministres, j'attendais la nomination du nouveau ministre de la Culture pour éclater de rire. Ce fut Mme David et je n'ai pas ri. Je n'ai pas dit non plus comme d'habitude: ah, la pute. Je ne me suis pas demandé, comme pour les autres, combien de livres (de romans) elle avait lus cette année, combien de pièces de théâtre elle était allée voir et que peut-elle bien savoir de l'art contemporain. Il me suffisait qu'elle fût la soeur de l'autre. C'est ridicule, je sais bien, c'est pas parce qu'on est la soeur de quelqu'un de bien qu'on fera un bon ministre de la Culture, c'est pas de même que ça marche.

Je vous ai déjà expliqué comment ça marche, la culture. Qu'importe son ministre, la culture relève directement du premier ministre, non pas qu'il s'en soucie, il en a plus ou moins rien à foutre et justement, très précisément, le sort de la culture se joue dans ce plus ou moins rien à foutre-là.

Un indice: juste avant de nommer Mme Hélène David ou juste après, je ne sais plus, M. Philippe Couillard a dit que l'heure n'est plus aux mesures marginales ou cosmétiques. Bref, l'heure est grave. Ce n'est jamais une bonne nouvelle pour la culture quand l'heure est grave. Quand il est onze heures et dix pour les écoles et les hôpitaux, il est minuit-et-demi-docteur-Schweitzer pour la culture.

Le premier ministre a continué en disant qu'il fallait agir «avec courage pour redresser une situation qui menace la qualité de vie des générations présentes et futures». Quand un premier ministre s'inquiète de la qualité de vie des générations présentes et futures, il ne s'inquiète pas une seconde de leur rapport à la culture. Il s'interroge essentiellement sur la capacité qu'elles auront à se payer des soins de santé, l'éducation de leurs enfants, des routes, des garderies, des maisons, des autos, une retraite, des loisirs.

Parlant de loisirs, le premier ministre n'a rien à foutre (pareil pour Mme Marois avant lui et tous les autres) de la capacité qu'auront les générations futures à distinguer culture et loisir - résistance et consommation. Même que ce serait mieux qu'elles ne fassent pas trop de résistance.

Oserais-je vous suggérer une lecture, Madame la Ministre, peut-être une relecture: Hannah Arendt. La crise de la culture. Juste la préface dans laquelle elle dit justement qu'il est déjà minuit et demi et, tenez-vous bien, on était alors en 1961... Un demi-siècle plus tard, on est à «pas-d'heure». La culture n'est plus un ensemble d'idées, de propositions, de passages obligés. Juste une industrie.

Une industrie exactement comme cette autre culture, plus terre à terre si j'ose dire, la culture du maïs, qui a de commun avec la précédente de nourrir aussi les petits cochons. C'est mon presque voisin, Pierre Paradis, qui a été nommé ministre de la culture du maïs, il en pleurait de joie pendant sa prestation de serment. Je vais de ce pas lui demander conseil pour mon jardin: dis-moi, Pierre, les navets, les concombres, les panais, les endives...

Comment ça tu ne sais pas? N'en es-tu pas à ton 11e mandat à l'Assemblée nationale?

Pour en finir avec cette élection, un mot du petit doigt de madame Marois, pas pour me moquer, pour m'étonner encore. Ce petit doigt, rappelez-vous, le jour même du vote, lui disait qu'elle allait peut-être gagner. Voilà une femme entourée de gens sinon intelligents très informés, rompus à la game politique, voilà une femme brillante qui perd 8 à 0, il reste 11 secondes au match, quel nuage vient à ce moment-là obscurcir son cerveau et nourrir son extravagant espoir de l'emporter?

On n'arrête pas de répéter que le pouvoir corrompt, je ne vois pas qu'il ait corrompu Mme Marois ni avant elle M. Charest, ni M. Landry, ni M. Parizeau, ni M. Bouchard. On dit que le pouvoir corrompt, et s'il aveuglait plutôt? Si toutes ces lumières les empêchaient de voir? Et toutes ces sirènes, d'entendre? Ce n'est pas plus rassurant, remarquez.

RITES FUNÉRAIRES - Le monsieur de la tondeuse vient d'appeler: votre tondeuse est prête!

Rien ne presse, vraiment! Comme c'est parti là, je ne couperai pas mon gazon avant le mois d'août. Faisait - 2 hier matin et était-ce avant-hier? Il a neigé un petit peu. Pluie samedi, gris dimanche, pluie lundi, je propose un nouveau calendrier de 12 mois: janvier, février, mars, puis novembre un, novembre deux, novembre trois, juillet, août, novembre quatre, novembre cinq, novembre-novembre, décembre. Dans certains pays, quand c'est triste, on engage des pleureuses professionnelles. Nous, on fait le contraire: pour dire notre funèbre météo, on engage des petites comiques. Ah, ah, fera pas chaud demain. Mais non, je ne bougonne pas. Je dépéris.

FUSILLADE - Boston-Detroit, jeudi soir, du bon hockey de séries éliminatoires, sauf que le match s'est décidé sur un but de cul en supplémentaire, une rondelle qui a dévié sur le patin d'un défenseur bien sûr anéanti d'avoir compté dans son propre filet.

Pourquoi pas comme en saison une période supplémentaire de cinq minutes à quatre contre quatre, suivie d'une fusillade? Ces séances nous offrent des buts souvent spectaculaires, pourquoi les puristes du hockey détestent-ils tant ces fusillades? Quel plaisir trouvent-ils à attendre le milieu de la troisième période supplémentaire pour un but souvent brouillon qui ne rend justice à personne?

Me souviens d'une finale de la Coupe du monde de soccer (2006) à l'Olympiastadion de Berlin - c'est un peu plus qu'un quatrième match du premier tour des séries de la Coupe Stanley! L'Italie avait battu la France aux tirs au but, cette fusillade (j'étais dans le stade) m'est restée comme une des plus vives émotions sportives de ma vie. Parlant d'émotions, y a pas que le hockey au programme, y a la NBA aussi.