Recourant à l'enregistrement vidéo clandestin, un groupe de défense des animaux a documenté de répugnantes pratiques d'élevage de veaux de lait dans une ferme de Pont-Rouge, près de Québec. Les 800 bêtes destinées à ne vivre que de 18 à 20 semaines y sont confinées dans de minuscules enclos (parfois larges de moins de 50 cm), privées d'hygiène et de soins, battues, soumises à des décharges électriques.

En un mot: torturées.

Ces images tournées par le groupe Mercy for Animals ont fait le tour des médias du pays et le dossier a été transmis à la Société pour la prévention de la cruauté envers les animaux (SPCA). Il faut espérer que des accusations criminelles seront portées.

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Au sein de l'Union européenne, dans plusieurs États américains et un certain nombre d'autres pays, l'élevage par confinement des bêtes est interdit. Au Québec, la législation en cette matière ne contient que la notion de «règles généralement reconnues» par l'industrie, ce qui est vague à souhait. Quant aux producteurs, ils ne voient dans l'horreur de Pont-Rouge qu'un «cas isolé» et promettent un code plus strict (décrétant la fin du confinement, par exemple) pour 2018.

La vérité, c'est qu'il semble pour bien des gens extraordinairement difficile de comprendre que les bêtes, en particulier celles appartenant aux espèces supérieures, possèdent une capacité de souffrance qui ne diffère pas par nature, mais uniquement par degré, de celle des êtres humains. Ajoutons les considérations économiques et tout devient alors permis. De plus, Mercy for Animals a constaté que les modes d'élevage ayant pour effet de chosifier les bêtes entraînent presque automatiquement des actes délibérés de brutalité et de cruauté.

Il est douteux que la législation et l'autoréglementation règlent le problème... en particulier au Québec, qui n'a pas la réputation de très bien traiter ses animaux: on connaît le cas des usines à chiots, n'est-ce pas? En outre, les êtres humains sont omnivores et il est tout aussi douteux qu'une majorité renonce à consommer de la viande, des oeufs, des produits laitiers.

Que faire alors?

Un, faire pression sur les commerçants, petits et grands, du domaine de l'alimentation. Mercy for Animals rapporte que plusieurs firmes importantes (Costco, Metro, Sobeys, Loblaws) ont pris ainsi des engagements relatifs au bien-être animal.

Deux, faire connaître aux consommateurs le coût réel, en termes de souffrance, des quelques sous économisés sur un kilo de viande ou une douzaine d'oeufs provenant d'un élevage délinquant. De plus en plus, les détaillants étiquettent leurs produits de façon à faire connaître leur provenance et les conditions dans lesquelles les bêtes sont élevées. Un choix existe donc.

À un certain niveau de civilisation, que nous avons depuis longtemps atteint, le souci du bien-être des bêtes qui nous servent devient une obligation morale.