Dans la foulée de deux récentes chroniques qui avaient pour fond d'écran cette phobie qui fait voir des pédophiles partout, des lecteurs m'ont recommandé La chasse, un film de Thomas Vinterberg - danois, comme Lars von Trier, et partageant la même philosophie du cinéma, soit, si j'ai bien compris, un cinéma qu'il souhaite le plus éloigné possible de Hollywood.

La chasse raconte l'histoire d'un éducateur en garderie faussement accusé d'attouchements par une toute petite fille adorable et néanmoins menteuse.

Comme me l'écrit un lecteur: un film qui troue le coeur. C'est vrai, mais qui réconforte le coeur, aussi, en cela que tout le long de son cauchemar, l'éducateur pourra compter sur quelques rares personnes, dont son fils ado, pour l'empêcher de sombrer complètement.

En cela, également, que la police, qui mène habituellement la curée dans ce genre d'histoire, ici, au contraire, fait bien sa job. Ce n'est pas une histoire de méchants flics. C'est bien plus terrifiant que cela: une histoire de braves gens.

La critique dans son ensemble n'a pas trop déliré sur La chasse. La critique y a vu un film à gros sabots (qu'on entend venir de loin). Moi, tout au contraire, j'ai adoré le très juste portrait que le réalisateur y fait des «braves gens», en particulier des épiciers. Vous allez encore me demander ce que j'ai contre les épiciers. Rien. J'ai seulement noté depuis longtemps qu'ils prennent toujours la tête de la meute.

La chasse est sorti en DVD il n'y a pas si longtemps, il est encore sur les tablettes du club vidéo où je vous ai vus l'autre jour. Vous étiez devant moi à la caisse, avec Blue Jasmine et Capitaine Phillips.

Au fait, comment me trouvez-vous comme critique de cinéma? Mon problème, ce serait l'espace, si je faisais ce métier-là. Une fois par année, j'aurais pas assez d'espace pour parler, mettons, de Dogville, ou de Laurentie, ou du Ruban blanc, ou de Camille Claudel 1915, mais le reste du temps, de 999 films sur 1000, je ne saurais pas quoi dire.

Trente lignes, ça te va pour Blue Jasmine?

Une, c'est en masse: une crise de nerfs qui dure deux heures.

AVIS DE RECHERCHE - Ici un souvenir était le projet d'une artiste du Plateau (Mme Van Roost) qui a eu la belle idée, pour le jour du Souvenir, en novembre dernier, de faire raconter sur des affichettes jaunes des souvenirs liés à des lieux et affichés sur ces lieux mêmes.

Vous avez peut-être lu de ces courtes histoires en jaune avec un gros «ICI» en bleu, clouées à un arbre, fixées aux barreaux d'un balcon, à la grille d'une garderie, dans la fenêtre d'une maison, dans la vitrine d'une boutique...

Ici je suis allé à l'école pour la première fois.

Ici adossée à cet arbre j'ai embrassé mon chum en lui annonçant que j'étais enceinte...

L'affichette dont je veux parler maintenant était agrafée à un poteau de téléphone, rue Drolet, près du domicile de ma collègue de La Presse Marie Tison.

En haut de l'affichette, le numéro civique (que nous tairons). Dessous, le texte qui suit: «Ici mes trois fils ont grandi et moi avec eux, sans qu'ils le sachent, 14 ans de vie à les aimer et à apprendre le rôle de parent.

Ils m'ont peu à peu reniée depuis le jour où j'ai osé ce dont je rêvais depuis l'enfance, changer de sexe. Je ne suis plus pour eux qu'une égoïste qui les aurait oubliés.

J'espère qu'il leur reste au moins le souvenir de cette maison, et de combien leur papa-femme les aimait et les aime encore.»

Un matin, ma collègue a trouvé l'affichette déchirée au pied du poteau.

Alors voilà, je voudrais retrouver le monsieur, enfin, la dame qui a écrit ça. Ça ne presse pas. C'est pour ma chronique de la fête des Mères.

LES VIEILLES - Cette dame m'écrit à propos des quinquagénaires québécoises qui se paient un dernier tour de manège à Cuba ou ailleurs. Je ne comprends pas, dit-elle, que ces vieilles folles se racontent des histoires de princes Charmant qui sont en fait des escrocs. Je comprends tout à fait qu'elles aient envie de faire des tours de manège avec un pétard, moi aussi, plein de tours de manèges, mais t'as pas besoin d'acheter le parc d'attractions pour ça.

LES VIEUX - Toujours pas de cas de dopage à Sotchi, mais dans le vélo, y a pas de repos. David LeDuc. Un Américain de 62 ans. Oui, madame, 62 ans. Participait aux championnats nationaux des vieux (des maîtres) en Oregon. Pour la même course, la totale, il a eu un contrôle positif à l'EPO, aux amphétamines et aux stéroïdes. Coupable, a-t-il admis, mais avec explications. Les amphétamines, c'est parce que je souffre d'un déficit d'attention. Les stéroïdes, c'est pour la testostérone. C'est ce qui manque le plus aux vieux, la testostérone.

Et l'EPO?

L'EPO, c'était pour gagner.

Il a fini septième. Imaginez les six premiers.

LES GAIS ENCORE - Ça fait 223 ans qu'il n'y a pas de joueurs gais dans la NFL - le plus macho des sports après le hockey -, et le jour où j'écris que ça fait 223 ans qu'il n'y a pas de joueurs gais dans la NFL, ce jour-là précisément - c'est un peu l'histoire de ma carrière de journaliste -, juste ce jour-là, il y a un joueur de football gai qui déclare sa gaititude. Il n'est pas encore dans la NFL, mais il devrait y être l'an prochain.

Un joueur de ligne, à part ça, pas un de ces receveurs de passe fluet qu'on voit gambader dans la zone des buts après un touché. Un méchant joueur de ligne, un de ceux qui se garrochent pour plaquer le quart-arrière avec clairement l'intention de le tuer.

Il s'appelle Michael Sam, il est noir, de l'Université du Missouri, joueur tout étoile de la conférence South-East de la NCAA, promis au repêchage entre la troisième et la cinquième ronde à la NFL, en mai à New York, mais ça, c'était avant qu'il dise qu'il est gai.

D'après vous, quelle grande question vont se poser les équipes avant de repêcher Michael Sam? S'il va embrasser le quart-arrière après l'avoir plaqué? Ce que vous pouvez être niaiseux, des fois.

Vous me faites honte, tiens.