Le premier ministre du Canada, Stephen Harper, est à Montréal aujourd'hui. Devant la Chambre de commerce du Montréal métropolitain, il vantera les mérites de l'entente de libre-échange conclue avec l'Europe. Toutefois, il est certain que beaucoup de gens d'affaires lui parleront du pont Champlain. De l'urgence de bâtir un nouvel ouvrage qui soit sûr, efficace et beau.

M. le premier ministre, nous vous pressons d'aller constater par vous-même l'état de délabrement du pont Champlain. Voyez comment, dès le début de l'après-midi, une congestion monstre s'installe en raison de la fermeture d'une voie vers la Rive-Sud. Imaginez l'impact pour les familles et pour l'économie de la région.

M. Harper, ne vous y trompez pas, c'est votre gouvernement que les Montréalais rendent responsable de cette situation. C'est vous qui porterez l'odieux des conséquences économiques et sociales des fermetures qui surviendront sans doute au cours des prochains mois et années. Et c'est vous qui serez montré du doigt si un jour, par malheur, une catastrophe survient.

Bien sûr, le gouvernement du Parti québécois se fait un plaisir fou à critiquer Ottawa dans ce dossier (comme dans tous les autres). Certes, il est frustrant de voir les ministres indépendantistes exiger du gouvernement canadien qu'il se plie à tous leurs désirs et paye la facture, peu importe le montant. Et on tombe à la renverse quand on entend Jean-François Lisée qualifier la propriété fédérale de ce pont d'«incongruité de cette fédération». 

Qu'y a-t-il d'incongru à ce qu'Ottawa soit propriétaire d'ouvrages (pont Jacques-Cartier et pont Champlain) construits par sa volonté et à ses frais? Par ailleurs, le gouvernement du Québec n'a pas de leçons à donner à qui que ce soit en matière d'entretien d'infrastructures (l'échangeur Turcot? La rue Notre-Dame? Les paralumes?).

Cela dit, M. le premier ministre, la construction d'un nouveau pont est urgente et, si le gouvernement du Québec peut se permettre de faire de la petite politique, vous n'avez pas ce luxe.

Selon les informations circulant à Ottawa, les études faites pour Transports Canada concluent qu'un système de péage ne permettra pas de financer la construction du pont. Les quelques milliards nécessaires devront donc venir des coffres du gouvernement fédéral. Bien sûr, vos députés du reste du pays s'y opposeront. Ils diront que le Québec reçoit déjà des milliards en péréquation, que quoi que fasse le gouvernement fédéral, les Québécois ne sont jamais satisfaits. C'est vrai, mais sans rapport avec le dossier du pont Champlain.

La construction d'un nouveau pont n'est pas un caprice péquiste; c'est une urgence dictée par la sécurité publique et la nécessité économique. C'est au propriétaire d'y voir. Et le propriétaire, M. Harper, c'est vous.