Le résultat des élections municipales d'hier va très certainement donner un bon coup de pouce à l'économie de Montréal et de toute la région métropolitaine.

Pas parce que Denis Coderre, comme on le prévoyait, l'a emporté. J'aurais fait preuve du même optimisme si Marcel Côté avait gagné, ou même Mélanie Joly, quoique j'aurais été moins enthousiaste avec Richard Bergeron. Parce que l'important, dans un premier temps, ce n'était pas le résultat du scrutin, mais la tenue du scrutin lui-même, qui permettait aux Montréalais de tourner la page et de repartir du bon pied.

Les élections permettent de tourner la page, avec une administration assez transformée pour qu'on parle de renouveau, avec une opposition revigorée qui sera certainement très vigilante pour éviter une rechute. Denis Coderre, avec une équipe nombreuse au conseil municipal, sera en mesure de repartir la machine. C'est la première chose dont l'économie montréalaise avait besoin.

Mais le résultat de ces élections montréalaises montre que les plaies ne sont pas cicatrisées. Le taux de participation reste toujours famélique. Avec autour de 32% des appuis, Denis Coderre obtient un mandat très faible. Et le succès de Mélanie Joly, qui obtient autour de 27% des voix, envoie un message troublant. On pourrait y voir un esprit de renouveau; j'y vois plutôt un signe de désespoir de citoyens si découragés qu'ils sont prêts à voter pour une candidate sans équipe, sans programme et sans expérience.

Il est vrai que l'influence d'une administration municipale sur le développement économique est limitée. Il ne s'agit pas d'une mission traditionnelle des villes. Mais avec la transformation de l'économie mondiale, c'est devenu une obligation incontournable. Un maire qui ne s'occupe pas avec énergie du développement de sa ville ne mérite pas d'être là.

Pour cela, un maire n'a pas beaucoup d'outils. Il ne dirige pas un vrai gouvernement. Il ne peut pas lancer de grandes politiques. Il ne peut pas se servir de son budget, qui est un document comptable, et non pas une stratégie économique. Pour agir sur l'économie, un maire doit procéder de façon indirecte et, surtout, compter sur ses aptitudes de politicien.

Que ce soit à Montréal, à New York, à Québec, à Toronto, la fonction de maire est de nature présidentielle, et le succès d'un maire repose largement sur sa personnalité. Et c'est certainement ce facteur qui a permis à Denis Coderre de l'emporter.

La contribution économique la plus importante qu'on doit attendre de M. Coderre, c'est sa capacité d'influencer le climat, d'avoir un impact sur les courants insaisissables qui peuvent affecter l'état d'esprit d'une communauté urbaine. Une ville, c'est un peu comme un être vivant, avec ses hauts et ses bas, ses moments de déprime ou d'euphorie. Le maire y peut quelque chose.

Il peut aussi agir pour pousser des projets, bien les choisir, les mener à bien, surtout en évitant de se disperser. Tout comme dans ses efforts pour vendre sa ville, il doit presque être un voyageur de commerce, pour attirer des investissements, des touristes, des événements.

Mais l'enjeu économique le plus important pour Montréal est de nature politique, et c'est sa capacité de se faire entendre et comprendre à Québec, la capitale qui n'aime pas sa métropole. C'est certainement là que les aptitudes de M. Coderre seront les plus utiles.

C'est un combat qui exige de l'expérience politique, pour pouvoir à la fois convaincre et tordre des bras. Ce talent, on l'a vu chez les maires de Québec, Jean-Paul L'Allier et ensuite Régis Labeaume, et on sait à quel point il a fait défaut aux prédécesseurs de Denis Coderre, Jean Doré, Pierre Bourque ou Gérald Tremblay. On peut se demander, en passant, comment Mélanie Joly aurait pu affronter la capitale.