Tiger Woods a remporté trois des cinq tournois qu'il a disputés cette saison. Six des 20 derniers auxquels il a pris part. Ce retour en force l'a propulsé tout en haut du classement mondial. Un trône qu'il avait occupé pendant 623 semaines, dont 281 consécutives, avant d'en être chassé en octobre 2010.

Ces trois victoires confirmeraient une saison exceptionnelle pour la grande majorité de ses adversaires. Elles ne veulent pas dire grand-chose pour Tiger Woods. Elles sont même minimisées par ses détracteurs, qui refusent de reconnaître que le Tigre est bel et bien sorti du bois dans lequel il s'est perdu pendant plus de deux ans. Autant dans sa vie personnelle, qui lui a coûté un divorce et des centaines de millions en pension alimentaire et en pertes de riches commandites, que dans sa vie professionnelle, alors qu'il a plongé aussi bas qu'au 58e rang mondial.

À 10h45 ce matin, lorsqu'il se présentera sur le tertre numéro un du Augusta national, Tiger Woods n'amorcera pas seulement son 19e Tournoi des Maîtres. Il amorcera ce qui pourrait devenir le deuxième volet d'une carrière qui passerait d'exceptionnelle à légendaire.

En quête d'un cinquième veston vert, Tiger Woods est surtout en quête d'un 15e titre majeur. D'un premier depuis sa victoire à l'Omnium des États-Unis en 2008 à Torrey Pines, en Californie.

En gagnant dimanche, Tiger s'approcherait à trois titres majeurs du record que détient fièrement Jack Nicklaus depuis 1986, alors qu'il avait signé sa sixième victoire à Augusta. En gagnant dimanche, Tiger confirmerait qu'il est non seulement possible, mais presque probable, qu'il rejoigne et dépasse le grand Nicklaus. Autant au chapitre des titres majeurs que des victoires au Tournoi des Maîtres. Un tournoi qu'il faudra peut-être songer à rebaptiser Tournoi du Maître, si Woods éclipse un jour les six victoires de Jack Nicklaus.

Un fait accompli, selon l'un des principaux intéressés: «Je l'ai dit souvent et je le répéterai encore. Je m'attends à ce que Tiger batte mes records. Il est tellement talentueux, tellement méticuleux qu'il y arrivera», a convenu Jack Nicklaus mardi.

Calme et patience

Malgré l'enjeu crucial des quatre prochains jours et le fait qu'aux yeux de plusieurs observateurs, ici à Augusta, et de ceux de bien des amateurs aux quatre coins du globe, rien de moins qu'une victoire ne sera satisfaisant dans l'analyse de son tournoi, Tiger affiche un calme désarmant depuis le début de la semaine.

«Tous les aspects de mon jeu sont à point. J'ai corrigé certains défauts. Je suis plus régulier. Cela s'est traduit par des victoires que j'espère répéter cette semaine et le reste de l'année», a indiqué Woods lors de son point de presse, mardi.

Un point de presse au cours duquel il a parlé de façon ouverte et détendue d'un tas de sujets, dont son rôle de père de famille. Tiger s'est même permis d'échanger quelques blagues avec les journalistes entassés devant lui. Les collègues habitués de couvrir le Tigre assuraient ne l'avoir jamais vu aussi affable depuis bien des années.

Bien qu'il ait très hâte d'ajouter un titre majeur à son palmarès, Woods sait aussi qu'à 37 ans, il peut se permettre d'afficher un peu de patience. «J'espère me rendre à 19. C'est évident. Jack a patienté jusqu'à 46 ans avant de gagner son 18e. Il me reste donc du temps et pas mal d'occasions», a ajouté Woods.

Rory et les autres

Tiger Woods est le favori des preneurs aux livres et de plusieurs amateurs pour enfiler le veston vert dimanche. Bien qu'ils lui rendent hommage sans retenue, ses adversaires n'ont pas l'intention de le laisser gagner pour autant.

À commencer par Rory McIlroy, qui a retrouvé un plaisir certain à jouer après avoir connu un début de saison difficile. Multipliant les mauvais coups bien plus que les bons, Rory a même déclaré forfait à la classique Honda plus tôt ce printemps, prétextant un mal de dent impossible à supporter.

«J'ai retrouvé mon élan à Doral. Ma confiance et mon niveau de compétition sont revenus en fin de semaine dernière. Ces améliorations me permettent d'arriver à Augusta en confiance. C'est toujours plus plaisant de jouer au golf quand tu multiplies les oiselets», a convenu l'Irlandais.

Et la dent?

«Il m'arrive d'entendre des amateurs me poser la question. Elle va mieux. Mais je vous assure qu'elle sera retirée en juin...»

Gagnant de deux titres majeurs - Omnium des États-Unis et Championnat de la PGA - McIlroy souhaite bien sûr ajouter un titre à Augusta. Et bien qu'il devra écarter Tiger Woods pour y arriver, McIlroy s'est bien gardé d'entrer dans le jeu de journalistes qui ont tenté de mousser une rivalité entre les deux golfeurs.

«Tiger a 77 victoires sur le PGA, j'en ai six. Il a 14 titres majeurs, j'en ai 2. Ce serait donc une injustice de m'identifier comme un rival de Tiger.»

Prédictions

Difficile de prédire qui enfilera le veston vert dimanche. Mais si un seul nom peut être avancé, il est plus difficile encore de ne pas y aller avec celui de Tiger Woods.

Rory McIlroy, Phil Mickelson sont des choix logiques également. Brillant sur les verts, Brandt Snedeker serait aussi un candidat intéressant si ce n'était du fait qu'une absence de cinq semaines en raison d'une blessure pourrait peser lourd dans la balance en fin de semaine. Il prétend le contraire et se dit complètement rétabli. On verra s'il dit vrai.

Si j'avais la chance d'ajouter deux noms à celui de Tiger sur ma liste des favoris pour gagner, j'ajouterais ceux de l'imperturbable Louis Oosthuizen et du très intense Ian Poulter.

Dans la catégorie des surprises venues du champ gauche, mes votes vont à Fred Couples et Angel Cabrera.

Cela dit, je garderai un oeil très attentif sur les premiers élans de Tianlang Guan. Augusta est souvent le théâtre d'histoires particulières. Le fait que le jeune prodige chinois soit invité au Masters à 14 ans est déjà une histoire sensationnelle. Imaginez toutefois l'envergure qu'elle prendrait s'il devait être parmi les meneurs dimanche après-midi. Et s'il gagnait!

Et la météo? Après un début de semaine beau et chaud, on prévoit des nuages, du vent et des températures plus fraîches pour aujourd'hui et demain avec des risques d'averses et même d'orages dans la nuit de jeudi à vendredi. Le soleil devrait revenir pour la fin de semaine.

Jack Nicklaus, Arnold Palmer et Gary Player frapperont les coups de départ protocolaires. Et à 8h, ça commence pour vrai!

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50: Nouveauté cette année au Masters: les 50 meneurs - plus ceux à égalité au 50e rang et les autres joueurs qui sont à 10 coups ou moins de la tête - seront dorénavant invités aux rondes finales de samedi et dimanche. Cette invitation était jusqu'ici réservée aux 40 premiers.

Photo Jewel Samad, AFP

Rory McIlroy s'est bien amusé hier avec sa compagne Caroline Wozniacki.