Tous ceux - et ils étaient nombreux - qui considéraient que P.K. Subban méritait pleinement de faire sauter la banque et d'arracher au Canadien un contrat de cinq, six ou sept ans d'une valeur de 30 millions crieront sans doute à l'injustice.

Peut-être iront-ils jusqu'à dénoncer l'avarice d'un club aussi riche que le Tricolore? Qu'ils parleront d'exploitation en comparant les statistiques et le salaire de leur défenseur favori aux statistiques et salaires de plusieurs défenseurs moins bons, moins prometteurs, mais mieux payés?

S'ils le font, ils confirmeront qu'ils n'ont rien compris aux réalités sur lesquelles Marc Bergevin et P.K. Subban étaient campés dans le cadre de ces négociations.

De prime abord, le contrat signé par Subban, un contrat de transition d'une durée de deux ans et d'une valeur de 5,75 millions, semble une très bonne affaire pour le Canadien.

C'est tout à fait vrai.

Il représente aussi une bonne affaire pour Subban.

Bon! Comme n'importe quel sportif professionnel talentueux, flamboyant, populaire, fier et un brin orgueilleux, P.K. réclamait plus. Beaucoup plus. Les deux parties resteront discrètes sur les demandes. Normal. Le Canadien n'a rien à gagner à se montrer triomphant. Subban a tout à perdre en confirmant qu'il réclamait un salaire annuel autour de cinq millions pendant cinq ou six saisons.

Après quelques jours de réflexion - les trois victoires consécutives et la productivité de l'attaque massive centrée autour d'Andrei Markov ont certainement accéléré cette réflexion -, Subban a finalement entendu raison. Ce faisant, il a pris la meilleure décision en acceptant ce contrat de transition.

Au-delà de son talent, de sa flamboyance, de sa popularité, de sa capacité de relever les défis, de multiplier les minutes passées sur la patinoire et de l'avenir prometteur qu'on lui souhaite, P.K. n'a que

160 matchs d'expérience dans la LNH.

Un contrat faramineux sur le plan financier l'aurait non seulement condamné à répéter ce qu'il a fait lors de ses meilleures sorties, mais à dépasser ces performances. À les améliorer tous les soirs. Un contrat ridicule n'aurait donc donné aucun répit à ce jeune homme qui, bien que rempli de promesses, n'a pas encore trois saisons complètes d'expérience dans la LNH.

En plus, et cette réalité est bien plus importante que plusieurs partisans le croient, un long contrat aurait placé Subban dans une situation périlleuse dans le vestiaire de l'équipe.

Subban n'est pas une peste. Ça non! Il n'est pas détesté non plus. Ses coéquipiers ne sont pas des imbéciles. Ils savent qu'ils forment une meilleure équipe avec Subban auprès d'eux plutôt qu'assis dans son salon à Toronto.

Mais ses coéquipiers ne sont pas insensibles non plus au fait que le bonhomme en mène large. Très large. Qu'il tranche avec la tradition selon laquelle les jeunes joueurs, aussi bons soient-ils, ont le triomphe discret. Ce qui n'est pas dans les gènes de Subban.

S'il était arrivé à Montréal avec l'assurance débordante d'un contrat réservé aux joueurs autonomes les plus recherchés - ce qu'il n'est pas encore -, P.K. aurait facilement pu être largué par ses coéquipiers dans des moments difficiles. Autant dans les coins de patinoire que dans le vestiaire.

Et vous savez quoi? Même un gars aussi flamboyant aurait pu avoir de sérieuses difficultés à composer avec un pareil traitement de la part de ses pairs.

En acceptant le contrat qu'il a signé hier, en confirmant publiquement qu'il a encore des choses à prouver à ses coéquipiers et surtout à la nouvelle direction - qui a hâte de l'évaluer pour se faire une idée claire au lieu de se fier à ce qu'elle entend depuis un an -, P.K. met toutes les chances de son côté.

Un contrat de transition qui respecte les paramètres établis depuis le début par le Canadien, une telle attitude et des performances auxquelles il nous a habitués assureront à Subban un retour triomphal au Centre Bell lorsqu'il y posera ses patins la prochaine fois. Pas ce soir contre les Jets de Winnipeg, mais sans doute samedi ou dimanche lors de la traditionnelle fin de semaine du Super Bowl alors que les Sabres de Buffalo et les Sénateurs d'Ottawa feront escale à Montréal.

Et n'ayez crainte. S'il n'a pas touché le gros lot hier, Subban, en maintenant sa progression, le touchera dans deux ans.

Bases solides pour Bergevin

Ce contrat représente bien sûr une victoire pour Bergevin.

Après avoir donné une image différente au Canadien avec quelques embauches l'été dernier, après avoir assuré l'avenir de son équipe devant les buts et à l'attaque avec des contrats à long terme signés par Carey Price et Max Pacioretty, après s'être débarrassé de Scott Gomez et l'avoir remplacé par les jeunes Galchenyuk et Gallagher, des jeunes auxquels on assurera un véritable encadrement pour maximiser leurs chances de réussite - il était temps que le Canadien protège ainsi ses investissements -, Bergevin frappe un autre coup de circuit en respectant la structure financière qu'il a mise en place. Une structure que plusieurs amateurs auraient bien voulu le voir saccager pour assurer l'embauche de P.K.

En s'imposant dans ce dossier comme dans tous les autres qu'il a menés depuis son arrivée, Bergevin a établi une base très solide sur laquelle il pourra bâtir une équipe tout aussi solide, qui ne risquera pas de s'écrouler après deux, trois ou quatre ans comme cela a été trop souvent le cas au cours des quelque 20 dernières années, soit depuis la dernière conquête de la Coupe Stanley.

Correction

Dans l'empressement de soumettre le chiffre du match dans les minutes qui ont suivi la victoire en prolongation de 4-3 du Canadien aux dépens des Devils du New Jersey, dimanche, je vous ai induits en erreur. Ce n'était pas la première fois en 35 visites au Centre Bell, mais bien la troisième, que Martin Brodeur concédait plus de trois buts au Tricolore. Ça demeure un excellent résultat. C'était aussi la première défaite encaissée par Brodeur à Montréal après huit gains consécutifs.