On peut appréhender le futur avec des lunettes roses. Et croire qu'en 2030, les deux tiers des citoyens de la planète vivront dans des centres urbains, la plupart faisant partie d'une classe moyenne relativement confortable. Ils seront unis par les technologies de la communication et jouiront d'un système de santé axé sur la génétique.

Mais on peut aussi craindre le scénario catastrophe. Celui où l'humanité se battra pour des denrées et de l'eau, en particulier au Moyen-Orient et en Afrique. Où l'Iran se donnera l'arme nucléaire en même temps que le conflit israélo-palestinien s'aggravera encore. Où l'instabilité politique menacera l'intégrité du système.

L'avenir, donc? C'est au choix du client...

***

Chacun sait qu'il est difficile de faire des prédictions... surtout lorsqu'elles concernent l'avenir! Pourtant, c'est un exercice auquel se livre tous les quatre ans le National Intelligence Council, l'agence américaine de renseignement et d'analyse qui conseille le président sur les politiques à long terme.

En ce qui concerne les États-Unis eux-mêmes, le rapport du NIC suggère la modestie.

Même si cette nation devait conquérir son indépendance énergétique (ce qu'elle fera bel et bien, redessinant ainsi la carte géopolitique mondiale), elle ne sera plus le centre du monde, en effet. On continuera à se tourner vers l'Amérique et ses alliés pour policer la planète. Mais c'est la Chine qui sera le pôle économique dans un avenir proche. Le monde sera donc multipolaire, aucune autre nation ne succédant aux États-Unis en tant que puissance hégémonique.

La futurologie étant le terrain de jeu par excellence des pessimistes, il est assez remarquable que le NIC relève plutôt les tendances positives à l'oeuvre aujourd'hui.

La plus importante est certainement la stupéfiante expansion de la classe moyenne dans des pays comme la Chine et l'Inde. Selon moult études prospectives, on comptera dans moins de dix ans un milliard de citoyens chinois et indiens qui, extraits de la misère, en feront partie. Certes, cela posera de sérieux problèmes de ressources. Mais cela agira aussi comme un puissant moteur de démocratisation et de stabilité, ce que les classes moyennes des pays développés ont toujours été dans le passé.

Parmi les autres forces agissantes, figurent pêle-mêle: les pouvoirs accrus dévolus à l'individu et aux réseaux informels qui les unissent; la culture dématérialisée; les vagues libertaires. Mais aussi: la persistance du terrorisme, même si ce n'est pas dans sa forme actuelle; la fragilité informatique; le vieillissement de la population.

Au total, le rapport du NIC est un puissant outil d'information sur les défis qui nous attendent. Mais il ne dit rien - et ne peut pas le faire - sur la détermination, l'ingéniosité et le bon sens que l'humanité mettra à les affronter.

La futurologie a ses limites, après tout.