Si je vous demandais comme ça de dire combien d'équipes évoluent dans la Ligue nord-américaine de hockey (LNAH) et de défiler le classement actuel, seriez-vous capables de répondre sept et d'assurer avec conviction que le Marquis de Saguenay partage le premier rang avec l'Isothermic de Thetford Mines alors que le CoolFM de Saint-Georges tente de distancer le Caron et Guay de Trois-Rivières au tout dernier?

Si vous avez répondu non aux deux questions, ne soyez pas gênés. Comme vous n'avez pas à être gênés d'ignorer l'existence même de ce circuit. Ou de l'avoir rayée de votre mémoire.

Cela dit, sept ans après avoir profité de l'annulation de la saison 2004-2005 dans la LNH pour connaître ses années de «gloire», la Ligue nord-américaine existe toujours.

Mais, contrairement à la Ligue de hockey junior majeur du Québec qui profite du conflit actuel dans la LNH pour renforcer sa place dans le coeur des amateurs québécois, la LNAH patine dans l'ombre.

Elle compte toujours sur l'appui indéfectible de partisans fidèles, de Rivière-du-Loup à Cornwall où elle s'est installée cette année, en passant par Sorel-Tracy où elle a toujours été présente. Les partisans permettent aux clubs de la LNAH d'évoluer devant des foules moyennes de 1667 amateurs depuis le début de la saison, des amateurs qui s'intéressent à la Ligue nord-américaine en dépit de l'indifférence totale des principaux médias du Québec.

Image rétablie

Commissaire de la LNAH, Michel Godin ne comprend d'ailleurs pas que les médias boudent ainsi son circuit. Surtout en l'absence du Canadien et des autres équipes de la LNH.

Quand je lui rappelle que les années de gloire de sa ligue n'avaient rien de bien glorieuses alors que la qualité d'un match se mesurait bien plus en nombre de bagarres qu'en nombre de buts marqués, le commissaire semble presque heureux de se faire servir cette critique.

«Nous avons créé un monstre lors du dernier lock-out dans la LNH. Les bagarres avaient pris trop la place au point où une majorité d'amateurs nous a quitté. Avec raison. Les médias nous avaient dit d'afficher plus de sérieux, de faire le ménage dans notre ligue et qu'ils reviendraient ensuite. Le ménage, on l'a fait. Oui, il y a encore de la bagarre. Mais au lieu d'en avoir deux ou trois avant le début de chaque partie comme c'était le cas avant, on peut être deux ou trois matchs sans en avoir aujourd'hui. On a fait notre part, mais vous n'êtes jamais revenus», a répliqué bien calmement Michel Godin que j'ai joint plus tôt cette semaine à Pont-Rouge.

Sur ce point, je plaide coupable.

En guise de sentence, j'accepte de souligner que les sept équipes de la Ligue nord-américaine sont composées de 19 joueurs qui se séparent un plafond salarial de 5800 $ par rencontre.

Que les salaires sont versés en bonne et due forme et non dans un sac brun comme c'était le cas quand les «goons» étaient les mieux payés et qu'ils empochaient de l'argent à l'abri de l'impôt en guise de «per diem» ou d'indemnités de déplacement.

Que la saison s'échelonne sur 40 parties et que les matchs sont disputés les fins de semaine.

Hockey de qualité

Si la Ligue nord-américaine a fait ce qu'il fallait pour rétablir son image ternie par les bagarres, qu'en est-il de la qualité du hockey? «Meilleur qu'il ne l'a jamais été», assure le commissaire Godin.

Une réponse contraire m'aurait plus surpris qu'un règlement, hier, du conflit dans la LNH.

Mais en restructurant ses cadres, en optant pour le hockey plutôt que les bagarres de rues, la LNAH est maintenant une option intéressante pour des jeunes qui sortent de la LHJMQ, des plus vieux qui rentrent au Québec après des séjours en Europe ou dans les ligues mineures professionnelles et des vétérans qui refusent d'accrocher leurs patins.

Jesse Bélanger, qui a disputé 246 matchs avec le Canadien et quatre autres formations de la LNH, défend les couleurs de Saint-Georges-de-Beauce, à 43 ans. Bruno St-Jacques (Philadelphie, Caroline, Anaheim) et Denis Hamel (Buffalo, Ottawa) évoluent à Saguenay alors qu'Éric Meloche (Pittsburgh) s'illustre avec les Riverkings de Cornwall depuis qu'il est rentré d'Europe.

«Quarante joueurs de notre ligue ont déjà évolué dans les rangs professionnels. Au lieu de s'exiler aux États-Unis, les jeunes viennent chez nous. Qu'ils retournent à l'école ou entrent sur le marché du travail, nous leur offrons un beau tremplin. Ils sont libres, toute la semaine, pour travailler ou étudier et ils peuvent se faire entre 500 $ et 600 $ par week-end. Ça aide à bien partir dans la vie», insiste Michel Godin.

Contrairement à ce qu'elle avait fait en 2004-2005, la Ligue nord-américaine a fermé la porte aux joueurs de la LNH en dépit du lock-out cette année. «On a perdu le contrôle de notre ligue il y a sept ans. On a donné des salaires trop généreux pour nos moyens. Oui on avait du monde dans les gradins aux Colisées de Québec et de Laval, mais c'était artificiel tout ça. On a créé un monstre qui a failli nous engloutir. Il n'était pas question de répéter la même erreur», assure le commissaire Godin.

Malgré l'indifférence des médias, la LNAH est en bonne santé. Michel Godin parle même d'expansion alors que Montréal, l'Outaouais, l'Est ontarien et même la région de Kingston sont dans sa ligne de mire.

«La qualité de notre hockey et notre bonne santé financière nous rendent attrayants sur le plan des affaires. Et on le serait davantage si les médias recommençaient à parler de nous maintenant qu'ils ont de bonnes raisons de le faire.»

C'est fait!