Ça n'a pas pris beaucoup de temps pour que le nouveau gouvernement du Parti québécois se retrouve dans l'eau chaude. L'idée d'augmenter rétroactivement les impôts des hauts revenus a provoqué un tollé et a réussi à cimenter les libéraux et les caquistes. Tant et si bien que Mme Marois devra reculer et trouver un compromis.

Je crois qu'un compromis acceptable est possible et permettra au gouvernement de respecter l'esprit de son engagement. J'ai même une solution à proposer. Mais pour bien la comprendre, il faut remonter au tout début de cette histoire.

Pourquoi Mme Marois a-t-elle choisi d'imposer d'importantes hausses d'impôt pour les biens nantis, de surcroît rétroactives? Pour éliminer la taxe santé. Mais pourquoi l'éliminer? Tout part de là. Et c'est là que se situe l'erreur de jugement.

La contribution santé, annoncée par le ministre libéral des Finances Raymond Bachand dans son budget de 2010-2011, imposait à chaque adulte une taxe de 25$ en 2010, 100$ en 2011 et 200$ en 2012. Elle épargnait les plus pauvres: 1 million de personnes ne paient rien et un autre million et demi ne paient pas le plein montant.

Cette taxe a été très critiquée. La CAQ a promis de l'abolir, tout simplement parce que c'était une hausse d'impôt, et préférerait trouver l'argent en coupant dans les dépenses.

Le PQ, comme bien d'autres, dénonçait plutôt son caractère régressif. Sauf les pauvres, tous les contribuables paient le même 200$, qu'ils soient commis ou radiologistes. Le fardeau est évidemment plus lourd pour les familles à revenus modestes.

Si le problème de la taxe santé est son caractère régressif, il y a des façons simples de la rendre plus progressive. Il suffit de la moduler en fonction des revenus - moins que 200$ pour les gagne-petit et beaucoup plus pour les riches. Ou encore, de carrément intégrer cette taxe aux tables d'impôt sur le revenu.

Évidemment, cette solution ne donne pas le même répit aux classes moyennes qu'une abolition pure et simple. Mais il ne faut pas oublier l'objectif initial de cette taxe: maintenir la croissance des dépenses de santé à 5% malgré la lutte au déficit. Il n'est pas scandaleux de demander aux contribuables qui le peuvent de payer pour leurs soins de santé.

Bien sûr, cette solution ne fonctionnera pas si les objectifs du PQ étaient d'une autre nature.  «Notre volonté, c'est d'abolir la taxe santé, de retourner le 200$ à 5 millions de personnes», a par exemple affirmé lundi Shirley Bishop, directrice des communications au cabinet de Mme Marois. L'engagement, formulé de cette façon, ne laisse pas beaucoup de marge de manoeuvre. Ça ne fonctionnera pas non plus si le but réel, pour des raisons idéologiques, était d'alourdir le fardeau des hauts revenus.

La solution que je propose n'exclut pas que le gouvernement revoie la fiscalité des hauts revenus. Il y a de la marge de manoeuvre de ce côté-là. Mais il pourrait le faire à tête reposée, en abordant de façon plus réfléchie les questions d'équité fiscale, et en tenant compte des conséquences des mesures fiscales.

Mais tout compromis sera difficile à trouver parce que le PQ, à mon avis, a improvisé depuis le début dans ce dossier, et est pris dans un engrenage. On dénonce la taxe santé et sa régressivité. On promet son abolition. On cherche ensuite une façon de compenser le milliard qu'elle rapporte. On promet donc de taxer les riches, ce qui est très rentable au plan électoral. Comme ça ne suffit pas, on joue dans les dividendes et les gains de capital. Et enfin, pour que ça balance, on recourt à la rétroactivité. Difficile à détricoter.