En 2004, lorsqu'il était clair que la Ligue nationale de hockey verrouillerait à double tour les vestiaires de ses 30 équipes, les raisons qui poussaient les propriétaires à avoir recours au lock-out étaient tout aussi claires.

Parce qu'elle s'était dangereusement propagée aux quatre coins du circuit, la flambée des salaires menaçait plusieurs équipes. Elle mettait aussi en péril l'équilibre déjà précaire de la Ligue.

Proprio des Blackhawks de Chicago pendant 41 ans, Bill Wirtz avait le mieux illustré la situation en déclarant que même sous la menace d'un révolver chargé à bloc et appuyé contre sa tempe, il refuserait d'acheter son équipe devenue une machine à perdre de l'argent.

Bien que Bill Wirtz et ses riches amis propriétaires étaient les seuls à blâmer pour le gaspillage qui avait mené la LNH dans ce cul-de-sac, j'avais alors pris position en faveur des propriétaires.

Sept ans plus tard, il est impossible, voire impensable, de se ranger derrière eux.

Pourquoi? Parce qu'au terme du lock-out qui a rayé la saison 2004-2005, les propriétaires avaient en mains tous les outils nécessaires pour contrôler les salaires. L'instauration d'un plafond salarial représentait la planche de salut dont ils avaient besoin pour éviter de tomber dans les excès des dernières années.

En moins de deux ans, la planche a cassé sous le poids des millions que les proprios se sont remis à gaspiller. Et le pire dans tout ça, c'est qu'ils ont eux-mêmes torpillé le système auquel ils tenaient mordicus pour assurer la survie du hockey. Au lieu de profiter du plancher salarial pour contrôler leurs dépenses, plusieurs se sont mis à flirter dangereusement avec le plafond. Pis encore, ils l'ont contourné en acceptant de répartir les millions versés aux joueurs sur des éternités.

Il faut vraiment être très riches, trop riches, ou être carrément imbéciles pour se cannibaliser comme les proprios l'ont fait au cours des dernières années.

Et il faut prendre les amateurs pour des abrutis pour réclamer leur appui dans le conflit qui se dessine.

Pas question cela dit de prendre les joueurs en pitié. Ça non! Parce qu'une majorité d'entre eux touchent en une semaine le salaire annuel moyen d'une famille québécoise, ils ne feront pleurer personne.

Manque de sérieux

Mais quand on entend Gary Bettman prétendre qu'il est impératif de limiter la durée des contrats à cinq ans et que les jeunes devraient patienter jusqu'à leur dixième saison avant de pouvoir profiter de leur pleine autonomie, on a vraiment l'impression que le commissaire nous rit au en pleine face. Ou pire, que plusieurs propriétaires - qui sont aussi ses patrons - se fichent éperdument de ses directives.

Car pendant que le Canadien tient tête, avec raison, à P.K. Subban à Montréal, Taylor Hall et Jordan Eberle à Edmonton, Tyler Séguin à Boston et le défenseur John Carlson que les Capitals de Washington ont couvert d'or pas plus tard qu'hier à quelques heures de l'imposition du lock-out, ont signé des contrats réservés à des joueurs autonomes malgré le fait qu'ils sortaient tout juste de leur contrat de recrue.

Un non-sens.

Et je vous fais grâce des contrats réservés à Zach Parise et Ryan Suter au Minnesota, à Shea Weber à Nashville - avec la complicité des Flyers de Philadelphie - qui ont maintes fois été cités au cours des dernières semaines pour dénoncer l'incohérence des propriétaires de la LNH.

On fait quoi alors?

On espère qu'un éclair de gros bon sens frappera Gary Bettman et Donald Fehr tout comme les propriétaires et les joueurs qu'ils représentent avant que cet autre mélodrame de la misère des riches ne se traduise par l'annulation complète de la saison.

L'état-major à la rescousse

Ce n'est pas sur la patinoire, mais sur le gazon plus vert que celui de tous ses voisins du club de golf Royal Montréal que les premières conséquences du lock-out frapperont le Canadien de Montréal.

Si lock-out il y a bien sûr. Mais bon! À quelques heures de l'échéance de la convention collective, y a-t-il encore un ou deux optimistes qui croient qu'un troisième conflit de travail dans la LNH en 18 ans sera évité?

Mercredi, le Canadien tiendra son tournoi de golf annuel. Traditionnellement, ce tournoi donne le coup d'envoi au camp d'entraînement, à la saison.

Ce grand rendez-vous médiatique est d'abord, et surtout, la source de financement la plus importante de la Fondation du Canadien pour l'enfance. Parce qu'ils acceptent de payer 2500$ pour côtoyer P.K. Subban, Carey Price et les autres vedettes du Canadien pendant quelques heures et de dépenser plus d'argent encore dans le cadre des différents encans organisés au cours de la journée, chaque golfeur permet à la Fondation d'amasser près de 500 000$. Cette fortune est redistribuée aux quatre coins du Québec pour venir en aide à des enfants qui en ont plus que besoin.

S'il y a lock-out, les vedettes du Canadien brilleront par leur absence. Les vedettes d'aujourd'hui cela dit. Car pour palier la situation, le Tricolore comptera sur Guy Lafleur et tous les anciens disponibles afin de satisfaire ses clients golfeurs.

Mais au-delà des anciens, le Canadien orchestrera sa journée autour de son nouvel état-major. Et comme il y a maintenant autant de membres dans l'état-major du Canadien qui entourent Marc Bergevin et Michel Therrien qu'il y a de joueurs dans le vestiaire autour de Carey Price, le propriétaire Geoff Molson pourra faire oublier l'absence des vedettes d'aujourd'hui qui reviendront en force l'an prochain.

Si le conflit est réglé!

Pour joindre notre chroniqueur: fgagnon@lapresse.ca