Au lendemain de l'élection, la nouvelle première ministre, Pauline Marois, a énoncé en conférence de presse les cinq priorités du gouvernement qu'elle dirigera: l'annulation des droits de scolarité, le resserrement de la loi sur les contrats de construction, le développement rapide de places en garderie, une nouvelle loi 101, et des échanges avec Ottawa sur les pouvoirs du Québec.

Il manquait quelque chose. L'économie. Pas un seul mot. C'est à l'image de la campagne électorale du Parti québécois où les questions économiques ont été peu présentes. Et peut-être un reflet du peu d'intérêt de la première ministre pour la question.

L'omission était étonnante, quand on voit à quel point, partout dans le monde, ce sont les questions économiques qui obsèdent tous les gouvernements. C'est d'ailleurs la réaction qu'a eue le chef caquiste François Legault, qui a demandé à Mme Marois de convoquer l'Assemblée nationale le plus rapidement possible en raison des nuages qui pèsent sur l'économie mondiale.

Si elle n'a pas spontanément abordé la question économique, c'est sans doute aussi parce qu'elle n'est pas prête. Quelle sera exactement la politique économique de son gouvernement? On ne le sait pas vraiment. Qui sera capable de la mettre en oeuvre? On le sait encore moins.

Pourquoi ces doutes? Parce que le PQ a tellement changé qu'on ne sait plus où il est. On a assisté à un fascinant 180 degrés en cinq ans. Entre André Boisclair qui trouvait que les entreprises payaient trop d'impôt et Pauline Marois qui veut faire payer les riches. Il y a aussi un étonnant contraste entre l'enthousiasme pour la création de richesse de Mme Marois lorsqu'elle a pris la direction du PQ, et son discours actuel.

Le Parti québécois, sous sa gouverne, a amorcé un glissement à gauche. Il serait plus précis de parler d'un retour nostalgique au modèle québécois d'origine. Mais il est difficile de savoir si les positions du PQ reflètent les sentiments et les intentions de la première ministre, ou s'ils sont le résultat des pressions des radicaux du parti et des efforts pour séduire les souverainistes de gauche de Québec solidaire ou d'Option nationale. On ne sait donc pas trop où atterrira le PQ lorsque la poussière électorale sera retombée.

Un bon nombre des engagements économiques du PQ, lors de la campagne, ont été de nature fiscale: gels divers, abolition de la taxe santé, augmentation des redevances minières, hausse des taux d'imposition pour les mieux nantis, fiscalité plus sévère pour les dividendes et les gains de capitaux. Dans tous les cas, l'objectif premier était social: la redistribution. Et dans aucun de ces cas, le PQ n'a manifesté d'intérêt pour les conséquences économiques, pourtant considérables, de ses propositions fiscales.

La plupart des autres engagements économiques sont des thèmes énoncés très généraux qui cherchent à définir une image du Québec plutôt qu'à le mettre sur le chemin de la prospérité: rôle québécois de la Caisse de dépôt, souveraineté alimentaire, indépendance énergétique, une Caisse d'investissement dont l'élément central est politique, le rapatriement des fonds fédéraux de l'assurance-emploi.

Mais rien qui, concrètement, pourrait nous dire comment on entend travailler à augmenter le taux de croissance, protéger le Québec contre le marasme économique mondial, créer des emplois, améliorer la productivité ou augmenter le niveau de vie.

Et surtout, Mme Marois ne dispose pas d'une équipe solide pour mettre en oeuvre des politiques économiques. Il y a un seul nom qui ressort, l'économiste Nicolas Marceau. On est loin des personnalités fortes en économie, comme Jacques Parizeau ou Bernard Landry, capables de développer un discours économique et surtout, capables d'imposer les enjeux économiques dans un parti plutôt intéressé aux questions sociales.