Bonjour, je m'appelle Nathan, j'ai 11 ans et je pose des questions.

Il a rencontré, séparément, cinq candidats aux élections. Cela donne cinq vidéos, dont vous pouvez voir aujourd'hui la première (avec Amir) sur le web*.

Il a rencontré aussi Yolande James (ministre de la Famille), Bernard Drainville, Dominique Anglade (présidente de la CAQ et candidate dans Fabre) et Jean-Martin Aussant, fondateur d'Option nationale.

Je connais un peu Nathan. J'ai déjà écrit un truc sur lui il y a quelques mois. Il paraît que l'idée de ces vidéos réalisées par L'Équipe (mais non, pas le journal français de sport!), l'idée serait née de la chronique que je lui ai consacrée. En bref, Nathan est de Saint-Jacques, un village au sud de Joliette. Il a deux frères et une soeur, sa maman en attend un cinquième pour novembre. Nathan porte le carré rouge. Il l'a enlevé pour ces entrevues, il le remettra pour rentrer en classe le 31 août.

Ces vidéos sont très peu politiques. On est loin du débat des chefs, mais vous apprendrez quand même des choses. Vous savez ce qu'est, la tague barbecue? Vous faites la différence entre un étourneau et un merle d'Amérique? Le contraire d'une baleine, c'est quoi? Ah, voyez...

Commençons par la vidéo avec Amir, puisque c'est la première à être en ligne ce matin.

Avez-vous déjà fait une grosse bêtise?, demande Nathan.

Ai-je le droit de ne pas répondre à celle-là?, a éludé Amir.

C'est bien la première fois que je le vois si prudent.

Avez-vous déjà joué à la tague barbecue?

La quoi?

À tous les candidats, Nathan a demandé: si vous étiez une pièce du jeu d'échecs, laquelle ce serait? Sans surprise, Aussant et Drainville ont répondu la tour, parce qu'elle se déplace en ligne droite. Amir? Il a répondu tellement comme Amir devait répondre: je serais un pion. Un simple pion.

Il y a toujours un moment dans une conversation avec Amir où on a envie de lui donner un coup de pied et un moment où, au contraire, on a envie de l'embrasser...

Si l'enfant que vous étiez à 11-12 ans vous rencontrait aujourd'hui, qu'est-ce qu'il vous dirait?

Il me dirait: wow, t'as réussi à t'intégrer, t'as pu peur! Parce qu'à 11 ans, Nathan, j'avais peur.

Je viens d'appeler Nathan chez lui, il revenait du marché Jean-Talon avec sa mère. Tu te souviens qu'Amir t'a dit qu'il avait peur, à 11 ans. Peur de quoi, tu penses?

Il avait peur de ne pas être capable de s'intégrer.

Pourquoi?

Parce qu'il venait d'un autre pays.

Ce gamin est d'une intelligence prodigieuse, c'est la deuxième fois que j'en suis ébloui. Mais en même temps, si je peux me permettre, ce serait bien s'il n'y avait pas de troisième fois, pour que cela ne devienne pas un numéro de petit singe savant. Cela ne me regarde pas, bien sûr. Je disais cela comme ça.

Laquelle des cinq entrevues as-tu préférée, Nathan? Je gage, celle avec Amir?

Non! C'est celle avec Bernard Drainville.

Nathan m'a retourné la question: vous, c'est Amir?

Non. Moi, c'est Yolande James.

Yolandes James! On n'est vraiment pas pareils! Pourquoi Mme James?

Parce qu'elle est belle. Parce qu'elle respire l'assurance, la fierté. En général, ce genre de réussite m'énerve. Mais des fois non, je ne sais pas pourquoi. Quand tu lui as demandé si, à l'école, elle était avec les intimidantes ou avec les intimidées, j'ai aimé l'histoire qu'elle t'a racontée.

Je me suis fait traiter de chocolat, de grosses lèvres, je suis déjà revenue à la maison un peu ébranlée, ma mère m'a dit: oui, t'es noire, oui, t'as des grosses lèvres, sois-en fière, t'es belle.

T'aurais dû lui demander si, en classe, il lui arrivait de copier sur sa voisine. Jamais, je suis sûr. Si elle se rongeait les ongles? Non plus. Elle te l'a dit: à 12 ans, elle écoutait New Kids on the Block. À 18, elle a voté libéral pour la première fois. Tu peux pas être plus raisonnable que ça.

J'ai bien aimé l'autre dame noire aussi, Dominique Anglade. Par contre, j'aurais pas aimé être sa petite soeur.

Enfant, vous avez déjà fait une grosse bêtise?

Oui, j'ai lancé ma petite soeur par la fenêtre (elle ne précise pas à quel étage elle était). J'ai enfermé ma gardienne au sous-sol.

Elle, elle savait ce qu'est la tague barbecue! C'est la tague où il faut embrasser quelqu'un? Elle, c'était pas New Kids on the Block, c'était Cindy Lauper.

Ce n'est pas Jean-Martin Aussant qui jetterait sa petite soeur par la fenêtre en écoutant Cindy Lauper.

Quand vous aviez 11-12 ans, quel était votre livre préféré, monsieur Aussant?

Le dictionnaire!

Quel est le contraire de guitare?

Bikini! Ça te va?

Nathan jubilait: c'est très, très bon. Entre nerds...

Enfin, dernière des cinq vidéos, celle que Nathan aime le plus (et que j'aime le moins!), celle où M. Drainville raconte qu'une fois, avec son .12, il a tué un merle d'Amérique, pensant que c'était un étourneau.

Avez-vous fait quelque chose quand vous étiez petit dont vous avez honte aujourd'hui, M. Drainville?

Il a honte de ça. D'avoir tué un merle d'Amérique parce qu'il l'a pris pour un étourneau. Il dit y penser chaque fois qu'il voit un merle d'Amérique. Il doit y penser très, très souvent, parce que le merle d'Amérique, c'est un rouge-gorge, et des rouges-gorges, y en a partout, même à Longueuil, où se présente M. Drainville.

Anyway. Je suis un peu de mauvaise foi. M. Drainville dit aussi de fort jolies choses. Si l'enfant que vous étiez à 11-12 ans vous rencontrait aujourd'hui, qu'est-ce qu'il vous dirait?

Il me dirait que c'est donc de valeur que tu n'aies pas repris la terre paternelle. J'ai été élevé sur une terre. On était trois gars. Aucun ne l'a reprise.

Votre plus beau souvenir d'enfance?

Après une journée à faire les foins, on avait chaud, on était sales, papa nous emmenait manger une «molle» au village...

Le gamin qui a mené les entrevues, les quelques personnes que je connais qui ont vu les vidéos, tous préfèrent celle de Drainville. Faut pas vous fier à moi. Vous savez comment je suis, toujours à préférer l'étourneau au merle d'Amérique.

* Vous pouvez visionner les vidéos sur le site www.journalmetro.com/nathan. Amir aujourd'hui. Demain, Jean-Martin Aussant. Lundi, Dominique Anglade. Mardi, Yolande James. Mercredi, Bernard Drainville. Le journal Métro se garde une exclusivité de trois jours, ensuite YouTube.