Certaines nations se seront fait tordre le bras, mais, enfin, on y est arrivé: pour la première fois, chaque pays inscrit aux Jeux olympiques comptera au moins une athlète féminine dans sa délégation. Bienvenue en 2012!

L'Arabie saoudite, après avoir d'abord annoncé qu'aucune de ses citoyennes ne ferait partie de sa délégation, a finalement annoncé la participation de deux femmes: la coureuse Sarah Attar et la judoka Wodjan Shahrkhani.

On ne s'attend pas à les voir sur le podium. Pas parce qu'elles ne sont pas talentueuses, mais parce qu'on ne leur a jamais laissé la chance de se consacrer à leur art. La pratique du sport par les femmes en Arabie saoudite n'est pas précisément interdite, mais c'est tout comme: pas le droit d'aller au stade, pas le droit de louer des installations sportives (même pas des heures de piscine réservées aux femmes), pas d'éducation physique à l'école publique, pas de centre d'exercice (le gouvernement a même fait fermer les centres privés en 2009), pas de ligues sportives, pas de tournois. Un seul club féminin de basketball, privé, résiste aux pressions des conservateurs religieux.

Malgré tout, les sportives défient les règles. Il existe, par exemple, des ligues de soccer féminin clandestines. La capitaine d'une des équipes, Rawh Abdullah, 28 ans, confiait il y a deux semaines à l'Associated Press craindre que l'inclusion forcée de femmes parmi la délégation saoudienne puisse faire plus de mal que de bien. «Si elles réussissent, ça ira. Mais si elles ont une mauvaise performance, ils vont se retourner vers nous et dire: "Vous voyez? Vous y êtes allées et vous avez perdu. Vous nous avez fait honte."»

La coureuse Sarah Attar, elle, a déjà dû faire des compromis pour éviter de «faire honte» à l'Arabie saoudite. Attar est née et habite aux États-Unis. Elle fait partie de l'équipe d'athlétisme d'une université de San Diego où elle court - sans surprise - en short et maillot, tête nue. Mais dans les images officielles diffusées par le Comité international olympique (CIO) la semaine dernière, elle apparaît en survêtement ample, les cheveux cachés sous un turban.

C'est la première des conditions posées par l'Arabie saoudite avant de laisser ses citoyennes la représenter: le port de vêtements appropriés, conformes à la loi islamique. On exige aussi que les athlètes féminines soient constamment accompagnées d'un «gardien» et qu'elles ne se mêlent pas aux hommes.

Faut-il en rire ou en pleurer?

De la part d'un pays où les femmes n'ont pas encore le droit de vote et sont soumises à l'autorité du mari, du frère ou du père, la participation des femmes aux Jeux olympiques est une toute petite avancée. «C'est pour faire plaisir aux gens à l'étranger», a déclaré Manal al-Sharif, qui se bat pour que ses concitoyennes aient le droit de conduire une voiture. Les Saoudiennes, dit-elle, réclament des droits encore plus élémentaires.

C'est surtout ce dont il faudra se souvenir, lorsque Sarah Attar et Wodjan Shahrkhani entreront dans le stade.