Surtout la nuit, les travailleurs exerçant un métier les mettant en contact direct avec le grand public - sécurité, santé, commerce, transport - doivent composer avec un certain niveau de risque. Entre 2000 et 2010, quelque 130 personnes ont été tuées au Canada dans l'exercice d'une telle fonction, dont 27 chauffeurs de véhicules publics.

Le métier de chauffeur de taxi - en outre pénible, accaparant et mal rétribué - est sans doute le plus risqué. Il consiste notamment en ceci: faire monter derrière soi, aux petites heures du matin, quelques parfaits inconnus possiblement éméchés, peut-être agressifs, en route vers quelque coin perdu de la ville...

Pour la plupart des gens, c'est la définition d'un cauchemar.

En 2009, la police de Montréal a fait le point sur cette situation après avoir constaté que, chaque année, entre 40 et 76 chauffeurs de taxi étaient victimes de vols qualifiés. Sondés à ce sujet, plus de la moitié d'entre eux ont jugé le métier peu ou pas sécuritaire. Presque tous (97%) ont rapporté avoir fait face à des refus de payer, ce qui, dans 20% des cas, a conduit à une agression physique.

C'est une situation de ce type qui aurait conduit à une altercation entre un chauffeur de taxi, Guercy Edmond, et un groupe de jeunes hommes. L'un d'eux a été grièvement blessé lorsque la voiture-taxi a roulé sur lui. Accusé notamment de voies de fait et de délit de fuite, Edmond a été remis en liberté provisoire, hier, alors que des dizaines de collègues entouraient le palais de justice pour exprimer leur solidarité.

***

Il est hors de question de juger ici le chauffeur de taxi. C'est le rôle de la justice. En outre, on en connaît fort peu sur l'affaire. Les vidéos horribles que tout le monde a vues n'en révèlent qu'un moment et un aspect, l'incident ayant apparemment débuté plus tôt, plus loin, à l'intérieur même de la voiture.

Quoi qu'il en soit, deux choses paraissent nécessaires.

Un, la police doit scruter le comportement des autres individus impliqués et déterminer s'il y a matière à accusations criminelles.

Deux, tous ceux qui ont un rôle à jouer dans l'industrie du taxi doivent travailler à renforcer la sécurité des 10 800 chauffeurs montréalais.

À la Société de transport de Montréal, on a investi 8,5 millions depuis 2005 (caméras, feux d'urgence, etc.) pour la sécurité des chauffeurs d'autobus, qui courent un peu les mêmes risques. C'est moins simple dans l'industrie du taxi, ne serait-ce qu'à cause du nombre de propriétaires. Et sans doute faudra-t-il imaginer des solutions nouvelles, spécifiques, adaptées.

Mais, chose sûre, c'est tout aussi nécessaire.