Le Connecticut est devenu il y a quelques jours le 17e État américain à renoncer à la peine de mort. Il est vrai que, à toutes fins utiles, on ne la pratiquait plus dans cet État. En 35 ans, on n'y a exécuté «que» neuf condamnés malgré les 4686 assassinats commis au cours de la même période.

De façon générale, la peine capitale est de moins en moins prisée chez nos voisins de Sud.

Actuellement, on reconsidère ou suspend son application dans sept autres États. Des 1291 mises à mort enregistrées depuis 35 ans, plus du tiers l'a été dans une seule juridiction: le Texas (481 exécutions). Et un autre tiers dans une petite poignée d'autres États (Virginie, Oklahoma, Alabama, Georgie, Floride).

Cette dynamique ne profite cependant pas aux populations des autres parties du monde où la peine capitale non seulement fleurit, mais est appliquée dans des circonstances encore plus barbares.

Ainsi, la Chine et l'Iran occupent toujours la tête du macabre palmarès de l'assassinat perpétré par l'État. La Chine en termes de nombre absolu (selon les années, jusqu'à 6000 condamnés y seraient exécutés). Et l'Iran, au prorata de la population (1663 exécutions entre 2007 et 2011 pour une population de 78 millions d'individus).

Enfin, en 2011, quatre pays faisaient toujours des exécutions des spectacles publics: la Corée du Nord, la Somalie, l'Arabie saoudite et l'Iran. Et, en vertu de la charia, l'homosexualité demeurait punie par la mort en Arabie saoudite, au Yémen, en Afghanistan, aux Émirats arabes unis, en Mauritanie, au Soudan et dans certaines parties du Nigeria et de la Somalie.

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S'il est impossible de discuter avec des gens à qui un dieu a personnellement ordonné d'exécuter les criminels, et même les homosexuels, le cas du Connecticut démontre que la raison peut parfois triompher dans les autres cas.

Malgré l'opposition d'une partie des citoyens, les deux chambres et le gouverneur du Connecticut ont pu adopter et ratifier la loi supprimant la peine capitale. C'est d'autant plus remarquable que vient de prendre fin le procès des deux auteurs, alors en libération conditionnelle, d'un acte qui a révulsé l'opinion publique: le meurtre et le viol d'une mère et de ses deux filles de 17 et 11 ans.

Certes, le gouverneur Dannel Malloy a évoqué des raisons morales pour expliquer son geste. Mais il a aussi rappelé la nature «imparfaite» du système de justice. À cause des appels et délais interminables, a-t-il expliqué, la plupart des condamnés meurent de vieillesse. Il aurait pu évoquer aussi le fait que l'erreur judiciaire menace: depuis 2000, une soixantaine de condamnés à mort américains ont été exonérés des crimes qui leur étaient imputés.

Si la fibre morale ne convainc pas, cette statistique devrait constituer le plus puissant plaidoyer contre la peine de mort. Dans les pays qui attribuent une valeur à la justice, bien entendu.