Ce n'est pas vraiment un budget qu'a déposé hier le ministre des Finances, Raymond Bachand. Mais plutôt le quatrième chapitre d'un seul et même plan de match budgétaire amorcé il y a quatre ans.

Le gouvernement Charest, comme tous ceux de la planète, a été confronté, à la fin 2008, à une crise économique mondiale qui l'a forcé à investir massivement des fonds publics pour soutenir la relance, ce qui l'a précipité dans les déficits et l'endettement.

Depuis 2009, la «priorité absolue» du ministre des Finances, comme l'a dit hier M. Bachand dans son discours, consiste à ramener ce déficit à zéro. Et c'est ainsi que depuis ce temps, les budgets du gouvernement du Québec ont en quelque sorte retrouvé leur nature originelle, des documents financiers qui portent essentiellement sur les revenus, les dépenses et les façons d'équilibrer les livres.

Bien sûr, on y trouve des initiatives de développement économique, comme des annonces sur le Plan Nord ou l'exploitation des ressources. Mais, en termes financiers, ces initiatives sont modestes, parce que la marge de manoeuvre est inexistante.

C'est à travers ce prisme qu'il faut regarder ce budget. Le gouvernement libéral est-il sur la bonne voie pour atteindre son principal objectif financier, le retour à l'équilibre? Pour cela, il n'est pas mauvais de revoir quelle était la stratégie.

C'est Monique Jérôme-Forget qui a défini le cadre, dans son budget 2009-2010. Pour cette année-là, l'effort portait sur la stimulation économique, mais la ministre annonçait qu'à partir de 2010-2011, on s'attaquerait au déficit, qui dépassait les 4 milliards, pour le ramener à zéro en quatre ans, soit dès 2013-2014. Pour atteindre cet objectif très ambitieux, elle promettait de ramener la croissance des dépenses de programmes à 3,2%, annonçait une lutte à l'évasion fiscale, une indexation des tarifs, une hausse d'un point de la TVQ en 2011.

En 2010-2011, Raymond Bachand, qui lui succédait, a respecté ce cadre, mais ajoutait un train de mesures. Il ramenait à 2,8% la croissance des dépenses, et allait chercher beaucoup plus dans les poches des contribuables: une autre hausse de la TVQ, une taxe sur l'essence, une contribution santé de 200$.

En 2011-2012, son budget fut essentiellement un rapport d'étape, avec les mêmes objectifs, et peu d'éléments nouveaux, si ce n'est la hausse des droits de scolarité.

Cette année, la quatrième du cycle, les défis pouvaient sembler plus costauds, parce que l'économie ralentit et que les échéances approchent. Mais le gouvernement libéral n'a pas dévié de sa course. Le déficit est même inférieur aux prévisions depuis deux ans et la croissance des dépenses est nettement plus basse qu'avant la crise. Cela montre que Québec est en contrôle et qu'il sera tout à fait capable, en partie grâce aux chèques fédéraux pour l'harmonisation des taxes, d'atteindre ses cibles, un déficit de 1,5 milliard cette année et zéro l'an prochain.

On pourra accuser les libéraux d'être les champions de la dette et des déficits, comme si la crise mondiale n'avait pas eu lieu. Critiquer leurs choix en oubliant que, par définition, presque toutes les mesures de réduction du déficit seront impopulaires. Se plaindre du fait qu'ils ont trop puisé dans nos poches, en oubliant que, souvent, les compressions font très mal. Ou dire, à juste titre, que la dette est inquiétante, ce qui nous rappelle qu'après le déficit zéro, la dette sera le prochain défi.

Mais n'oublions pas que Raymond Bachand livre la marchandise, ce dont bien des gens doutaient. Que le gouvernement Charest, dans ce dossier, a fait preuve de cohérence et de détermination et réussit là où l'Ontario se casse les dents. Que le déficit sera éliminé de façon équilibrée, sans coupes sauvages. Voilà l'essentiel.