Aux États-Unis, en France et ailleurs en Occident, les commerçants, les promoteurs immobiliers et les gouvernements multiplient les courbettes devant les visiteurs des économies émergentes. Et pour cause.

Bon, ce n'était pas aussi grandiose qu'à Pékin. Mais les touristes chinois qui déferlaient à Paris, à la fin du mois de janvier, ont tout de même pu goûter aux célébrations de l'année du dragon, fêtée en grande pompe en Chine.

Les clients chinois du chic magasin Printemps ont en effet été accueillis par nulle autre que Miss France 2012, toute de rouge vêtue pour les circonstances.

La jolie Française a serré les mains au son de tambours, cymbales et gong, pendant que des acrobates exécutaient une danse du dragon et du lion, symboles chinois de la puissance et de la réussite.

Pourquoi une telle opération de séduction? Facile à expliquer: chaque année, les Chinois dépensent 500 millions d'euros en France. Leurs achats divers s'élèvent à 1460 euros par personne en moyenne (environ 2000 dollars CAN), éclipsant les dépenses dans les magasins de la plupart des autres visiteurs, selon le ministère du Tourisme. Pas question, donc, de négliger des clients si généreux.

«Les Chinois représentent 50% de nos visiteurs [non européens], et cette clientèle internationale vaut 30% de notre chiffre d'affaires», a expliqué à l'AFP le directeur du Printemps Haussmann, Pierre Pelarrey.

Samba à New York

Toujours durant la période des Fêtes, des commerçants de Manhattan ont tout fait, sauf peut-être danser la samba sur les étals, pour attirer les Brésiliens qui visitent la Grosse Pomme en nombre croissant. Musique brésilienne, commis vêtus des couleurs de l'équipe nationale de «foot», etc. Bref, on a mis le paquet, affirment des médias américains.

Quelque 700 000 Brésiliens se sont rendus à New York l'an dernier - plus du double du nombre de visiteurs en 2009.

Les Canadiens et les Britanniques sont toujours plus nombreux. Mais les Brésiliens ont un avantage: ils dépensent plus que les Canucks ou les Brits.

Les Brésiliens ont déboursé en tout 1,6 milliard US dans la métropole américaine en 2010, contre 1,4 milliard US pour les Britanniques et 1,3 milliard pour les Canadiens, selon les autorités touristiques. Et l'écart s'accroît d'année en année.

Les Brésiliens aiment aussi visiter les états du Sud. Selon le New York Times, ils forment maintenant la deuxième clientèle touristique en importance de la Floride (après les Canadiens). Ils y ont dépensé environ 1 milliard US au premier semestre 2011, une hausse de 61% en un an.

On va aux États-Unis pour le plaisir, certes, mais aussi pour les bas prix. Avec le boom économique au Brésil, plusieurs produits de l'électronique ou vêtements griffés sont moins chers à Manhattan ou à Miami que dans les boutiques chic de Rio de Janeiro, soulignent des visiteurs sur le web.

Les Brésiliens ne sont pas les seuls à vivre leur rêve américain. Le nombre de visiteurs chinois aux États-Unis a quadruplé depuis 2003, franchissant la barre des 800 000 l'an passé.

Et il n'y a pas que les magasins qui en profitent. Depuis quelque temps, on note une nette augmentation des ventes de propriétés aux Brésiliens et aux Chinois, rapportent diverses sources américaines. Leurs villes préférées: encore Manhattan et Miami.

Des promoteurs, comme South Beach Hotel&Residence et Worldwide Developmement Services, soutiennent que les Brésiliens se ruent sur les «aubaines» dans l'immobilier floridien, toujours au tapis après la crise financière de 2008.

L'immobilier américain peut aussi compter sur une clientèle chinoise croissante. Selon un récent sondage (Bank of China and Huran Report), 60% des 960 000 Chinois fortunés (avec un avoir net d'au moins 1,6 million US) songent à émigrer. Les terres d'accueil visées: les États-Unis, au premier rang, suivis du Canada, de Singapour et de l'Europe.

Obama: vite, plus de visas!

Devant cette manne, Washington veut donc faciliter la venue des visiteurs nantis.

Le 19 janvier, le président Obama a demandé au département américain de la Sécurité de lui proposer un plan visant à accélérer l'attribution de visas. Et, pour le moment, seuls les demandeurs de Chine et du Brésil sont visés.

Washington veut accroître de 40% d'ici un an la capacité de traitement de ces demandes. Pas de temps à perdre avec ces riches clients qui frappent aux portes.

D'après le gouvernement, l'accroissement du tourisme créera 1,3 million d'emplois aux États-Unis d'ici à 2020, en plus d'injecter 850 milliards US dans l'économie.

Entre-temps, le gouvernement français va aussi accroître ses efforts en Chine. L'objectif: doubler le nombre de touristes chinois en France d'ici à 2015. D'autres pays européens ont des plans similaires.

En ces temps difficiles, l'Occident a donc déroulé le tapis rouge pour les nouveaux riches de la planète.

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EN CHIFFRES

NOMBRE DE BRÉSILIENS QUI ONT VISITÉ NEW YORK L'AN DERNIER, SOIT PLUS DU DOUBLE DU NOMBRE DE VISITEURS EN 2009.

SELON UN RÉCENT SONDAGE (BANK OF CHINA AND HURAN REPORT), ENVIRON 60% DES 960 000 CHINOIS FORTUNÉS (AVEC UN AVOIR NET D'AU MOINS 1,6 MILLION US) SONGENT À ÉMIGRER. LEUR TERRE D'ACCUEIL PRÉFÉRÉE: LES ÉTATS-UNIS.