La loyauté n'a plus la cote. Autrefois une vertu cardinale profondément enracinée dans les valeurs de la société québécoise, voilà qu'elle ne trouve plus grâce à nos yeux. Ouste! Dans toutes les sphères de la vie, on lui tourne le dos, tout juste bonne à être jetée aux orties.

Pourtant, la loyauté n'a pas été chérie si longtemps sans raison. Elle agissait comme un rempart réconfortant qui garantissait une certaine stabilité à la maison, au travail et dans les relations interpersonnelles en général.

De nos jours, la loyauté est malmenée dans notre environnement dominé par l'éphémère. En ces temps fous où le changement s'accélère et bouscule constamment nos habitudes, la loyauté est devenue un anachronisme, l'antithèse du progrès économique et technologique. Qualité précieuse dont nos pères et mères aimaient s'enorgueillir, la loyauté a perdu son aura. Sa valeur boursière n'est guère plus forte qu'une action de pacotille.

Prenons un exemple patent et tout chaud: les transfuges en cascade des députés à l'Assemblée nationale. On dirait que nos élus jouent à la chaise musicale tellement ils sont nombreux à avoir troqué leur allégeance politique ces derniers mois. Dans l'arène politique, les gestes d'infidélité sont devenus légion. On a l'impression qu'auparavant, pareilles hémorragies étaient monnaie rare, les députés se refrénaient davantage avant de trahir leur chef et leurs commettants.

Sur le marché du travail, même constat: la loyauté est démodée. Le modèle de l'employé embauché par une entreprise en quittant les bancs d'école et qui s'échine à son service pendant des décennies jusqu'à la retraite, est en voie d'extinction. Aujourd'hui, autant les employeurs renouvellent leur main-d'oeuvre - mondialisation oblige -, autant la jeune génération de travailleurs préfère butiner de job en job à la recherche de la sacro-sainte qualité de vie au boulot, quitte à sacrifier la permanence.

Le couple et la famille ne sont pas épargnés non plus par le déficit de loyauté. Au point où on félicite chaleureusement les couples qui parviennent à faire vie commune pendant 20 ans. Ce ne sont pas des noces de porcelaine pour rien, les unions sont si vulnérables de nos jours!

Même les athlètes professionnels n'échappent pas à la déferlante anti-loyauté, au grand dam des partisans qui ont du mal à s'identifier aux vedettes de leur équipe favorite. Et pour cause: le taux de roulement élevé des joueurs avoisine celui des commis dans les centres commerciaux.

La loyauté peut-elle survivre au rythme infernal que nous avons imprimé à nos existences parfois orphelines de balises durables? Son rejet est-il sans appel? Face à la superficialité croissante de nos engagements, il faut espérer que sa mise au rancart n'est qu'un phénomène cyclique. Vivement le retour du balancier.

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