À quelques minutes d'intervalle, le député provincial François Rebello et la députée fédérale Lise St-Denis ont annoncé hier matin qu'ils changeaient de parti. M. Rebello passe du PQ à la Coalition Avenir Québec de François Legault; Mme St-Denis quitte le NPD pour se joindre au Parti libéral du Canada. En changeant de camp ainsi, sans se soumettre à une élection complémentaire, les deux transfuges font preuve d'un déplorable mépris pour ceux qui les ont élus.

François Rebello défend sa décision en invoquant plusieurs motifs mais on comprend qu'essentiellement, il agit par admiration pour M. Legault. Alors que la CAQ domine dans les sondages et que le PQ est en crise, il est évident que l'opportunisme a aussi joué. Il n'est pas nécessairement mauvais d'être opportuniste en politique mais encore faut-il qu'on respecte la population. En 2008, les gens de la circonscription de La Prairie n'ont pas voté pour la CAQ, qui n'existait pas. Ils n'ont pas non plus choisi M. Rebello pour ses beaux yeux. D'abord et avant tout, ils ont élu un candidat du Parti québécois. M. Rebello leur impose maintenant d'être représentés à l'Assemblée nationale par un parti qui n'a jamais fait face à l'électorat.

Au moins, dans le cas Rebello, les électeurs pourront se prononcer dans un avenir proche puisque des élections générales auront lieu au cours des prochains mois. L'attitude de Mme St-Denis est plus condamnable.

Enseignante à la retraite, habitant Montréal, Lise St-Denis était inconnue dans St-Maurice-Champlain. Si elle est députée aujourd'hui, c'est uniquement grâce à la «vague orange» qui a balayé la province le 2 mai dernier. Huit mois plus tard, pour des raisons que la dame a eu bien du mal à expliquer, elle se sent plus proche du PLC que du NPD. Soit. Cependant, l'immense majorité des électeurs de St-Maurice-Champlain ne voulait rien savoir du Parti libéral: dans cet ancien fief de Jean Chrétien, les libéraux ont terminé au quatrième rang avec seulement 12% du vote. Voici que, à la suite de l'illumination de Mme St-Denis, le comté sera tout de même représenté par une libérale, et ce pour quelque trois ans. En refusant de soumettre sa décision au verdict des électeurs, la députée perd à la fois sa légitimité et sa crédibilité.

Il a souvent été question, dans nos parlements, d'adopter une loi forçant les vire-capots à démissionner pour être candidats sous leur nouvelle bannière. Un projet de loi en ce sens a d'ailleurs été présenté l'automne dernier par un député néo-démocrate. Malheureusement, libéraux et conservateurs s'y opposant, le projet de loi C-306 ne sera jamais adopté.

Paradoxalement, les libéraux ont annoncé leur prise quelques jours avant la tenue d'un congrès qui doit amorcer le renouveau démocratique du PLC. À voir hier la mine satisfaite de MM. Rae et Coderre aux côtés de leur recrue, on a pu constater que la volonté de changement s'évapore dès qu'une occasion se présente de marquer quelques points partisans.