Ce qu'elle est tenace, l'actuelle correction baissière!

Dans tout marché haussier, comme c'est présentement le cas avec le «bull market» enclenché en mars 2009, on traverse inévitablement des périodes de correction baissière. Et c'est normal et même très sain. La raison? Cela permet notamment de ramener les investisseurs sur terre, de calmer les plus euphoriques, de rabattre le prix des titres les plus convoités par les spéculateurs et de permettre aux investisseurs de réinvestir à prix raisonnable une partie de leurs liquidités.

Depuis le 9 mars 2009, Wall Street a traversé sept corrections baissières. Lors des six premières corrections, le S&P 500 de la Bourse de New York a enregistré une baisse moyenne de 7,9%. Et la durée moyenne des corrections s'échelonnait sur une trentaine de jours. Après chacune d'entre elles, Wall Street repartait solidement à la hausse pour aller se taper un nouveau haut dans le présent marché haussier.

Ainsi, entre le creux du 9 mars 2009 à 676 points et le dernier haut (1364 points) enregistré le 29 avril dernier, le S&P 500 avait eu le temps de doubler (+102%) de valeur, malgré les six périodes de corrections. Parenthèse : de tous les grands indices boursiers américains, c'est le S&P 500 (avec ses 500 grandes sociétés américaines) qui est le plus représentatif de Wall Street. En plus évidemment d'être l'indice boursier le plus influent de la planète boursière. Aussi populaire soit-il à la grandeur de la planète, le Dow Jones ne représente que 30 grandes sociétés américaines!

Revenons maintenant à l'actuelle correction. Comme le dernier haut du présent «bull market» a été atteint le 29 avril dernier, avec un S&P 500 à 1364 points, c'est donc dire que la présente correction perdure depuis déjà quatre mois, dont deux premiers mois de surplace ou presque et deux derniers mois de sévère débandade.

Entre le 21 juillet et le 9 août, le S&P 500 allait chuter de 18,3%, pour atteindre un creux de 1101 points, soit un maigre point au-dessus de son support technique. (Psychologiquement, selon les analystes techniques, lorsqu'un support est brisé, cela risque de déclencher un autre important mouvement à la baisse).

Depuis ce creux des 1101 points du 9 août, nous avons eu droit à quatre tentatives de redémarrage haussier. Chaque tentative s'est transformée en feu de paille. Et pas plus tard que la semaine dernière, Wall Street allait même re...tester son creux du 9 août en s'en approchant dangereusement.

Stimulé par l'espoir de voir les leaders de l'Europe mettre en place un plan de sauvetage pour sortir du trou ses pays éclopés par les dettes souveraines (Grèce, Italie, Portugal, Espagne...), Wall Street allait démarrer la semaine en forte hausse... Il n'en fallait pas plus pour redonner des ailes à toutes les grandes places boursières à travers le monde, y compris le Canada.

Mais pour la ième fois, Wall Street a vu son élan haussier se faire rabattre par les grands traders institutionnels qui ne cherchent en bout de ligne qu'à créer de la volatilité dans le dessein de tirer profits des rapides hausses et des baisses. Grâce aux ventes à découvert (vendre des actions que l'on ne détient pas dans le but de faire tomber le cours), aux produits dérivés (contrats à terme et options sur actions et indices, etc.) et autres outils sophistiqués...  les traders créent volontairement de la volatilité artificielle dans les marchés boursiers.

Cela a pour conséquence de semer beaucoup de confusion dans la façon d'interpréter le comportement à court terme de la Bourse. Inévitablement, on se retrouve souventes fois au centre d'un marché en folie.

En réaction à ma récente chronique «Un marché de fou», le conseiller financier Pascal Simard, de la firme de courtage ScotiaMcleod, tient à dénoncer ces grands traders de la vente à découvert qui «shortent «» le marché.  

«Les lois de l'offre et de la demande sont malheureusement faussées par le short selling fait par de grandes institutions ou par des traders transigeant d'importantes sommes. C'est bien loin du petit investisseur, qui malgré son impuissance, en subit toute les conséquences. Pourquoi permet-on de telles pratiques?»

«Comme vous le savez, la très grande proportion des short sellers, ce sont des spéculateurs, dit-il. Pourquoi laisse-t-on ces gens-là transiger sur les mêmes marchés que le retraité qui y investit son FERR ? Que les short sellers s'amusent sur le marchés des options ou des contrats à terme, les joueurs y sont des professionnels, ils connaissent les risques qui y sont associés.»

Lors de la déconfiture de 2008-2009, Pascal Simard rappelle que les bourses américaine, canadienne et européenne avaient interdit pendant un certain temps de «shorter» des actions et ce, afin de préserver la stabilité du marché.

À son avis, cette pratique d'interdire les ventes à découvert devrait être permanente et viser toutes les bourses. Et précise-t-il, elle devrait toucher toutes les actions ordinaires et privilégiées qui se négocient à la cote de la Bourse de Toronto.  

De plus en plus de conseillers financiers et de gestionnaires de portefeuille souhaitent, à l'instar de M. Simard, que les autorités des marchés boursiers (comme la SEC aux États-Unis, l'AMF et la CVMO au Canada) interdisent une fois pour toutes la vente à découvert sur les places boursières traditionnelles.

Malheureusement, les autorités des marchés font la sourde oreille devant le gros bon sens d'une telle demande. Leur argument? Oui! le «short selling» crée de la volatilité artificielle, mais l'interdire brimerait le libre jeu de l'offre et de la demande.

Très brillant comme raisonnement, surtout quand on sait que tout le monde est perdant, sauf les grands traders de la spéculation.