La fermeture soudaine de deux voies du pont Mercier a mis en évidence la fragilité du réseau routier de la région métropolitaine de Montréal. Elle a aussi provoqué la colère des usagers du réseau qui en ont marre d'être les otages d'un système mal conçu, mal entretenu et mal coordonné. Par cet éditorial conjoint, une première, La Presse et The Gazette se font les porte-parole de cette colère: les élus de la région, de quelque palier et de quelque formation qu'ils soient, doivent prendre le problème à bras-le-corps et trouver rapidement des solutions.

La fermeture soudaine de deux voies du pont Mercier a mis en évidence la fragilité du réseau routier de la région métropolitaine de Montréal. Elle a aussi provoqué la colère des usagers du réseau qui en ont marre d'être les otages d'un système mal conçu, mal entretenu et mal coordonné. Par cet éditorial conjoint, une première, La Presse et The Gazette se font les porte-parole de cette colère: les élus de la région, de quelque palier et de quelque formation qu'ils soient, doivent prendre le problème à bras-le-corps et trouver rapidement des solutions.

La congestion permanente de nombreuses artères chamboule la vie professionnelle et familiale des gens de la région. En perturbant le transport des travailleurs, des touristes et des marchandises, elle nuit à l'économie de Montréal et mine sa réputation. Bref, la situation est devenue intolérable.

La fermeture du pont Mercier ne doit pas nous amener à conclure que les gouvernements « ne font rien ». En réalité, après des décennies de négligence, Ottawa, Québec et Montréal se sont réveillés et ont enfin entrepris de remettre à niveau les infrastructures routières de la métropole. C'est pour cette raison qu'il y a des chantiers partout. La solution ne se trouve donc pas tant dans des investissements supplémentaires que dans une accélération et une meilleure organisation des travaux.

Pour corriger la situation, il faut oeuvrer sur trois axes: la consultation, la coordination et la communication. Les autorités impliquées ont beau dire qu'elles consultent la population et qu'elles coordonnent leurs actions, la réalité sur le terrain dément leurs prétentions. Les gouvernements doivent mettre un terme à ce fouillis pour faire en sorte que la région non seulement traverse bien ces années de travaux, mais en ressorte dotée d'un réseau de transports moderne, efficace et bien entretenu.

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Le ministère des Transports du Québec (MTQ) doit sans tarder mettre sur pied un groupe de travail sur la modernisation des infrastructures dans la région de Montréal. Ce «task force» sera composé d'un nombre limité de représentants des principaux intervenants, d'experts externes et de porte-parole des usagers; il sera présidé par une personne dont l'indépendance et la compétence sont incontestables.

Le groupe de travail devra concevoir, d'ici la fin de l'année, un calendrier des travaux nécessaires à court, moyen et long termes pour la restauration et la modernisation de nos infrastructures. Ce calendrier devra à la fois établir un ordre de priorités et minimiser l'impact des travaux sur les usagers.

Les membres du groupe de travail devront aussi proposer des mesures plus efficaces d'information des usagers. Il faut s'assurer que les automobilistes sachent quand et où il y a des travaux et soient au courant des alternatives à leur route habituelle. La multiplication désordonnée des cônes et des affiches «détour» ne fait qu'aggraver le problème et accroître la frustration des usagers.

Les principales infrastructures routières de la région font l'objet d'un suivi technique constant. Malheureusement, les rapports de ces expertises ne sont jamais publiés, sauf à la suite de fuites. Les autorités allèguent que les documents en question contiennent des informations confidentielles. Pourtant, il tombe sous le sens que la population a le droit de savoir dans quel état sont les ponts, échangeurs et viaducs qu'elle emprunte chaque jour. Le groupe de travail devra proposer aux autorités concernées une façon de publier régulièrement, sinon les rapports eux-mêmes, à tout le moins des sommaires.

Les gouvernements doivent investir plus et mieux dans les transports collectifs. Le réseau de transports en commun de la région est désuet et encore mal intégré. Il faut notamment exploiter beaucoup plus intensivement le réseau ferroviaire. À l'heure actuelle, l'Agence métropolitaine de transport ne peut utiliser son matériel roulant à son plein potentiel parce que le CN et le CP donnent priorité au transport des marchandises. Le gouvernement du Canada doit convaincre ces deux sociétés de tenir davantage compte des besoins des grandes villes du pays dans l'organisation de leurs activités. Si elles se montrent récalcitrantes, il devra les forcer à le faire au moyen d'amendements à la Loi sur les transports.

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Le gouvernement du Canada doit immédiatement lancer le projet de construction d'un nouveau pont Champlain. Comme il s'agit d'un projet coûteux et complexe, la construction doit être précédée d'une planification minutieuse, de façon à ce que la nouvelle infrastructure soit porteuse d'une amélioration sensible de l'efficacité du réseau de transport métropolitain. Cela exigera du temps; c'est pourquoi il faut commencer sans tarder.

La construction du nouveau pont Champlain fournira une occasion de mettre en place un système de péage intelligent. En modulant le tarif selon l'heure de la journée et selon le type de véhicule, le gestionnaire de l'ouvrage sera en mesure d'assurer une meilleure fluidité de la circulation. Les sommes recueillies devront être entièrement consacrées à l'entretien du pont.

Plusieurs projets ambitieux ont été discutés et étudiés au cours des dernières années: prolongement du métro, tramway, train léger et rapide dans l'axe du pont Champlain. Ces projets sont certes intéressants, mais leur impact ne se fera pas sentir à court terme. Les responsables des transports collectifs devraient développer en priorité des lignes SRB (système rapide par bus), un mode de transport très efficace et beaucoup moins coûteux que les modes plus lourds.

Enfin, le gouvernement du Québec doit confier au Vérificateur général du Québec le mandat de faire rapport, à chaque année, sur l'usage des sommes consacrées aux infrastructures de transports dans la province. Le Vérificateur général devra se doter d'outils lui permettant d'évaluer la qualité des travaux réalisés.

Les équipes éditoriales de La Presse et de The Gazette accorderont à ce dossier une importance particulière au cours des prochains mois. Nous attendons des différents paliers de gouvernement qu'ils cessent de s'accuser les uns les autres et qu'ils travaillent, ensemble, à trouver des solutions.