Les sceptiques qui ne croyaient pas à la rentabilité gouvernementale de la subvention versée à Bernie Ecclestone pour ramener le Grand Prix du Canada seront confondus. Non pas à la manière du célèbre Capitaine Bonhomme, mais plutôt par les retombées en argent sonnant générées par le nouveau promoteur de l'événement, François Dumontier.

Je vous rappelle que la subvention totale au grand manitou de la Formule 1 s'élève à 15 millions de dollars par année, répartis comme suit: 5 millions du fédéral, 4 millions de Québec, 1 million de la Ville de Montréal et 5 millions de Tourisme Montréal.

À combien estime-t-on les recettes gouvernementales du grand retour à Montréal de la course de F1, l'an passé? Est-ce que les prévisions de 18 millions de dollars avancées par le ministre des Finances, Raymond Bachand, s'avèrent réalistes? À la lumière des données que nous avons récoltées, la réponse serait positive.

En entrevue, le promoteur Dumontier révèle que le Grand Prix 2010 a attiré, pour la neuvième fois de suite, au-delà de 100 000 amateurs lors de la course du dimanche. Pour les trois jours du week-end de course, l'assistance a une fois de plus franchi la barre des 300 000 spectateurs. Notez que le même amateur sera compté à trois reprises comme spectateur... s'il assiste aux trois jours du programme.

Au moins 40% des amateurs du Grand Prix viennent de l'extérieur du Québec, dont 18% des États-Unis et de l'Amérique latine, 18% de l'Europe et de l'Asie, et 4% majoritairement de l'Ontario. «C'est la partie nouvel argent qui entre au Québec, précise Dumontier. Encore cette année, on est le seul Grand Prix en Amérique du Nord. C'est un atout indéniable. Et le projet d'un éventuel Grand Prix américain au Texas ne nous inquiète pas pour autant. Notre clientèle américaine nous restera fidèle, j'en suis persuadé.»

Chez Tourisme Montréal, le vice-président, Pierre Bellerose, précise à propos du Grand Prix: «En matière d'impact touristique, ç'a été très, très bon l'an passé. Probablement meilleur que les précédentes présentations du Grand Prix.»

M. Bellerose affirme que le taux d'occupation des chambres d'hôtel dans le Grand Montréal a atteint les 100% durant les quatre jours du week-end de l'événement. On parle ici d'un total de 30 000 chambres, dont 26 000 chambres dans l'île de Montréal et les 4000 autres à Laval et dans la banlieue sud immédiate de la métropole.

«Le Grand Prix, insiste M. Bellerose, c'est l'événement touristique le plus important du Canada. À tous points de vue. Dépenses touristiques, mais aussi rayonnement médiatique en quatre jours.»

Avec un tel atout touristique, on comprend pourquoi les promoteurs de Tourisme Montréal ont accepté de contribuer financièrement à l'entente conclue entre les gouvernements et Bernie Ecclestone pour ramener le Grand Prix à Montréal.

En matière de recettes fiscales (impôts, taxes de vente, etc.), on anticipait, à partir de savants modèles mathématiques, des revenus annuels de 10,2 millions pour Québec et de 7,8 millions pour Ottawa. Ces recettes fiscales sont basées sur des retombées économiques évaluées à quelque 90 millions pour le Grand Prix. Compte tenu de la réelle assistance du Grand Prix 2010, Québec et Ottawa ont de toute évidence récolté plus d'argent que les 9 millions de leurs subventions.

Et ces recettes fiscales ne tiennent même pas compte de la ristourne consentie par Bernie Ecclestone sur les revenus de la billetterie. On parle ici d'une ristourne de 4,7 millions de dollars, répartie au prorata de la contribution des quatre partenaires à la subvention. Selon Nathalie Lessard, porte-parole de la Société du parc Jean-Drapeau, Québec a reçu 1,25 million de dollars, Ottawa 1,56 million, Montréal, 313 000$, et Tourisme Montréal, 1,56 million.

«Dans l'entente conclue avec Ecclestone, explique M. Dumontier, il redonne à ses partenaires 30% des revenus de la vente des billets de gradin. Dans ce dossier-là, je ne suis que la courroie de transmission de ces revenus de billetterie parce que c'est moi qui les collecte. J'ai donc versé la somme en question à la Société du parc Jean-Drapeau, qui agit à titre de mandataire des gouvernements et de la Ville dans le dossier du Grand Prix.»

«Je ne touche pas un sou des 15 millions de dollars versés à Ecclestone, ajoute Dumontier. Moi, j'ai une entente, un contrat de promotion avec Bernie. J'ai aussi un contrat pour la location du circuit Gilles-Villeneuve, avec la Société du parc Jean-Drapeau. J'ai moi-même à payer un frais à Bernie pour avoir les droits de promotion de l'événement. Les autres revenus générés par l'événement, que ce soit les commandites (Mercedes, Labatt, Mattel, etc.), les loges d'affaires, c'est moi qui garde cela.»

Au bout du compte, est-ce que le Grand Prix s'est avéré payant pour son nouveau promoteur? Parole de Dumontier: «On n'est pas encore là. Disons qu'on a bien tiré notre épingle du jeu. Je ne veux pas dire qu'on s'en est sortis richement. Mais ça s'est bien passé. Je suis content, très, très satisfait.»

Chose certaine, les affaires de son entreprise, Groupe Octane, prospèrent. En plus du Grand Prix de F1, Dumontier organise également cette année une course NASCAR sur le circuit Gilles-Villeneuve et, pour la première fois à compter de cet été, une course IndyCar à Edmonton.