La dureté du mental. Si c'est vrai pour Les Boys, imaginez à quel point c'est important dans un combat de championnat du monde à la boxe.

Et je n'aime pas du tout ce qui se passe depuis quelques semaines entre Jean Pascal et Bernard Hopkins.

Ce n'est pas de la lutte. Les échanges verbaux et les poussaillages entre les deux hommes ne sont pas arrangés avec le gars des vues. Et de ce que je comprends, c'est Bernard Hopkins qui contrôle la guerre psychologique entre le champion et lui.

J'étais à Miami avec Pascal avant son combat contre Hopkins à Québec. J'ai passé des heures avec lui, son psychologue et Marc Ramsay, son entraîneur. Tout le monde dans l'entourage du champion était conscient de l'habileté et de l'expérience de Hopkins à entrer dans la tête d'un adversaire. Même Pascal était conscient de cette possibilité. Il était conscient, mais ça n'a pas empêché Hopkins de réussir son projet. Tellement que dans le ring à Québec, Hopkins a fini par imposer son rythme et son style au combat. Et que Pascal a sauvé son championnat du monde par la peau des fesses.

Cette fois, Hopkins a monté son jeu d'un cran. Et j'ai très peur que Pascal ne soit déjà tombé dans le piège en ripostant comme il l'a fait aux menaces de Hopkins.

Pourquoi pensez-vous que Hopkins a laissé planer la menace de poursuites en diffamation contre Pascal? Pour faire quelques dollars? Allons donc, soyons sérieux. C'est pour lui entrer dans la tête. Pour l'inquiéter. Pour accaparer ses pensées et le stresser. Et Pascal a effectivement consacré deux jours à préparer sa réponse et, ce faisant, il s'est encore mis plus de pression sur les épaules.

Qu'on se comprenne bien. Un combat se gagne avec des coups de poing dans un ring. Mais pour se battre au meilleur de sa condition, un boxeur a besoin de concentration et de courage. Et le courage permet de mieux respirer, d'imposer son contrôle dans un ring. Quand on respecte trop un adversaire, et c'était le cas de Pascal avant son premier affrontement avec Hopkins, on n'ose lui imposer son propre programme. Les deux hommes ont presque 20 ans de différence et un homme aussi conscient de l'histoire de la boxe que l'est Pascal ne pouvait pas rester indifférent à l'aura d'une légende comme Hopkins.

Cette fois, Hopkins savait qu'il ne pouvait compter sur un excès de respect et d'admiration de Pascal. Le champion est passé trop proche de la défaite, c'était certain qu'il réagirait. Hopkins le savait et il est passé à un mode d'attaque. L'objectif est clair: déstabiliser le champion.

Yvon Michel, l'homme de GYM, n'était pas inquiet quand je lui ai parlé hier. La réaction de Pascal, selon lui, montre que le Québécois s'est débarrassé de ce trop grand respect, qu'il est passé à autre chose: «Au contraire, je pense que Jean montre une saine agressivité dans son comportement», de dire Michel.

Ça se peut. Je sais que Rob Schinke, son psychologue sportif, a passé des heures avec Pascal pour le rassurer et le convaincre de regarder Hopkins avec un autre oeil. Comme je suis convaincu que Ramsay a passé des heures à étudier le DVD du premier combat contre Hopkins. Et si Ramsay est honnête et aussi intelligent que je le crois, il a dû noter que lui-même avait connu une soirée difficile. Il n'avait pas trouvé les mots pour relancer son boxeur dans une nouvelle stratégie.

Par ailleurs, Pascal a dû être le plus surpris de tout le monde au Colisée quand Hopkins est tombé au premier round. De là à croire pendant quelques éternelles minutes que le combat serait court et facile, il n'y a qu'un tout petit pas. Et j'ai peur qu'inconsciemment, Pascal ait fait ce petit pas.

Pascal est un homme intelligent. C'est un homme sensible et très allumé. Il reste encore une huitaine de jours avec le combat contre Hopkins. Je ne suis pas inquiet de sa préparation physique, je sais qu'il travaille avec sérieux. Peut-être pas avec le même acharnement surhumain que Lucian Bute, mais Pascal s'entraîne avec sérieux.

Pour ce qui va se passer entre ses deux oreilles d'ici 11h le samedi 21, ceux qui l'entourent vont jouer un rôle important.

Photo: AFP

Bernard Hopkins a monté son jeu d'un cran dans la guerre psychologique contre Jean Pascal.