«Trois knock-out! Trois fois!» m'a lancé Lucian Bute en montrant trois doigts de sa main dégantée.

Trois fois, il a fallu que le champion mondial gèle trois fois son vaillant adversaire, Jesse Brinkley, avant que l'étrange arbitre de Detroit ne cesse d'étirer le combat.

Bute avait gagné une première fois avec un très dur coup de la gauche au foie de Brinkley. L'arbitre a étiré le compte, sans doute pour faire plaisir à la télévision américaine qui devait avoir des messages publicitaires à passer, puis a permis au boxeur de reprendre son souffle en l'envoyant dans le coin pour arranger le ruban gommé de son gant.

Bute a gelé une autre fois Brinkley, tellement que le type de Detroit a demandé au docteur Meunier de venir l'examiner.

Ce n'était pas assez. Il a fallu que Bute assomme littéralement le pauvre Brinkley avant que l'arbitre ne se résigne à mettre fin au combat. Il lui aurait fallu donner une demi-heure à Brinkley pour qu'il s'en remette.

On est habitués à ce que les Américains envoient des jambons à Montréal. C'était la première fois que le jambon était un arbitre!

Diaconu: combat pour hommes

Juste avant la finale, Adrian Diaconu a livré un combat spectaculaire et violent contre Omar Sheika. Il y a des faits saillants à souligner.

Tout d'abord, Diaconu, pour la première fois en trois ans, se battait sans blessure. Et cette fois, il s'était entraîné avec discipline et détermination.

Le moment clé du match est survenu au deuxième round. Sheika l'a pincé d'aplomb et l'a ébranlé. Diaconu a sagement décidé de mettre le genou à terre et de subir le compte de huit de l'arbitre. Il a perdu le round mais il a gagné les secondes qui lui ont permis de récupérer.

La suite a été une terrifiante leçon de boxe donnée par Diaconu.

Loin des talibans... proche de Bute

Il s'appelle Guy Mayette. Sergent de la 430, l'escadron tactique d'hélicoptères. Il est mécanicien et est basé près de la base de Kandahar en Afghanistan.

Le 7 octobre, le sergent Mayette a fait prendre une photo devant un Griffon 412 avec des mots d'encouragement pour Lucian Bute: «C'était pour encourager Lucian. Je suis un grand fan de boxe et Lucian Bute est mon favori. De plus, il y a plusieurs gars en Afghanistan qui sont de grands fans de Bute. C'était un peu en leur nom qu'on a pris cette photo», me racontait le sergent hier soir avant le combat de son idole.

Il vivait un rêve. Arrivé au Québec le 9 octobre pour un séjour de 14 jours avant de repartir pour neuf mois à Kandahar, il est entré en contact avec Jacques Sylvestre d'InterBox, il a raconté comment il pouvait aimer Bute et finalement, il s'est retrouvé avec des billets à une table de riches avec son fils Vincent, un beau gars de 15 ans. Le sergent Mayette était aux anges, à huit millions de kilomètres des talibans. Dans l'antre des talifans.

«Je n'ai pas encore rencontré Lucian mais j'espère pouvoir le faire après le combat. Pour l'instant, je pense à mon collègue, le caporal-chef Jean-Claude Beaupré, un maniaque de boxe et de Bute, qui est resté en Afghanistan et qui donnerait cher pour être avec moi», de dire le sergent.

Là-bas, les fans de boxe suivent l'actualité via les sites de RDS et de Cyberpresse. Malheureusement, les serveurs locaux ne fournissent pas une très grande vitesse et nos soldats peinent à faire jouer les vidéos des meilleurs moments des victoires de leurs favoris. Mais le caporal-chef n'aura pas tout perdu dans cette soirée: «Je viens de lui acheter un chandail de Lucian. Il va triper quand je vais le lui donner», dit-il.

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Martin Desjardins a perdu son combat contre le Chicoutimien Francy N'Tetu. Comme d'habitude, il s'est battu avec coeur et acharnement. Il a même envoyé N'Tetu sur le derrière à la fin du premier round.

Quand je l'ai croisé dans son vestiaire, il marchait de long en large pour se calmer. Il avait perdu par décision majoritaire des juges et comme d'habitude, il se disait qu'il avait passé tellement proche.

Mais tout n'est pas de sa faute. Après avoir sonné N'Tetu, il a entrepris le deuxième round avec beaucoup trop de prudence. Il me semble que c'était le temps d'aller à la chasse. Au moins pendant une trentaine de secondes.

Mais Desjardins a fait son travail. Ce pour quoi il est payé. Permettre à un plus jeune de se faire les dents. Cette fois, il a donné une leçon supplémentaire. N'Tetu s'est retrouvé sur les fesses. C'est même arrivé à Muhammad Ali contre Joe Frazier.