Ma chronique «Les frais exorbitants de Bell» a soulevé un mouvement de colère parmi les lecteurs. Nombre d'entre eux craignent d'ailleurs que les concurrents de Bell emboîtent le pas en augmentant, eux aussi, leur taux d'intérêt des frais de retard à 42,58% par année.

C'est également la crainte d'Option consommateurs.

En exigeant un tel taux exorbitant, Bell Canada crée un précédent en matière de frais de recouvrement dans le secteur des télécommunications, explique la porte-parole Caroline Arel, avocate responsable des services budgétaires au sein de l'organisme de défense des consommateurs.

Mme Arel doute d'ailleurs que Bell Canada ait du succès avec son taux de 42%. «Ce n'est pas, dit-elle, en augmentant ainsi les frais de recouvrement que ça va aider les clients en difficulté financière à payer leurs factures de Bell.»

En cette période historique de faible taux d'intérêt, il est aberrant de constater que le taux de Bell équivaut à 42 fois le taux directeur de la Banque du Canada, à 14 fois le taux préférentiel ou à plus de deux fois le taux des cartes de crédit.

C'est en mai dernier que Bell a haussé à 42,58% le taux annuel (3,0% par mois annualisé) qu'elle exige sur les soldes impayés de ses clients qui ne paient pas la totalité de leur facture mensuelle avant l'échéance.

Auparavant, Bell imposait un taux de 26,82% (2% par mois annualisé), tout comme Telus et Rogers. Ce qui était déjà supérieur à Cogeco Câble (24%) et Vidéotron (19,86%).

Pourquoi un taux si élevé de 42,58%? Pour refléter, explique Bell, l'augmentation des coûts de collection auprès des retardataires.

Cela dit, les frais exorbitants qu'exige maintenant Bell Canada démontrent à quel point les consommateurs sont mal protégés en matière de taux d'intérêt que les entreprises peuvent exiger à leurs clients, à titre de frais d'administration, de frais de retard frais d'intérêt.

En fait, la seule limite qui refroidit la gourmandise des entreprises c'est le Code criminel et son taux usuraire de 60%.

Par contre, sous cette barrière de 60%, c'est le libre marché qui dicte les taux en vigueur.

Pour preuve, le fait que le CRTC (Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes) a décidé de déréglementer le taux d'intérêt des frais d'administration ou de retard, Bell Canada a sauté sur l'occasion pour les augmenter de façon vertigineuse.

Demain matin, une entreprise pourrait nous imposer des frais d'administration annuels de 59,99% et l'Office de protection des consommateurs ne pourrait rien faire pour l'en empêcher.

Si l'entreprise exploiteuse indique sur sa facture le taux annuel (59,99%) qu'elle nous facturera sur le solde impayé après la date d'échéance, elle jouit d'une pleine liberté.

Les consommateurs victimes de ces taux astronomiques se retrouvent Gros-Jean comme devant. Aucun organisme de protection des consommateurs, ni ministères ou services gouvernementaux, tant au provincial qu'au fédéral, ne peut rabaisser la voracité des entreprises qui imposent des frais d'administration nettement au-dessus des taux d'intérêt des plus gourmandes cartes de crédit.

Question: qu'attendent les politiciens fédéraux comme provinciaux pour réclamer une révision à la baisse du taux usuraire du Code criminel?

Ce taux de 60% devrait être réduit au moins de moitié, soit à 30%. Et encore là, je trouve qu'exiger un taux d'intérêt de 30% à des gens qui éprouvent des difficultés financières est abominablement élevé.

Ce n'est pas en étouffant les gens endettés qu'on va les aider à se sortir de la dèche. Ça va tout simplement les pousser vers la faillite.