Monsieur Albert, 90 ans, souffre de la maladie d'Alzheimer depuis plusieurs années. Et conséquemment, il est placé dans une institution spécialisée pour personnes non autonomes. Sa femme, Gabrielle, 86 ans, réside pour sa part dans un foyer de personnes âgées.

Ils vivent pauvrement, avec un revenu de 15 500$ pour monsieur et un de 16 400$ pour sa conjointe. Avec un si faible revenu, ils ont évidemment droit au crédit d'impôt pour la TPS.

Madame Gabrielle est atterrée. Quelle ne fut pas sa surprise de recevoir en mai dernier de l'Agence du revenu du Canada (ARC) deux avis de cotisation dans lesquels le fisc fédéral réclame à son mari un remboursement immédiat de 570$ de crédits pour la TPS qui auraient été versés en trop en 2007 et 2008.

Quelle est la raison évoquée par Revenu Canada pour réclamer à monsieur le remboursement de 570$ de crédits de TPS? Selon le fisc fédéral, monsieur Albert ne résidait pas au Canada en 2007 et 2008! Donc, comme il n'était pas résidant du Canada, il n'avait pas le droit aux versements trimestriels dudit crédit pour la TPS.

Et dans les avis de cotisation, Revenu Canada ajoute: «Nous ne pouvons pas déterminer si vous (monsieur Albert) avez encore droit aux versements du CTPS/TVH car nous n'avons pas tous les renseignements nécessaires. Si vous nous envoyez les renseignements suivants, nous les traiterons et vous informerons si vous y avez droit: votre revenu de toutes provenances, avec montant converti en dollars canadiens, pour la période de 2007 (et la période de 2008) avant votre entrée au Canada.»

Avec de tels avis de cotisation insinuant que monsieur Albert (90 ans et souffrant d'alzheimer) ne résidait pas au Canada en 2007 et 2008, il y a de quoi s'interroger sérieusement sur les sources de renseignements de Revenu Canada.

La confusion

À vrai dire, c'est Revenu Canada qui souffre de confusion avancée dans le dossier de monsieur Albert. En 2007 et 2008, monsieur Albert avait peut-être la tête ailleurs, mais il était physiquement bel et bien ici, dans une institution spécialisée, non pas dans le Sud, mais sur la Rive-Sud. Non seulement monsieur Albert n'est jamais sorti du pays, il n'est même sorti de sa chambre où il est hébergé et alité en permanence.

C'est tellement vrai qu'année après année, la personne qui produit les déclarations d'impôt de monsieur Albert envoie au fisc l'attestation de déficience physique permanente signée par son médecin traitant.

On parle ici d'une personne hautement qualifiée: Yves F. est un actuaire à la retraite. Depuis plusieurs années, il prépare bénévolement les déclarations fiscales du couple Albert, des amis de ses défunts parents.

Quand la femme de monsieur Albert a reçu les avis de cotisation de Revenu Canada, elle a immédiatement communiqué avec Yves F.

Subito presto, il a communiqué avec le Ministère pour lui signaler que cette réclamation était carrément erronée, puisque monsieur Albert était hébergé ces dernières années sur la Rive-Sud, dans une institution spécialisée.

Yves F. s'est retrouvé dans un véritable labyrinthe, duquel il n'est d'ailleurs pas encore sorti après plus de deux mois.

En tant que son représentant autorisé aux fins de l'impôt, Yves F. a envoyé une lettre aux gens de l'ARC pour expliquer la situation de monsieur Albert, tout en leur demandant de consulter le formulaire d'attestation de déficience physique prouvant hors de tout doute la déficience de monsieur Albert.

«Six semaines plus tard, je téléphone à l'ARC, section TPS, pour me faire dire que la situation serait corrigée. Quatre appels plus tard et après avoir parlé à quatre personnes différentes, la situation n'est toujours pas réglée... Sauf qu'on m'annonce tout bonnement que je dois maintenant appeler la section impôt pour faire corriger la situation.»

«Cette semaine, ajoute Yves F., j'appelle la section impôt pour me faire dire que c'est vrai, que les pitonneux de données ont fait erreur, mais qu'ils ne peuvent rien changer à la situation tant qu'ils n'auront pas reçu un nouveau formulaire T-1013 attestant que je possède le niveau 2 d'autorisation qui me donne le pouvoir de demander un changement à la déclaration d'impôt de M. Albert.»

Conséquence? Yves F. croit qu'il faudra une autre période d'attente de six semaines avant que la demande de correction de l'erreur de Revenu Canada soit finalement traitée correctement.

Morale de cette histoire: quand l'ARC est dans les patates, comptez sur le fonctionnarisme pour vous faire sortir de vos gonds.