Le Café Brasil est un sympathique et tout petit bistro de quartier qui attire une clientèle d'habitués autour de la très gentille dame derrière le comptoir. Mais hier, jour de grand match Brésil-Côte d'Ivoire, la petite salle était pleine à craquer et il fallait être un peu brésilien pour supporter la chaleur qui devait frôler les 40 degrés.

Du bien beau monde, tout en vert et jaune, qui parle français et qui invite des amis québécois.

Le couple qui mangeait à côté de moi au comptoir versait doucement une sauce très foncée sur du riz, de la farine de manioc sur la laitue, le tout accompagné de tranches d'orange.

«Ce sont des haricots noirs, des feijoada, en sauce», m'explique la dame.

C'est bon?

«C'est très bon.»

J'ai grignoté des petits pains au fromage, qui sortaient du four, une spécialité maison. Avec du Guarana Antartica, qui semble être le 7 Up brésilien.

Et puis le match, très attendu, a commencé. Les Ivoiriens avaient de grands espoirs, mais les Brésiliens ont vite pris une avance d'un but. En fait, les Brésiliens faisaient pas mal ce qu'ils voulaient.

À la demie, des musiciens sont sortis sur le très étroit trottoir et ont chanté pour les passants. Eduardo, un client dans la trentaine, a mis sa main au-dessus de ses yeux, comme un Iroquois, et il demandait: «Où sont les grands joueurs européens? Je n'en vois pas? Avez-vous vu le but des Brésiliens? De la classe.»

Le jeu a repris et c'était vite 3-0 Brésil.

Tu es content, Eduardo?

«La Côte d'Ivoire a une bonne équipe, mais les Brésiliens sont un peu plus forts. Surtout dans la finition. N'importe quelle équipe peut amener le ballon dans la zone adverse, mais il faut le mettre dans le but aussi. Là-dessus, les Brésiliens sont très habiles.»

Et qu'est-ce qui va se passer maintenant?

«À mon avis, l'Argentine a la meilleure équipe de cette Coupe du monde. Mais les Brésiliens vont évoluer en cours de tournoi. Ils sont jeunes, ils ne se connaissent pas beaucoup. Je vois une finale Brésil-Argentine. (Le sélectionneur) Dunga n'a pas choisi les grandes vedettes, il a choisi des joueurs qui jouent en équipe...»

D'où l'absence de Ronaldhino. J'ai l'impression que le sélectionneur français, Raymond Domenech, regrette de ne pas avoir suivi l'exemple de Dunga...

Et puis des sifflets, comme ceux des arbitres de hockey, ont commencé à nous percer les tympans. En plus de vuvuzelas, c'était l'enfer, avec la température de l'enfer en plus. Je suis sorti avant de perdre connaissance.

Et puis juste à côté, il y avait la vente trottoir du boulevard Saint-Laurent, un événement très intéressant, coloré et multiethnique. Un Montréalais doit y faire un pèlerinage au cours de sa vie pour pourvoir se dire un vrai.

Notes du spectateur non engagé

Jamel Debbouze, l'humoriste et comédien français, à propos de Raymond Domenech: «Ses sourcils l'empêchent de voir...» Domenech a effectivement de gros sourcils.

La télé française nous a fait voir au ralenti une séquence de jeu où Nicolas Anelka aurait dû passer le ballon à Yoann Gourcuff tout seul devant le but. Il a préféré le garder parce qu'il n'aime pas Gourcuff qui lui fait de l'ombre. Le jeune homme n'était d'ailleurs pas de la formation partante le match suivant. Puis Anelka a insulté l'entraîneur, il a été renvoyé en France et provoqué une grève à l'intérieur de l'équipe. Pas fort, les cousins, pas fort...

Hier, les All Whites de la Nouvelle-Zélande, grands négligés de ce tournoi, ne croyaient jamais pouvoir annuler avec les Italiens champions du monde. Nous non plus. Il s'agissait du plus grand jour de l'histoire du soccer néo-zélandais. Au début du tournoi, un reporter a demandé à un joueur des All Whites s'ils allaient faire un haka avant le match. Le haka est une danse traditionnelle, guerrière et aborigène que font les All Blacks, la légendaire équipe de rugby du même pays. La réponse: «Je ne crois pas qu'une dizaine de petits Blancs tout maigres pourraient intimider qui que ce soit.» (Si vous ne connaissez pas le haka, googlez-le, ça vaut la peine.)

En Coupe du monde de foot, les ballons ont un nom. Celui d'Afrique du Sud s'appelle le Jabulani, qui signifie «Réjouissez-vous» en langue zulu. Imaginez si la LNH donnait un nom à la rondelle à chaque finale de la Coupe Stanley. L'entraîneur de l'Angleterre, Fabio Capello, a déclaré que c'était le pire ballon de tous les temps.

Sachez aussi qu'en Angleterre, certains grands managers ont leur statue dans la ville de leurs exploits. Imaginez une statue de Scotty Bowman au centre-ville de Montréal...

Photo: François Roy, La Presse

Au Café Brasil, les supporteurs du Brésil ont eu chaud hier. Pas par peur de voir perdre leur équipe, mais plutôt parce que l'air y était tropical.