Le sport porte souvent un message. Ce sera le cas en Afrique du Sud où s'ouvre, aujourd'hui, la Coupe du monde de soccer. À cette occasion, la nation se sent en effet investie d'une mission panafricaine... tout en se plongeant sur un mode festif, depuis plusieurs jours déjà, dans le vacarme euphorisant des vuvuzelas - les assourdissantes cornes des fans, capables de cracher 125 décibels!

Le sport porte souvent un message. Ce sera le cas en Afrique du Sud où s'ouvre, aujourd'hui, la Coupe du monde de soccer. À cette occasion, la nation se sent en effet investie d'une mission panafricaine... tout en se plongeant sur un mode festif, depuis plusieurs jours déjà, dans le vacarme euphorisant des vuvuzelas - les assourdissantes cornes des fans, capables de cracher 125 décibels!

En un sens, cette affaire de message peut rappeler le coming out historique que la Chine a fait lors des Jeux olympiques de 2008. Et ce, en particulier par le biais de l'époustouflante cérémonie d'ouverture, chargée d'une symbolique culturelle millénaire en même temps que vitrine d'une modernité conquise et assumée.

Or, le message de la première Coupe du monde tenue en Afrique sera à la fois comparable et différent. Le continent noir n'a jamais été fermé comme la Chine, en effet, et n'a pas à «s'ouvrir». Mais il n'a pas été aussi prompt à maîtriser les outils de la modernité, notamment économiques.

C'est ce qu'il fallait redresser et faire savoir que l'on redresse.

«Nous avons construit les infrastructures. Nous l'avons fait dans les temps. Nous avons construit des aéroports de première classe. Maintenant, nous montrerons au monde que l'Afrique peut présenter the greatest show on earth (expression consacrée!)», dit au Time François Pienaar, dieu sud-africain du sport qui était capitaine de l'équipe nationale de rugby lorsqu'elle remporta le championnat de la Coupe du monde, il y a 15 ans. Ce championnat de rugby, tenu quatre ans après la fin officielle de l'apartheid, fut lui aussi un événement politique de première grandeur: un message de réconciliation télégraphié par Nelson Mandela qui, peut-être, épargna au pays un sanglant conflit racial.

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Le tournoi de rugby de 1995 voulait prévenir le pire. Le tournoi de soccer de 2010 est une aspiration au meilleur.

L'événement porte en effet tous les espoirs d'une population qui, nourrissant l'économie la plus forte de l'Afrique, a néanmoins encore à vaincre des relents de racisme ; des poches de grande pauvreté; une criminalité d'une violence presque légendaire (50 meurtres par jour), bien qu'en déclin.

En même temps que l'euphorie, donc, une certaine peur de l'échec est perceptible.

De fait, on se rend déjà compte qu'on n'accueillera pas les 500 000 visiteurs étrangers prévus, mais au mieux 400 000. Et on craint encore et toujours les débordements, d'autant plus que la course au profit rapide se révélera décevante pour plusieurs et que l'équipe nationale pourrait être assez tôt éliminée. Enfin, il y aura fatalement le spleen de l'«après», ce moment où on dresse les bilans, notamment comptables...

D'ici là, il ne reste qu'à croiser les doigts. Et à souhaiter que, dans les semaines à venir, émerge bel et bien la force et la beauté d'un continent.