Il était passé dix heures quand j'ai fini ma chronique et que j'ai pu enfin descendre dans le vestiaire du Canadien. Il ne restait que trois ou quatre joueurs dans la pièce. Et quelques rares journalistes.

Jaroslav Halak donnait une entrevue à un journaliste russe. Il lui expliquait qu'il ne parlait pas russe et que l'entrevue devrait se dérouler en anglais ou en slovaque. «Où en tchèque, on se comprend facilement», d'ajouter Halak à mon attention.

Le jeune homme était souriant, calme et visiblement heureux de ce qui lui arrive. Spacek lui a lancé une taquinerie amicale et avant de se rendre aux douches, Halak a pris le temps d'expliquer comment il avait été déjoué pour le deuxième but des Penguins: «Je ne comprends pas encore comment la rondelle est passée. Je pense que c'est entre ma poitrine et mon bras. Mais pourtant, j'ai bien senti la rondelle me frapper», de dire Halak sans dramatiser.

Puis, il est disparu dans la porte menant aux douches. Mais avant de disparaître, il s'est retourné, les yeux brillants: «En tous les cas, on va jouer un septième match à Pittsburgh, et je sais juste une chose. Personne ne croyait qu'on serait encore là à cette date. Absolument personne».

Ce jeune homme est bien dans sa peau, il est en forme, il adore ce qu'il fait. Si j'étais un Penguin, je serais inquiet.

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Un peu plus tôt, André Savard, l'ancien directeur général de Canadien, et Bernard Brisset, ancien vice-président des Nordiques, brassaient de vieux souvenirs. La conversation a dérapé sur Halak: «Jaroslav Halak, c'est un de mes derniers gestes comme directeur général du Canadien. C'est moi qui l'ai repêché en septième ronde (Savard croyait que c'était la neuvième). C'était un pari. Je ne l'avais pas vu jouer. Quand tu repêches au septième tour, c'est toujours un pari. Mais Halak n'a jamais cessé de travailler et de s'améliorer. Mettons que je parais bien sur ce pari», de dire Savard.

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Retour dans les catacombes du Centre Bell. Les joueurs quittaient l'édifice. Guy Carbonneau était avec son ami Dary Laflamme. De bonne humeur. La relation de Carbo avec son équipe s'est terminée dramatiquement, mais l'ancien capitaine des Glorieux éprouve encore le même amour pour son équipe. L'ancien coach et le présent patron, Jacques Martin, se sont retirés un peu à l'écart pour discuter. Canadien un jour, Canadien toujours.

Don Meehan, le plus puissant agent du hockey, discutait discrètement avec Bob Gainey. Six des joueurs actuels du Canadien sont des clients de Meehan. Ça veut dire que Meehan et Gainey ont négocié ces six contrats. Les deux peuvent être satisfaits. Dans le fond, c'est parce qu'il a complètement échoué dans son plan quinquennal et qu'il a dû faire table rase de ses joueurs l'été dernier, que Bob Gainey a collectionné cette douzaine de joueurs qui sont devenus une extraordinaire équipe sous la férule de Jacques Martin (férule, du latin ferula... baguette).

Mais obligé ou pas, forcé ou pas par les évènements, il faut souligner que Gainey paraît fort bien aujourd'hui et que plusieurs partisans soulignent ses mérites. Il faut cependant souligner que c'est Jaroslav Halak qu'il ne voulait pas faire jouer et qui a volé les quatre victoires contre Washington, qui lui permet également de bien paraître. Quand même, félicitations aux deux hommes.

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Tiens, voilà Maxim Lapierre qui sort du petit salon des joueurs et qui vient à ma rencontre. J'aime beaucoup Maxim Lapierre. C'est un gars plutôt sensible qui a besoin de se sentir désiré pour bien performer. Mais après le match de lundi soir, il flottait encore sur un nuage euphorisant.

Tout un but!

Ouais. Comme Maurice Richard quand il sortait du coin pour revenir devant le but...

Maxim a dû voir le film Maurice Richard. On y montre le Rocket se frayant un chemin jusque devant le but. Avec l'âme de Maurice et les yeux de Roy Dupuis.

Comme Maxim lance de la droite, je dirais qu'il ressemblait encore plus à Henri Richard quand il a marqué son but. Henri aimait longer la bande à sa gauche et revenir devant le but en tassant le défenseur avec son bras droit.

Mais Maxim avait le droit d'avoir les yeux brillants. Quand bien même ce ne serait que pour un soir, se faire comparer à un Richard, c'est déjà un grand honneur.

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Ça faisait 31 ans et non 30 que Don Cherry se mêlait dans ses chiffres et envoyait un homme de trop sur la glace. C'est la preuve que si Cherry ne savait pas compter jusqu'à six, je ne sais pas compter jusqu'à 31. C'est quand même moins grave. Merci à ceux qui ont souligné l'erreur. J'ai transmis vos courriels à François Gagnon, qui m'avait refilé l'information.

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Et enfin... le moment de vérité. Il y a deux semaines, j'ai choisi Pittsburgh pour gagner en sept. Ai-je commis une erreur? Ça se pourrait. Peut-être bien que oui, peut-être bien que non, dirait mon oncle Roland Tremblay «Petenban».

Et ce matin, si j'avais la chance d'effacer cette prédiction, sortirais-je ma gomme pour faire disparaître ce choix trop facile?

Peut-être bien que oui, peut-être bien que non.

Photo: Reuters

Après le match de lundi soir, Maxim Lapierre flottait sur un nuage euphorisant.