Briller de tous ses feux lorsqu'on revient à la compétition après cinq mois d'inactivité, c'est un exploit en soi. Mais on savait déjà que Tiger Woods n'était pas un athlète comme les autres.

Ce qui a rendu sa performance au Tournoi des Maîtres tout à fait exceptionnelle ce week-end, ce fut sa capacité de faire abstraction de tous les rebondissements largement médiatisés de sa vie personnelle qui ont entaché sa réputation depuis que ses nombreuses aventures extraconjugales ont fait la manchette à la fin de 2009.

 

Mais son mérite tient tout autant d'avoir réussi à maîtriser ses émotions tant bien que mal à chaque élan tout en se sachant épié par les amateurs de golf du monde entier, qui ne le perçoivent désormais plus de la même façon, qu'ils continuent à l'admirer ou non.

Dans ce contexte très particulier, que l'Américain ait ou non gagné un cinquième veston vert n'est pas capital. Bien sûr, seule la victoire compte pour ce féroce compétiteur, rien de moins. Cependant, pour une fois, il avait une autre préoccupation: s'assurer que ses fans ne lui avaient pas tourné le dos.

Parviendrait-il à retrouver le niveau de concentration qui a grandement contribué à ses succès phénoménaux sur les terrains les plus exigeants de la planète? Sa performance pendant les quatre derniers jours à Augusta ne laisse planer aucun doute: en dépit du jugement qu'on peut porter sur son comportement en dehors du terrain, Tiger Woods demeure un athlète hors du commun. Le golf est un sport qui se joue beaucoup «entre les deux oreilles». Le talent brut ne suffit pas. D'autres auraient flanché sous la pression immense qui pesait sur ses épaules. Pas Tiger Woods. Sa confiance inébranlable en ses moyens et son ardent désir de vaincre ont pris le dessus sur les faux pas de sa vie personnelle et lui ont permis de hisser d'un cran la qualité d'exécution de son jeu.

C'était quand même curieux de le voir, entre deux coups, réfugier ses yeux derrière des verres fumés, ce à quoi il n'avait pas habitué les téléspectateurs par le passé. On aurait dit qu'il cherchait parfois à éviter que son regard trahisse sa nouvelle fragilité.

À première vue, il avait moins l'air d'un robot, il a bien esquissé quelques sourires à la foule. Les spectateurs, réputés pour leur comportement respectueux au Masters, n'ont pas été avares d'applaudissements à son endroit. Ils ne semblent pas avoir gardé de rancoeur contre le joueur numéro un mondial. À son grand soulagement.

On ne s'attend plus à ce que Tiger Woods incarne le modèle que lui et son entourage avaient pris grand soin de bâtir durant toute sa carrière. Mais sur le plan purement sportif, il restera, pour les jeunes, une source d'inspiration, un exemple à suivre pour l'éthique de travail et la détermination dont il fait encore preuve pour atteindre des sommets inégalés.

En résumé: parfait (ou presque) au golf, mais imparfait dans la vie privée.