«Thomas Parent, qu'est-ce tu fais là?»

«Ben, je jette le pot de beurre de peanut. Y est vide.»

«Pis le recyclage? C'est juste bon pour les autres, le recyclage?»

Il y a quelques semaines, l'émission Les Parent, diffusée à Radio-Canada (et produite par La Presse télé), ébranlait les convictions environnementales de bon nombre d'auditeurs, qui ont écouté avec attention la défense de l'aîné de la famille, qui venait de balancer son pot dans la poubelle plutôt que dans le bac vert.

Le recycler, argumentait-il, impliquait le gaspillage de quatre litres d'eau chaude et d'une bonne quantité d'électricité, par l'entremise du chauffe-eau. «Ce qui fait que non seulement tu contribues à l'assèchement des rivières, pis à l'accroissement du méthylmercure, mais en plus tu augmentes la pression sur les besoins énergétiques», lançait-il à sa mère, bouche-bée.

Qui dit vrai? Voyons voir. Trois enjeux environnementaux sont en cause: l'eau, l'énergie et les déchets.

Il est vrai que nettoyer un pot de beurre d'arachides peut nécessiter une certaine quantité d'eau. Mais s'il y a des problèmes d'assèchement de rivières, il faudrait être de mauvaise foi pour les associer à un robinet qui coule pendant moins d'une minute: non seulement des villes comme Montréal perdent-elles la moitié de leur eau dans les fuites de canalisation, celle qui se rend au robinet retourne normalement, après épuration, à sa source. Un faux problème, donc, dans ce cas-ci.

La question énergétique est plus épineuse, en raison de la consommation d'électricité effrénée des Québécois. «De nos jours, faut faire très attention à notre consommation d'énergie si on veut continuer à vivre sur notre belle planète», ironisait d'ailleurs le fils aîné des Parent. Mais ce dernier, convenons-en, serait plus avisé de s'interroger sur les bas tarifs d'Hydro-Québec ou sur la pertinence d'avoir dans la maison un chauffe-eau qui fonctionne en permanence, que sur une utilisation bien ponctuelle de cet appareil. D'autant que l'électricité qui l'alimente est propre et renouvelable.

Quant au méthylmercure, la version organique du mercure, on peut certes déplorer qu'il s'en forme dans les réservoirs après la construction de nouveaux barrages, mais on s'attaquerait plus efficacement à ce problème toxique en s'opposant à l'exportation d'hydroélectricité chez nos voisins, ou en isolant son chauffe-eau et ses tuyaux à la limite, qu'en évitant de faire fonctionner ce dernier pour une si brève période.

Les déchets, enfin, posent un problème plus criant, car plus personne au Québec n'accepte que l'on creuse un nouveau dépotoir à proximité de son domicile. Or plus on jette de déchets dans la poubelle, plus vite les autorités arriveront à la conclusion que de nouveaux sites d'enfouissement seront nécessaires.

Entre l'eau, l'énergie et les déchets, ce dernier enjeu, dans le contexte de la disposition d'un contenant de plastique, est donc clairement le plus important. D'autant que ce que ne dit pas Thomas Parent dans son analyse du cycle de vie, c'est que la production dudit pot nécessite une certaine quantité de pétrole, tout comme son transport d'ailleurs.

Or le recyclage permet à cette matière plastique d'avoir une seconde vie, plutôt que de disparaître à jamais dans un grand trou. «Sais-tu combien de millions d'années ça prend avant de disparaître dans la nature, ça?» lance d'ailleurs la mère à Thomas.

Certes, il n'est jamais responsable de gaspiller une ressource, pas plus de l'eau que de l'électricité, mais toutes proportions gardées, dans le cas qui nous occupe, c'est le pot de beurre de peanut qu'il ne faut pas gaspiller...

*****

Courrier du bac

Question: Mon pot de beurre d'arachides, je peux le déposer sale dans mon bac? (Alexandra D., Montréal)

Réponse: Oui. Par respect pour les employés des centres de tri, vaut mieux nettoyer les contenants sales. Même grossièrement. Mais pour ceux qui dédaigneraient de mettre la main dans le pot ou qui seraient trop pressés pour le faire, sachez que les centres de tri préfèrent recevoir votre contenant de plastique un peu sale, que de le voir disparaître dans le grand trou de l'enfouissement. Après tout, n'oublions pas que les centres de tri font leur argent en revendant les matières recyclables.

*****

Pas de baisses de taxes!

La décision de Québec de refiler la facture du recyclage aux entreprises suscite une question: les villes, qui n'auront plus un sou à payer d'ici cinq ans, baisseront-elles leurs taxes? Eh non! L'Union des municipalités du Québec rappelle que les villes continueront d'avoir des obligations en vertu de la politique de recyclage, qui fixe 36 actions à l'horizon 2015. L'argent qu'elles ne dépenseront plus pour la collecte et le tri, note l'Union, elles l'investiront dans d'autres mesures visant à réduire les déchets. On peut donc prévoir que les citoyens, à qui les entreprises refileront assurément la facture, payeront donc deux fois pour un même service.

*****

Photo: Alain Roberge, La Presse

Les entreprises qui produisent des contenants et des emballages devront payer 100% des coûts de recyclage de leurs produits à compter de 2015.

Charte du recyclage

Le recyclage peut faire perdre son latin à un latiniste. On retrouve sur les tablettes beaucoup de polystyrène (dans le bac?), de plastiques mous et de plastiques rigides (les deux dans le bac, ou juste les mous?), de contenants faits à la fois de plastique et de carton (dois-je séparer le plastique?), etc. Pas évident. C'est pourquoi Recyc-Québec vient d'élaborer la première «Charte des matières recyclables», a appris La Presse, qu'elle publicisera bientôt à la grandeur du Québec. Pour ce faire, l'organisme a dû uniformiser ce qui est accepté par les centres de tri de la province. Patience, donc, votre tâche sera bientôt facilitée!

*****

Photothèque: La Presse