Accepteriez-vous de vous faire psychanalyser sur la place publique? C'est ce que sont en train de vivre les habitants de la Ville de Québec ces jours-ci. Rappelons que Clotaire Rapaille, psychanalyste de formation et publicitaire de profession, a eu pour mandat de sonder l'âme de la Vieille Capitale (expression qui pourrait bientôt être bannie de notre vocabulaire collectif puisque l'idée est de rajeunir l'image de la ville).

Pauvres Québécois! Ils ne savaient pas dans quelle galère leur maire, Régis Labeaume, les embarquait lorsque ce dernier annonçait avec tambours et trompettes l'embauche d'un publicitaire de réputation mondiale. Pour 250 000$, M. Rapaille doit trouver le code de Québec, la clé pour vendre la ville au reste du monde.

 

L'exercice auquel se livre Clotaire Rapaille, Français d'origine aujourd'hui installé aux États-Unis, n'est toutefois pas nouveau. Publicitaires, spécialistes du marketing et de l'image s'y livrent quotidiennement, que ce soit pour une marque de yogourt, une voiture, une multinationale ou même un pays. Rappelez-vous ce spécialiste du branding des villes Simon Anholt, de passage à Montréal en mars 2006, qui avait comparé la métropole au Kazakhstan tellement le trajet entre l'aéroport et le centre-ville l'avait déprimé.

Toutes les grandes villes passent par là lorsqu'elles souhaitent refaire leur image: New York, Toronto et même Montréal qui, en juin 2003, consacrait 50 000$ à un projet de branding qui n'a toutefois jamais donné de résultat concret.

Le problème avec la Ville de Québec, c'est que l'exercice est public.

Ainsi mercredi, lors d'un point de presse, le Dr Rapaille a choisi de partager avec nous le contenu de son carnet de notes. Un grand déballage plutôt traumatisant pour le patient dans lequel il a qualifié les Québécois de «fiers mais complexés, sado-masos, obsédés par Montréal et fanas de radio-poubelle». Un Prozac avec ça?

C'est une évidence, personne n'aime se faire dire ses quatre vérités en plein visage.

L'erreur de M. Labeaume n'est pas tant d'avoir embauché ce spécialiste plutôt qu'un autre (à Montréal, il n'y a pas si longtemps, certains décideurs buvaient comme du petit lait les paroles de l'urbaniste Richard Florida) mais surtout d'avoir publicisé ce remue-méninges, exposant ainsi la population de la Ville de Québec aux railleries du reste de la province.

Et si leur égo ne se remettait jamais de cet affront...

Ceux qui ont déjà suivi une psychanalyse le savent, le processus est très, très long et le patient, souvent fragile. En décortiquant la psyché de la Capitale devant les caméras de télévision, on risque de causer plus de mal que de bien. Le maire Labeaume voulait donner à ses concitoyens des raisons d'être fiers. Jusqu'ici, il a surtout réussi à les humilier.