Au lendemain de la rencontre économique de Lévis, il y a deux semaines, nous avions souligné que l'éducation se dégageait clairement comme devant être LA priorité de la société québécoise. Depuis, des faits se sont ajoutés pour illustrer à quel point il est urgent pour les Québécois d'appuyer cette priorité. Ce n'est pas une question idéologique ou partisane, c'est tout simplement la condition de la prospérité future du Québec, et donc de la survie de notre filet social et de notre culture.

Une étude publiée la semaine dernière par l'Institut de la statistique du Québec relève des données inquiétantes. Par exemple, la proportion de Québécois francophones détenant un grade universitaire est sensiblement plus faible que celle des anglophones et des allophones. Pire, l'écart entre les francophones et les anglophones n'a pas diminué depuis la Révolution tranquille.

Autre nouvelle troublante: une entente entre la Commission scolaire de Montréal et le syndicat de ses professeurs, qui se répercutera dans toute la province, met pour ainsi dire fin à l'aspect central (et le plus controversé) de la réforme pédagogique: l'évaluation des compétences. Il aura donc fallu une décennie d'expérimentation et de tâtonnements, sur le dos des élèves québécois, pour qu'on revienne à ce qui aurait toujours dû être la mission de notre système scolaire: l'enseignement rigoureux des matières de base.

Ces 10 années perdues, on ne peut les mettre sur le dos du gouvernement Harper, des accommodements raisonnables ou des sables bitumineux. Ce qui se passe dans nos écoles est décidé ici, par des politiciens, fonctionnaires et pédagogues québécois. Les Québécois sont donc les seuls responsables du gâchis des dernières années, dont la province ressentira sans doute les conséquences pendant longtemps.

Alors que les pédagogues jouaient aux apprentis sorciers avec les écoles primaires et secondaires, notre système universitaire peinait à donner aux étudiants d'ici une formation d'une qualité comparable à celle offerte par les autres universités canadiennes. Voilà une véritable tragédie, quand on sait que ces dernières ont elles-mêmes toutes les misères du monde à soutenir la concurrence internationale.

Dans un texte important publié sur Cyberpresse (www.cyberpresse.ca/opinions), le doyen de la Faculté des arts et des sciences de l'Université de Montréal, Gérard Boismenu, affirme qu'il est temps de revoir l'approche égalitariste qui empêche de mieux financer les universités et les secteurs de pointe. «Nous devons avoir le courage de faire des choix stratégiques», écrit-il.

Gouvernement, entreprises, syndicats, citoyens: toute la société québécoise doit absolument faire de l'éducation sa priorité, du primaire à l'université. Sommes-nous prêts à relever ce défi dont dépend notre avenir? Ou préférons-nous continuer à nous distraire au festival des débats accessoires?