Faites ce que je dis, pas ce que je fais. Cet adage sied très bien à la haute direction de Dollarama, la chaîne de «magasins à 1$». Pendant qu'elle vante ses résultats auprès de ses actionnaires, elle planifie la vente personnelle de blocs d'actions.

Jeudi 10 décembre dernier: «Nous sommes très heureux du solide rendement de l'entreprise au troisième trimestre, indique Larry Rossy, chef de la direction de Dollarama. Les consommateurs continuent de réagir favorablement à notre gamme grandissante d'articles à plus de 1$ et aux nouvelles occasions intéressantes qu'ils représentent. La rentabilité croissante de nos activités rend également compte des efforts de l'équipe de direction pour gérer les coûts et améliorer le résultat net.»

«Nous souhaitons la bienvenue à nos nouveaux actionnaires, ajoute-t-il. À la suite de notre premier appel public à l'épargne de 300 millions réalisé au troisième trimestre (octobre), nous avons réduit notre dette nette et nous sommes en excellente position pour continuer de faire croître l'entreprise.»

Lundi 11 janvier dernier, à peine un mois plus tard, la direction de Dollarama annonce que les principaux actionnaires de l'entreprise liquideront un bloc personnel de 11,6 millions d'actions par l'entremise d'un placement secondaire, et ce, à 21,50$ pièce. Plus la possibilité d'une vente additionnelle de 1,7 million d'actions. Cette vente leur rapportera entre 250 et 285 millions de dollars. Qui sont ces actionnaires? Il s'agit de l'actionnaire principal, Bain Capital, et des initiés dirigeants, Larry Rossy, Alan Rossy, Leonard Assaly et Stéphane Gonthier.

Question: si Dollarama va si bien tant du côté de la croissance de ses ventes et de sa rentabilité, pourquoi Bain Capital, Rossy et ses collègues s'empressent-ils de liquider des gros blocs d'actions?

Émis à 17,50$, le titre de Dollarama a enregistré une lucrative progression entre sa récente entrée en Bourse en octobre dernier et le surlendemain de l'annonce de ses résultats, à la mi-décembre. En cours de séance, le 14 décembre dernier, Dollarama atteignait un sommet de 24,07$. Ce qui représentait à ce moment-là une hausse de 37,5% par rapport au prix d'émission.

Depuis ce jour, l'action de Dollarama a entrepris une glissade. Elle s'échange aujourd'hui autour de 21,30$, voire en baisse de 12% par rapport à son récent sommet. Le titre se trouve ainsi à se négocier tout près du prix de vente (21,50$) convenu dans le cadre du placement secondaire qui va permettre aux principaux initiés de Dollarama de vendre possiblement jusqu'à 13,3 millions d'actions.

Les trois preneurs fermes de ce lucratif placement secondaire sont: RBC Dominion valeurs mobilières, Marchés mondiaux CIBC et Valeurs mobilières Crédit Suisse (Canada). Les trois mêmes firmes de courtage agissaient également comme principaux preneurs fermes lors du premier appel public à l'épargne de Dollarama, en octobre dernier.

Ne craignant aucunement la situation de conflit d'intérêts, les analystes de RBC Dominion valeurs mobilières et Marchés mondiaux CIBC recommandent fortement l'achat de Dollarama. L'analyste de Crédit Suisse, lui, se montre plus timide, en limitant son commentaire à «accès limité».

Notez que les analystes de deux autres preneurs fermes de l'émission initiale de Dollarama, soit Financière Banque Nationale et Valeurs mobilières Desjardins, débordent également d'optimisme dans leurs recommandations d'achat.

À la Bourse, c'est notamment le jeu de l'offre et de la demande qui fait bouger les titres des entreprises. Les titres montent généralement lorsque la demande dépasse l'offre. La «rareté» fait en sorte que les acheteurs sont prêts à payer un peu plus cher pour convaincre des actionnaires de céder leurs actions.

De plus, si des gros actionnaires, comme ceux de Dollarama, se mettent à liquider une partie de leurs blocs d'actions, il est évident que cela exercera une pression à la baisse sur le titre.

Chose certaine, tout en faisant sa marque avec la vente de produits à une piastre, Dollarama fait faire des centaines de millions de dollars à ses principaux actionnaires.

Je n'aime vraiment pas ce genre de gros actionnaires qui s'empressent de se remplir les poches.