Sur cette grosse boîte qu'ont ouverte les Français, il y a un peu plus d'un mois, on aurait dû inscrire: «Handle With Care/Maniez avec précaution»... Car son contenu est explosif, comme nous-mêmes en avons fait l'expérience. Immigration, nation, religion: on y trouve tout pour déclencher une pagaille sans nom. Et ça n'a pas manqué...

On parle évidemment du grand débat sur l'identité nationale dans le cadre duquel la République française a tenu à ce jour 100 assemblées locales et accueilli plus de 50 000 contributions.

 

Depuis hier, le débat lui-même est suspendu pour les Fêtes.

Mais des voix stridentes s'élèvent pour réclamer de Nicolas Sarkozy qu'il referme, scelle et fasse disparaître cette boîte... une «boîte de Pandore», a dit un député pourtant du parti majoritaire, dans laquelle «l'ensemble des bas instincts s'est développé et a couru dans la société». De fait, 50% des Français n'aiment pas non plus ce qu'ils entendent. Et une pétition signée par 140 personnalités - comédiennes, chanteurs, cinéastes, militants et autres philosophes - réclame elle aussi le remballage du colis suspect, qualifié de nauséabond, raciste, honteux. Pire: faisant le jeu de Jean-Marie Le Pen!

Malgré cette grogne, Éric Besson (le ministre plénipotentiaire dans ce dossier téléguidé de l'Élysée) veut non seulement continuer, mais étendre jusqu'à la fin 2010 cet exercice.

Arrivera-t-on à quelque chose dans ce que le quotidien Le Monde décrit bellement comme relevant de la «quadrature de l'hexagone»?...

Vue d'ici, l'affaire est étonnante.

D'abord, parce que les Français auraient dû savoir ce que nous, de Hérouxville à Bouchard-Taylor, (ou les Suisses, avec leur référendum sur les minarets) avons appris à la dure. C'est-à-dire: on ne pose pas de questions auxquelles on ne désire pas obtenir de réponses; ou auxquelles on ne veut obtenir que les réponses correctes, soufflées d'en haut!

Ensuite, nous n'avons pas ici l'«expérience nationale», c'est-à-dire le passé de la France... là où Clovis et Robespierre sont pris à témoin dans ce débat. Cela étant, comment se fait-il qu'une si vieille nation; une nation à l'identité aussi solidement enracinée; une nation qui a su régler des dossiers - signes et enseignement religieux à l'école- qui nous encombrent toujours... comment se fait-il, donc, que cette nation en soit aujourd'hui encore à se demander: qu'est-ce qu'être Français?

Ou bien tout ça n'est qu'une mascarade politique, ce que croient plusieurs. Ou bien, s'il parvient à ébranler cet indestructible monument qu'est la France, le brassage démographique, ethnique, idéologique et religieux en train de définir ce siècle sera beaucoup plus déstabilisant qu'on l'avait cru.

La seconde conclusion est, selon nous, la bonne.