Le Messie est revenu sur la glace. Samedi soir, à écouter les commentateurs à la télévision, le Canadien venait de gagner la Coupe Stanley, la Coupe du monde et la médaille d'or des Jeux Olympiques d'un seul coup.

C'est très bien. Quand on gagne peu et pas souvent, on a le droit de savourer chaque petite victoire comme si c'était la dernière.

Sauf qu'il faut reconnaître que le retour d'Andrei Markov a eu un bel impact sur le Canadien. Et qu'il faut également se dire que si Markov n'est pas le capitaine de cette équipe, il en est le leader sur la patinoire. Là où ça compte le plus.

On peut faire dire ce qu'on veut aux statistiques. Mais quand l'échantillonnage est suffisant pour répondre aux normes scientifiques de la statistique, il faut croire aux chiffres. Et les chiffres disent, pour parodier mon vieux confrère et ami Normand Farly, que le Canadien avec Markov est une bien meilleure équipe. On va voir ce que ça va donner avec le temps, mais Jacques Martin peut enfin compter sur une équipe qui a une certaine allure.

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Rien ne dit cependant qu'on a une vraie équipe à Montréal. Hier matin, j'écoutais Pat Burns expliquer à la radio ce qu'est une équipe. Et expliquer les mystères d'un vestiaire : «Y a personne qui sait ce qui se passe dans le vestiaire. Des fois, le coach a une idée, mais les journalistes ne le savent pas», a dit Burns.

Disons que je mettrais un bémol sur sa déclaration. S'il y a un coach qui savait ce qui se passait dans son vestiaire, c'est Pat Burns. Il avait le don de savoir quand prendre sa douche avec les joueurs et quand rester dans son bureau. Et j'ajouterai qu'à une époque pas si lointaine, tous les journalistes de beat savaient à l'heure près ce qui se disait et ce qui se passait dans le vestiaire et les bars fréquentés par les joueurs. Faut dire que ça fonctionnait d'une autre façon et que les liens tissés entre les journalistes et les joueurs étaient infiniment plus étroits que ceux d'aujourd'hui.

Si Burns a raison, personne ne peut savoir si cette petite équipe faite de joueurs pas trop pire est une vraie équipe. Unie, plus grande que la somme de ses parties.

Pat Burns, à l'oeil, est loin d'être convaincu. Et il a raison quand il souligne qu'on ne peut souder en un tout cohérent tant d'individus qui arrivent dans une équipe pour une nouvelle saison.

Personnellement, je partage ce scepticisme. Selon ce que j'en sais, les frères Kostitsyn n'en ont rien à faire de Maxim Lapierre, qui leur rend bien cette indifférence. Et pensez-vous que Scott Gomez est bien intéressé aux gaffes de Ryan O'Byrne? Ce qui préoccupe Gomez, ce sont les quatre buts à sa fiche. Dont deux dans un filet désert. Huit millions divisés par quatre buts, c'est 2 millions du but. Quand vous ferez votre épicerie pour les Fêtes, vous ferez le calcul avant ou sans les buts dans un filet désert.

Toutes les équipes que j'ai couvertes et qui ont gagné la Coupe Stanley formaient de vraies équipes. De solides mousquetaires d'Alexandre Dumas dont ils respectaient la devise : «Tous pour un et un pour tous.» Le jour où les troupiers de Jacques Martin vont appliquer cette règle de combat, vous allez voir une Flanelle bien différente. Elle va être inspirante. Un peu comme Guy Carbonneau avait réussi à le faire avec sa bande qui a gagné le championnat de l'Association de l'Est il y a deux ans.

Vous rappelez-vous à quel point Carbo tenait à ce que tout le monde s'engage? À quel point il voulait que chaque joueur riposte lui-même aux coups sournois et se porte à la défense d'un coéquipier mal pris? Vous souvenez-vous que Carbo ne voulait par de bouncer dans son équipe pour éviter que les joueurs ne commencent à se fier à quelqu'un d'autre pour les défendre? C'est pourquoi Carbo était tellement mécontent quand Bob Gainey lui a imposé Georges Laraque. Et qu'on me comprenne bien, Laraque est un homme fort honorable et un sportif respectable un peu perdu dans une organisation qui ne sait pas quoi faire de lui. Mais quand le grand Georges est arrivé, certains joueurs ont trouvé que ça demandait pas mal moins de courage de s'écraser devant une charge en laissant à Laraque le soin de provoquer une revanche.

Ce n'est pas en sacrifiant l'imposant Georges qu'on va recréer cet esprit d'équipe. C'est en décrochant quelques victoires qui vont procurer du plaisir aux joueurs. C'est le plus beau cercle vicieux qui soit. Remporter des victoires apporte du plaisir aux joueurs. Quand les joueurs ont du plaisir, ils aiment se retrouver ensemble et se trouvent de nouvelles qualités. Quand ils aiment se retrouver et qu'ils se trouvent de bons compagnons, ils remportent plus de victoires. Et en remportant plus de victoires...

Jusqu'à la Coupe Stanley quand il y a assez de talent dans l'organisation pour nourrir cet esprit d'équipe.

Pour l'instant, tout ce qu'on sait, c'est que le Messie est revenu sur terre. Une semaine avant l'heure prévue.

DANS LE CALEPIN - J'ai reçu plus de 400 courriels sur les chansons en français au Centre Bell. Dont des lettres de Stéphane Venne et de Gilles Valiquette. Entre autres. Et de plusieurs musiciens de différents groupes québécois. Samedi, on va avoir l'occasion de s'étendre sur le sujet. C'est fascinant. Et je réalise que le plus grand défaut du DJ du Centre Bell est la paresse. D'ici là, Joyeux Noël...