Sur le plan politique, la nomination de Richard Bergeron au comité exécutif de Montréal est un pari audacieux de la part du maire Gérald Tremblay. Cette nomination est d'autant plus intéressante que pour la première fois dans l'histoire de la Ville, un urbaniste sera responsable du dossier de l'urbanisme et de l'aménagement du territoire.

En entrevue cette semaine, le maire Tremblay observait que M. Bergeron avait de bonnes idées mais qu'il n'avait jamais eu l'occasion, au-delà de la théorie, de les mettre en application, avec les contraintes existantes.

 

M. Bergeron, un intellectuel d'abord, est donc invité à passer de la théorie à la pratique. Dans les faits, son premier défi sera de «contaminer» ses collègues du comité exécutif en les sensibilisant à l'importance des principes d'urbanisme, des principes qui, disons-le, ont été passablement malmenés au cours des dernières années.

Le timing est excellent puisque le plan d'urbanisme de la Ville de Montréal, adopté il y a cinq ans, doit être révisé. Voilà une occasion en or de donner des dents à ce document.

Car à l'heure actuelle, ce plan d'urbanisme est presqu'une farce. De Griffintown à Marianopolis, en passant par le projet de la gare Viger, la «vision» urbanistique de Montréal s'est adaptée au bon vouloir des promoteurs. Hauteur des édifices, densité, mixité, tout était négociable. Et Montréal n'est pas la seule ville à courber l'échine devant les promoteurs immobiliers. Un peu partout au Québec, les municipalités sont prêtes à bien des courbettes et des pirouettes dans l'espoir d'un investissement de plusieurs millions de dollars sur leur territoire.

Quelles sont les valeurs urbanistiques que Montréal est prêt à défendre auprès des promoteurs? Voilà la question que devra se poser Richard Bergeron au cours des prochaines semaines.

On connaît déjà les idées du chef de Projet Montréal sur cette question. M. Bergeron est un grand défenseur du Transit Oriented Development, un concept de développement non pas basé sur l'automobile, comme c'est le cas depuis plusieurs décennies au Québec, mais bien sur le développement des transports collectifs. Montréal accuse plusieurs décennies de retard dans ce domaine. C'est d'autant plus vrai que cette vision du développement de la région métropolitaine, basée sur l'expansion du réseau de transport en commun, figurait dans le plan d'aménagement de la Communauté urbaine de Montréal en... 1971 (!). Que s'est-il passé ou plutôt, que ne s'est-il pas passé pour qu'on se retrouve aujourd'hui face à des projets comme le pont de l'autoroute 25, l'autoroute Notre-Dame, l'échangeur Turcot? C'est cette réalité à laquelle fait référence la maire Tremblay et à laquelle Richard Bergeron l'urbaniste devra se frotter au cours des prochains mois. Saura-t-il rallier les autres membres du comité exécutif et surtout, le maire de Montréal, à sa vision? On se le souhaite.

nathalie.collard@lapresse.ca