Depuis que la débâcle économique a secoué la planète il y a 15 mois, la Chine ne cesse d'étendre sa zone d'influence.

Sur le point de ravir au Japon son deuxième rang sur l'échiquier mondial, la Chine a su profiter d'un contexte qui a favorisé sa montée en puissance. Sa marge de manoeuvre financière (avec ses réserves supérieures à 2000 milliards), combinée à l'enlisement des États-Unis, soudain un géant aux pieds d'argile, ont carrément propulsé la Chine à l'avant-scène.

Exposé à une chute prononcée de ses exportations, le gouvernement chinois s'est empressé d'adopter un ambitieux plan de relance de 586 milliards dès l'automne 2008. En quête d'une bouée de sauvetage, la communauté internationale s'est tournée vers la Chine, qui a mis les bouchées doubles pour importer les matières premières nécessaires à la réalisation de ses projets d'infrastructures, au profit de ses partenaires commerciaux.

 

Après avoir légèrement fléchi, la croissance chinoise a repris son rythme de croisière d'avant-crise et vogue allègrement vers les 10%. Pendant ce temps, les États-Unis, déjà pointés du doigt pour avoir initié le ralentissement économique, peinent à sortir de la récession. Résultat, qui a confondu les sceptiques: la locomotive qui tire présentement le train mondial vers la reprise, ce ne sont plus les États-Unis, mais plutôt la Chine.

Autrefois fort discrète, la Chine se sent prête à assumer un leadership plus visible. En position de force, elle ne se gêne plus pour critiquer ouvertement les politiques économiques de l'Occident, et des États-Unis en particulier. Elle se dit même en faveur du remplacement du billet vert comme monnaie de réserve par un panier de devises. À la table du G20 ou au sein du FMI, la Chine prend du galon.

Dans une attaque contre les pays industrialisés, le président Hu Jintao a réclamé vendredi dernier qu'on mette un terme aux restrictions commerciales «déraisonnables» qui affectent les pays en voie de développement. Ces barrières minent les efforts des entreprises étatiques chinoises qui cherchent à investir massivement dans les ressources au Canada, aux États-Unis, en Australie et au Chili.

La pression monte afin que le régime chinois permette à son yuan de s'apprécier face au dollar américain, qui a perdu 15% de sa valeur depuis le printemps. Une telle mesure contribuerait à stimuler les exportations vers la Chine et à encourager la consommation des Chinois puisqu'il en coûterait moins cher pour importer des produits étrangers. Mais Pékin, forte de son statut de superpuissance économique, continue de faire la sourde oreille afin de préserver ses surplus commerciaux avec les États-Unis, au grand dam de Washington.

Désormais, les États-Unis ne peuvent plus se comporter en dominateurs face à la Chine, son principal créancier, dont l'aura grandit de jour en jour. Le président Hu s'attend maintenant à négocier d'égal à égal avec son vis-à-vis Barack Obama, qu'il reçoit présentement.