Suis-je le seul à me demander ce qui se passe avec le Grand Prix du Canada?

Le 21 octobre, mon collègue Denis Lessard a écrit que la confirmation du retour de la F1 à Montréal en 2010 était une question de jours. Trois semaines et des élections municipales plus tard, on attend toujours l'annonce officielle.

Entre-temps, la F1 est entrée dans une nouvelle zone de turbulences, quelques mois à peine après avoir frôlé un schisme qui aurait consacré la naissance d'un championnat parallèle.

Après BMW plus tôt cette année, Toyota a annoncé qu'elle ne reviendrait pas dans le paddock l'an prochain. Le manufacturier de pneumatiques Bridgestone, fournisseur exclusif du championnat, quittera au terme de la saison 2010. Quant à Renault, une décision sur l'avenir de l'écurie doit être prise d'ici Noël, a indiqué son PDG, Carlos Ghosn.

Il y a beaucoup d'incertitude dans l'air. Tellement qu'on peut se demander si la F1, dans l'hypothèse où elle revient à Montréal l'été prochain, ressemblera à celle qu'on a connue au cours des dernières années.

Le coup d'envoi de la saison 2010 est prévu pour le 14 mars, à Bahreïn. Les voitures de quatre nouvelles écuries - USF1, Campos Meta 1, Manor Grand Prix et Lotus - sont censées y donner leurs premiers tours de roues. Or, à part Bruno Senna, à qui l'argent et le nom de famille ont valu un volant chez Campos, on ignore toujours qui seront les pilotes de ces équipes.

Certains se demandent même si ces équipes seront bel et bien sur la grille de départ à Bahreïn. Ross Brawn, grand patron de l'écurie éponyme, s'étonnait récemment que USF1 n'ait pas encore entrepris les tests d'impact sur sa future monoplace. Ferrari semble aussi avoir des doutes. «La Formule 1 continue de perdre des morceaux importants, pouvait-on lire la semaine dernière sur le site de la Scuderia. En échange - si c'est l'expression juste -, Manor, Lotus, USF1 et Campos Meta arrivent. On pourrait dire que c'est du pareil au même, qu'il suffit qu'il y ait assez de participants. Mais ce n'est pas entièrement vrai et il faudra voir l'an prochain si nous serons vraiment aussi nombreux à Bahreïn.»

La condescendance de Ferrari, prévisible, témoigne implicitement d'un certain désarroi face à ce que le chef de la direction de Williams, Adam Parr, a qualifié dans le Financial Times de «fin de l'ère des manufacturiers». (Ne restent plus que Ferrari, Mercedes et Renault.) Elle est aussi un peu déplacée, tant il est vrai que les Toyota (et les Ferrari!) de ce monde ont alimenté pendant des années la spirale inflationniste de la F1 - et chassé du même coup des équipes plus petites comme Jordan et Minardi, incapables de suivre le rythme.

La résurgence des «garagistes» est a priori sympathique. Cela dit, les monoplaces du nouveau quatuor, plus celles de Williams, seront toutes propulsées par des moteurs Cosworth. Le public suivra-t-il si la F1 se métamorphose tranquillement en grosse série Indy avec moteur unique?

Autre chose: le départ successif de BMW et Toyota, après celui de Honda l'hiver dernier, affaiblit l'Association des équipes (FOTA) et renforce la position du grand argentier du sport, Bernie Ecclestone. Il lui sera assurément plus facile d'influencer les modestes nouveaux venus, qui dépendront de lui pour une part importante de leurs revenus, que de dicter ses quatre volontés aux multinationales de l'automobile. Pas sûr que ce soit une bonne nouvelle.

Tous ces bouleversements remettent-ils en question la tenue du Grand Prix du Canada? Après tout, le maire Gérald Tremblay a déclaré en juin dernier qu'il n'y aurait aucune entente avec Ecclestone «si nous n'avons pas des garanties légales, des documents signés qui certifient qu'on a les écuries, les pilotes et les manufacturiers».

Dans l'entourage du maire, on assure que le retard à confirmer le retour de la F1 est vraiment dû à des «éléments techniques liés à la fiscalité». Et on fait la distinction avec la situation qui prévalait il y a cinq mois. «Ce qui est positif, c'est qu'il n'est plus question du spinoff d'un autre championnat, dit-on. On ne risque plus de se retrouver avec un demi-plateau, ce qui était le danger l'an passé.»

N'empêche. Avant de signer une entente qui consacrera le versement de 75 millions de dollars de fonds publics à Bernie Ecclestone, Québec et Ottawa devraient redoubler de prudence et exiger un maximum de garanties. Quand on ne sait même pas de quoi l'avenir sera fait dans six mois, la pire chose à faire serait de plonger les yeux fermés pour cinq longues années.

Fehr à la rescousse

Selon le Hockey News, le directeur sortant de l'Association des joueurs du baseball majeur, Don Fehr, conseillera les joueurs de la LNH dans la recherche du nouveau directeur de leur association. Il aura aussi son mot à dire dans la rédaction d'une nouvelle constitution.

C'est une excellente nouvelle pour l'Association des joueurs. Sauf pour le dossier du dopage, dans lequel il a pratiqué l'aveuglement volontaire, Fehr a été un leader remarquable pour les joueurs de baseball. Son influence sera particulièrement bienvenue en ce qui concerne la nouvelle constitution de l'AJLNH.

Si quelqu'un peut faire comprendre aux joueurs que le directeur de leur association doit pouvoir agir de manière autonome - ce que ne pouvait faire Paul Kelly, congédié cet été -, c'est bien Don Fehr.