À en croire les plus récentes déclarations des groupes écologistes et des partis d'opposition, le Canada est en train de faire dérailler, à lui seul, les négociations en vue d'un nouveau traité sur la lutte aux changements climatiques. «Si le Canada décide de continuer à bloquer tout, c'est sûr qu'il n'y aura pas d'accord», selon un membre de la Fondation David Suzuki. «Le Canada a échafaudé une stratégie qui risque de compromettre un accord à Copenhague», soutient le député bloquiste Bernard Bigras.

De tels propos déforment la réalité. S'il n'y a pas d'entente lors de la conférence de Copenhague le mois prochain, ça ne sera certainement pas à cause du Canada.

 

Il est clair aujourd'hui que le traité post-Kyoto ne sera pas conclu dans la capitale danoise, les positions des principaux joueurs étant beaucoup trop éloignées les unes des autres. La faute au Canada? Dans les principaux journaux britanniques, anglais et américains couvrant les pourparlers, on ne trouve pas un mot sur notre pays. Le Canada ne pèse pas tout simplement assez lourd pour être en mesure de bloquer ou de sauver de telles négociations.

Les principaux obstacles sur la route d'une entente sont plutôt:

- le retard des États-Unis à annoncer les réductions d'émissions de gaz à effet de serre auxquelles ils seraient prêts à consentir;

- l'absence d'engagements fermes de la Chine;

- le fossé existant entre les positions des pays riches et des pays en voie de développement (PVD). Les PVD réclament que les pays développés réduisent leurs émissions de 40% sous les niveaux de 1990 d'ici 2020, alors que les pays riches parlent plutôt de 16%;

- le financement des efforts des pays pauvres. Ceux-ci demandent que les pays développés contribuent 282 milliards (dollars canadiens) par année à l'horizon 2020. C'est deux fois toute l'aide au développement présentement versée. Même si on retenait l'estimation plus modeste faite par la Commission européenne, 79 milliards par année, le Canada devrait verser pas moins de 3 milliards par an aux PVD. Qu'en penseraient les contribuables?

Les écologistes canadiens cherchent à faire pression sur le gouvernement Harper en soulevant l'indignation des gens d'ici au sujet de son positionnement international. C'est de bonne guerre mais le message est trompeur. Pourquoi ne parle-t-on pas de la Russie, qui émet trois fois plus de GES que le Canada et qui n'est pas pressée du tout de contribuer à la lutte aux changements climatiques? Pourquoi ne pas dénoncer l'Allemagne? L'Inde? L'Arabie Saoudite?

En réalité, la position de négociation de chaque pays est tributaire de ses intérêts économiques. Soutenir que le Canada devrait se montrer plus vertueux que les autres, c'est faire preuve d'un angélisme qui n'a pas sa place sur l'impitoyable scène internationale.