Il y a un an presque jour pour jour, alors que le monde était secoué par une crise financière sans précédent, le président français, Nicolas Sarkozy, longtemps dénoncé pour son libéralisme excessif, s'engageait à piloter une «refondation du capitalisme». Rien de moins! «Le marché qui a toujours raison, c'est fini», lançait-il dans un discours à Toulon.

Sans entretenir de projets aussi ambitieux, à peu près tous les dirigeants politiques de la planète promettaient de revoir de fond en comble les régles régissant les institutions et les marchés financiers. Aujourd'hui, où en sommes-nous? Autant au plan national qu'au plan international, un travail colossal de réflexion et de négociation a été abattu. Mais nous sommes encore à des années-lumière de la refondation dont rêvait M. Sarkozy. Nous sommes même très loin d'une réforme en profondeur du système financier.

De toute façon, si des changements importants s'imposaient afin de prévenir des dérapages similaires, la crise ne mettait pas en cause les fondements du système capitaliste. En outre, on savait dès le départ que peu importe l'envergure du nouveau barrage réglementaire qu'on bâtirait, elle ne saurait prévenir la prochaine crise... pour la simple raison que celle-ci sera différente et imprévisible.

Le grand acquis de la dernière année, c'est une coordination accrue entre les économies de la planète, incluant celles des puissances émergentes telles la Chine et le Brésil; le G7 a cédé la place au G20. Ministres des Finances et banquiers centraux de ces pays ont planché sur les grandes lignes de plusieurs réformes, en particulier sur celles de la rémunération des banquiers et des obligations de fonds propres des institutions financières. Ces dossiers seront abordés lors du prochain sommet du G20, à Pittsburgh, dans dix jours. Nul doute que le communiqué final comprendra des lignes directrices en ces matières. Mais il ne faut pas s'attendre à ce que les patrons et opérateurs de marché des banques voient leur rémunération fondre radicalement; tout au plus les modalités les inciteront-ils à plus de prudence.

D'autant plus qu'à mesure que l'économie reprend des forces, le climat de crise s'estompe. La volonté et l'intérêt pour de vastes réformes faiblissent simultanément. Aux États-Unis, après des mois de débats internes, l'administration Obama a déposé en juin 16 projets de loi visant à mieux contrôler les activités du monde de la finance. Toutefois, le débat sur la réforme de la santé a depuis pris toute la place. Il est impossible de prédire quand ces projets de loi seront adoptés et surtout ce qu'il en restera.

Ceux qui souhaitaient ligoter les forces du marché seront amèrement déçus. Heureusement, ce ne sont pas tant les changements de structure qui comptent que ceux de culture. La crise aura montré à tous les acteurs économiques, en particulier les plus jeunes, qu'une grave crise est toujours possible; il faut se comporter en conséquence.

On aura aussi appris, du moins l'espérons-nous, qu'il est fondamental de comprendre ce dans quoi on investit, même si un courtier (ou une agence de notation) jure sur la tête de sa mère (ou d'une cote AAA) qu'il s'agit d'un placement sûr. La crise aura également rappelé à chacun, brutalement, qu'un rendement plus élevé signifie nécessairement un risque plus élevé.

Des règles de base? Bien sûr. Mais que l'appât du gain et la frénésie des bulles font chaque fois oublier aux investisseurs lilliputiens comme aux Gullivers de la finance.