Je regardais le visage de Frédéric Niemeyer quand il s'est rendu au filet pour tendre la main au vainqueur Roger Federer. Le grand Freddy venait de perdre un match plus serré qu'espéré et il avait un sourire satisfait et heureux. Il savait qu'il venait de donner une bonne opposition au meilleur joueur de tous les temps. Il était fier de ce qu'il venait de faire. Il avait raison.

Il y a de ces moments que le tennis permet. Quand deux gentlemen disputent un bon match et que le gagnant accepte les félicitations en faisant miroir à la satisfaction du perdant. Federer était content lui aussi. Il venait de travailler pendant une heure et demie, il avait résisté à de puissants services du Québécois, il avait gratté la rouille pendant tout un premier set laborieux et avait donné juste ce qu'il fallait au deuxième pour gagner. Pas plus, pas moins.

Federer était venu faire un petit tour au salon Rogers une heure avant le match. Le temps de saluer quelques amis et de prendre conscience qu'il s'agirait du dernier match de Niemeyer devant ses partisans à Montréal.

Après sa victoire, il lui a rendu hommage et il a attendu à quelques mètres que Niemeyer donne son entrevue à Hélène Pelletier, autant pour la télé que pour la foule du stade Uniprix. Comme le gentilhomme qu'il est.

Les gens dans le stade ont su apprécier le moment. Ce n'est pas pour rien que les amateurs de tennis espéraient tant la venue de Federer à Montréal pour la Coupe Rogers. C'est certain que Rafael Nadal a un charisme énorme, une beauté animale et qu'il est fort gentil lui aussi. D'ailleurs, les deux grands adversaires ont failli se retrouver aux mêmes tables à l'heure du souper. Nadal mangeait avec une amie, bien élevé sans doute, mais n'offrant aucune ouverture à quiconque aurait voulu le déranger.

Quelques minutes plus tard, quand Federer est venu à son tour, c'est lui qui a fait le tour des tables pour saluer quelques connaissances. Dans un français impeccable qui ferait rougir bien des Montréalais. Mêmes francophones. Et rappelons que Federer est un Suisse allemand et que le français est la deuxième ou troisième langue de Federer avec l'anglais. Mais l'éducation et l'élégance vont souvent bien ensemble.

Curieusement, Niemeyer a parlé de «Roger» en prononçant son nom à la française tandis qu'à RDS, on garroche du «Rodger» gros comme le bras. Il faudrait demander à Federer comment on prononce son prénom en allemand.

F 1: qui a la compétence pour négocier?

C'est à peu près certain que Montréal va retrouver son Grand Prix, mais il y a quand même des signes inquiétants dans la valse hésitation des derniers jours.

En novembre dernier, Tourisme Montréal et les hôteliers s'étaient engagés à verser 5 millions pour favoriser le retour de la Formule 1 à Montréal. Tous les visiteurs de partout et pendant toute l'année allaient donc payer quelques dollars de plus pour permettre aux hôteliers de paqueter les établissements au début de l'été. Tout le monde y gagnait. Suffisait de faire passer la taxe de 3 à 4% pour trouver les 5 millions requis. Le hic, c'est que les hôteliers ruent dans les brancards et que le ministre des Finances, Raymond Bachand, ne la trouve pas drôle du tout.

Qu'on se le dise, Bernie Ecclestone a déjà gagné tout ce qui était essentiel. Quant aux bricoles, je me demande sérieusement qui a les compétences voulues pour tenir tête à Ecclestone. B'wana B'rnie baigne dans la F1 depuis les années 60. Il a créé la FOCA puis la FOA et il est plusieurs fois milliardaire. Il a tous les contacts dans tous les milieux de la Formule 1. Il sait qu'il va décider lui-même du prix des tickets et ce faisant, des revenus à la billetterie. Il pourrait même revendre le Grand Prix à un Arabe ou un Russe une fois l'entente signée.

Ma question est toute simple. Michael Fortier est un avocat et banquier compétent, mais a-t-il l'expertise voulue pour voir venir les magouilles de Tonton? Raymond Bachand, qui a été mêlé au fiasco des Expos avec Jeffrey Loria, a-t-il le temps et les coudées franches pour faire face à Ecclestone? Et le maire Gérald Tremblay, qui compte sur le Grand Prix pour stimuler sa campagne électorale, peut-il être aussi coriace devant Ecclestone qu'il tentait de l'être devant Normand Legault?