Il n'y a pas beaucoup d'endroits à Montréal où l'on peut s'allonger sous un saule pleureur, au bord d'un étang, pour lire ou somnoler dans un silence relaxant.

Le parc Jarry est un de ces endroits. Le nouveau parc Jarry, devrait-on dire. Si vous n'y êtes pas allé depuis quelques années, ce vieil espace vert autrefois drabe, sauf pour le domicile des Expos, a été réaménagé, redessiné et nettoyé avec goût par la Ville de Montréal.

Le parc Jarry est aujourd'hui magnifique, au milieu de rues de plus en plus en demande à l'est et d'un grandissant quartier multiethnique à l'ouest. Bref, il y a de la vie autour du parc Jarry. Tellement de vie que lorsque le stade de tennis - DuMaurier à l'époque et Uniprix aujourd'hui - a été construit (1996), la Ville de Montréal et Tennis Canada ont été confrontés à des groupes de citoyens allumés et bien organisés pour réévaluer, et surtout réduire, l'ampleur de la construction.

Tout ça pour vous dire qu'en début de semaine, les dirigeants de Tennis Canada ont annoncé avec fierté leurs plans de rénovations du stade Uniprix. Il est question surtout d'agrandir... les bureaux administratifs, le court numéro un, en y ajoutant quatre terrains de terre battue.

Et voilà que ça recommence, le mot-clé ici étant «agrandir». Tennis Canada parle de construire sur le stationnement, sans toucher au parc. On verra. Depuis quand les stationnements ont-ils moins de valeur que les espaces verts aux yeux des constructeurs?

Une belle bagarre en vue. Les citoyens sont encore mieux organisés qu'en 1996.

C'est bien beau le tennis, la pratique du sport et le développement de l'élite, il y en a qui croient que les saules pleureurs, les étangs et les espaces verts paisibles ont aussi leur importance.

L'escouade des squeegees

Il n'y a rien de plus désolant qu'un tournoi de tennis quand il pleut. Et l'on sait qu'à la moindre goutte, ces athlètes-là arrêtent tout, avec raison.

Lorsque des nuages noirs sont soudainement apparus au milieu de l'après-midi, hier, on s'est dit que la journée serait longue. Les journalistes se préparaient à se raconter leurs vieilles histoires pendant des heures...

Sauf que les temps ont changé. Aussitôt l'orage passé, deux petites Zamboni vertes sont apparues et, avec une vitesse qui m'a paru un peu audacieuse, ils ont sillonné le terrain en ne laissant pas une goutte derrière elles. Puis, une trentaine de squeegees sont accourus pour poursuivre le travail dans tous les coins, et quatre séchoirs ont terminé l'ouvrage.

Croyez-le ou non, en moins de cinq minutes, le court numéro un était prêt à accueillir les joueurs. On a presque applaudi.

Je me souviens d'une époque où l'on asséchait le court avec des serviettes. Ne riez pas, ce n'est pas si lointain...

Hier, au parc Jarry, les stars de la journée n'étaient pas celles qu'on attendait.

Patrick Kane

Et nous qui pensions que les frères Kostitsyn étaient un peu nonos...

Pendant la semaine du match des Étoiles, à Montréal l'hiver dernier, j'avais remarqué au centre-ville un gratte-ciel sur lequel on avait collé une immense photo de Patrick Kane, la jeune vedette des Blackhawks de Chicago. Cent pieds de hauteur peut-être... Immense. De quoi faire tourner la tête d'un si jeune homme, m'étais-je dit.

En début de semaine, Patrick Kane nous a prouvé qu'on n'avait pas besoin de sortir de la lointaine Biélorussie pour faire des conneries.

Récapitulons : Kane, 20 ans, et son cousin prennent un taxi dans sa ville natale de Buffalo. Le chauffeur n'a pas toute la monnaie. Il manque quelque chose comme 20 cents. Furieux, Kane, le jeune millionnaire, et son cousin agressent le chauffeur, le laissent blessé et reprennent leur argent. Il était quatre heures du matin...

Voilà le problème qui resurgit. On les traite comme des jeunes dieux, on recouvre des gratte-ciel de leur photo, mais on ne surveille pas s'ils sont capables, à 20 ans, de supporter toute cette gloire et cette richesse soudaines. On ne se demande pas si le message reçu ne sera pas qu'ils peuvent tout se permettre, qu'ils sont au-dessus des lois...

Tout ça est un peu absurde, si vous voulez mon avis. Un encadrement élémentaire réglerait la question.