On pourrait dire de certains politiciens qu'ils sont des Whippets: durs à l'extérieur, mais tendres à l'intérieur. Ceux-là ne sont pas aussi résistants qu'ils en ont l'air.

D'autres, comme le maire actuel de Montréal, appartiennent plutôt à la famille des guimauves: mou dehors, mou dedans.

Louise Harel, quant à elle, serait plutôt du genre Glosets: douce et agréable à l'extérieur, mais dure à l'intérieur.

On a dit bien des choses de Louise Harel au cours de sa longue carrière politique à Québec.

 

Son ancien collègue, puis chef, Bernard Landry, l'a déjà qualifiée de mère Teresa, ce qui, malgré les odeurs de sainteté, n'était pas un compliment du tout.

Ça, c'est le côté doux de Louise Harel, celui qui se voit et qui s'entend. Ses anciens collègues savent toutefois que, sous la couche sucrée, se cache une bête politique féroce.

«Louise, derrière sa petite voix, c'est une tueuse», m'a déjà dit une ancienne collègue ministre de Mme Harel dont je tairai le nom pour ne pas ruiner leurs relations.

De toute évidence, elle n'a rien perdu de son efficacité durant sa courte retraite de la vie politique. Après avoir laissé son nom circuler (des fans de Louise Harel envoient des courriels et des lettres ouvertes en sa faveur depuis des mois), elle a habilement «magasiné» dans les deux partis de l'opposition en attendant qu'un chef lui cède sa place. Rarement aura-t-on vu une course à la direction aussi rapide et efficace.

De sa petite voix, elle expliquait hier matin à René Homier-Roy ne «pas avoir de plan de carrière» pour accéder à la mairie de Montréal. Apparemment, elle n'avait pas de plan de retraite non plus et elle a bien manoeuvré pour se retrouver aujourd'hui dans le rôle de favorite aux élections municipales de novembre.

Louise Harel est ambitieuse et elle aime le pouvoir, deux qualités dont Montréal a un urgent besoin.

La question, maintenant, est de savoir quelles sont ses ambitions pour Montréal et ce qu'elle compte faire du pouvoir si elle en hérite dans cinq mois.

Depuis le temps que j'écris et dis ma déception de constater que le poste de maire de Montréal fait fuir les candidats de qualité, il serait incohérent et injuste de critiquer l'arrivée de Louise Harel.

Cela dit, soyons franc, Louise Harel ne représente pas exactement la relève, le renouveau en politique ou le vent de fraîcheur qu'auraient amené de nouveaux visages dans cette campagne.

L'entrée en scène de ce vétéran perpétue par ailleurs l'idée que les politiciens provinciaux ou fédéraux à la retraite viennent se désennuyer en faisant un dernier petit tour en politique municipale. Ailleurs, des politiciens passent par le municipal, en début de carrière, pour se propulser aux échelons supérieurs (Jacques Chirac, ancien maire de Paris, est par la suite devenu président de la Républiquefrançaise; Rudy Giuliani a été maire de New York avant de tenter sa chance à l'investiture républicaine; le premier ministre de Colombie-Britannique, Gordon Campbell, a été maire de Vancouver).

L'expérience politique est un atout inestimable et, je le répète, Mme Harel a acquis énormément d'expérience, mais, avec elle, nous restons dans le prévisible et l'entendu, avec son inévitable lot de paroles creuses et une bonne dose de langue de bois.

Avant que l'on m'accuse de faire de l'âgisme, je précise que mes réserves n'ont strictement rien à voir avec les 63 ans de Mme Harel, mais plutôt à la manière de faire de la politique. À ce chapitre, Mme Harel sort du même moule que Gérald Tremblay.

Pour le moment, la candidate-vedette semble miser davantage sur la lassitude de l'électorat envers Gérald Tremblay que sur un plan longuement mûri pour Montréal.

Mais Louise Harel a-t-elle ce qu'il faut pour gouverner Montréal?

Là-dessus, les avis sont mitigés, au mieux, au sein de sa propre famille politique, le Parti québécois.

Des gens qui l'ont côtoyée à Québec disent qu'elle est brouillonne, qu'elle n'a pas de grandes réalisations à son actif aux différents ministères qu'elle a dirigés (il faudrait tout de même lui donner l'équité salariale) et qu'elle incarne une social-démocratie passéiste.

Son plus grand handicap, dit-on, c'est qu'elle n'a ni expérience ni intérêt pour le développement économique, ce qui doit pourtant être la priorité à Montréal.

Bien sûr, elle traîne aussi le boulet de la fusion municipale, du moins pour les citoyens des 15 villes de banlieue fusionnées qui ont encore cet épisode coincé dans la gorge. Mme Harel a raison de dire que Montréal est surgouverné, mais elle n'a certainement pas amélioré sa cote de popularité dans ces arrondissements en disant vouloir centraliser les pouvoirs à l'hôtel de ville de Montréal.

Les accrochages entre Mme Harel et les maires anglophones sur la question linguistique lorsqu'elle était ministre des Affaires municipales au début des années 2000 viendront aussi ponctuer sa campagne, c'est écrit dans le ciel.

Malheureusement pour Louise Harel et son nouveau parti d'adoption, c'est dans ces anciennes villes devenues arrondissements que le taux de participation est le plus élevé. Ce sont ces anciennes villes qui ont battu Pierre Bourque en 2001.

Mme Harel compte certainement plus de partisans dans les arrondissements centraux, mais c'est là que l'on retrouve le plus de locataires, des électeurs qui ont tendance à bouder davantage les urnes.

Au-delà du dossier pourri des fusions, il faut aussi rappeler que le bilan montréalais des gouvernements dans lesquels Mme Harel a servi, de 1994 à 2003, n'est pas toujours reluisant.

Le CHUM et l'autoroute Notre-Dame, notamment, sont deux jolis merdiers laissés en héritage aux Montréalais par les gouvernements péquistes.

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